Vers un prolongement du règne de Kagame ? Le président rwandais se représente    Tunisie: Hausse de la valeur des exportations tunisiennes des produits biologiques    Dattes tunisiennes: 717,7 millions de dinars de recettes d'exportation à fin avril    La Turquie en alerte : Tentative de coup d'état et vaste opération de répression    Tunisie – Lotfi Dhiab appelle à conjuguer les efforts pour faire réussir l'expérience des entreprises citoyennes    Ayoub Ghedamsi donne des détails sur l'affaire de Houssem Hajlaoui    Complot contre la sûreté de l'Etat : 12 accusés d'Ennahdha renvoyés en justice    L'Espagne va reconnaitre l'Etat de Palestine à cette date !    Tunisie – La Manouba : Jadida : Dix élèves intoxiqués par des bonbons offerts par leur camarade    Audi offre un facelift aux Q7 et Q8 électrifiés    LTDH : non à la torture, non à la répression des libertés !    Le "lobbying" revient comme un boomerang : la Cour confirme les 3 ans de prison et l'amende d'un million de dollars    ENNAKL Automobiles en avant dans le virage ESG de la Bourse de Tunis    Nabeul : Démantèlement d'un réseau de trafic de drogue    Cette année, le prix du mouton de l'Aïd monte en flèche    Recensement : Plus de 3 millions de ménages concernés    Liaison électrique entre l'Italie et la Tunisie : Un projet de 850 millions d'euros    Mandat de dépôt contre Sherifa Riahi    Guerre en Ukraine: Situation actuelle (Ambassade d'Ukraine en Tunisie)    Symposium international 'Comment va le monde? Penser la transition' à Beit al-Hikma    CA : 5 billets par supporter pour le derby tunisien    Rencontre avec les lauréats des prix Comar d'Or 2024    Hechmi Marzouk expose 'Genèse Sculpturale' à la galerie Saladin du 18 mai au 23 juin 2024    Daily brief régional du 17 mai 2024: Des peines de huit mois de prison pour 60 migrants irréguliers subsahariens    ST: Rêver plus grand    Ligue des champions — L'EST affronte Al Ahly en finale (Demain à Radès — 20h00) Mohamed Amine Ben Hmida : "Pour l'emporter, nous devons être concentrés et sobres !"    Vient de paraître — Des sardines de Mahdia à la passion: des mathématiques La vie fascinante de Béchir Mahjoub    COINNOV : Ouverture de la deuxième session de candidature pour le Fonds dédié aux PME industrielles    Le CA affronte le CSKorba à Korba: Siffler la fin de la récréation    Exposition «punctum» de Faycel Mejri à la Galerie d'art Alexandre-Roubtzoff: L'art de capturer l'éphémère    Ce samedi, l'accès aux sites, monuments et musées sera gratuit    Raoua Tlili brille aux championnats du monde paralympiques    Pourquoi: Diversifier les activités…    Pris sur le vif: La valse des étiquettes    Le Mondial féminin 2027 attribué au Brésil    Industrie du cinéma : une affaire de tous les professionnels    Mokhtar Latiri: L'ingénieur et le photographe    16 banques locales accordent à l'Etat un prêt syndiqué de 570 millions de dinars    Météo de ce vendredi    La croissance n'est pas au rendez-vous    Basket – Pro A : résultats complets de la J2 play-out (vidéo)    Palestine : la Tunisie s'oppose aux frontières de 1967 et à la solution à deux Etats    Bank ABC sponsor de la paire Padel Hommes    76e anniversaire de la Nakba : La Tunisie célèbre la résistance du peuple palestinien    En bref    Nakba 1948, Nakba 2024 : Amnesty International dénonce la répétition de l'histoire    Urgent : Une secousse sismique secoue le sud-ouest de la Tunisie    Le roi Charles III dévoile son premier portrait officiel    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Ce que doit le pouvoir individuel au désordre !
Publié dans Business News le 05 - 02 - 2022

Depuis les théories de Thomas Hobbes dans son Léviathan à nos jours le principe selon lequel le désordre engendre le pouvoir individuel reste très pertinent et se vérifie de jour en jour. Le désordre matérialisé dans la perte de confiance dans les institutions en raison de l'aléatoire qui les caractérise, engendre la peur, aiguise l'instinct de survie donc l'individualisme et poussent les populations à chercher un sauveur à même de les prendre en charge.
La peur du chaos produit naturellement chez les individus davantage de vigilance et de volonté de se soumettre que lorsque les repères institutionnels sont stables. Ainsi, tout pouvoir autocratique se construit sur le chaos étant donné que sa raison d'être réside dans la volonté de mettre de l'ordre à tout prix. Chez les peuples adulescents comparables au peuple tunisien, entendons-nous par-là encore incapable de se prendre en charge et d'assumer ses responsabilités individuelles et collectives, il y a une forte propension à confier son présent et son avenir à un individu pourvu que ce dernier lui fasse la promesse de mettre de l'ordre dans le chaos ambiant.

Le confort de la servitude volontaire
Pour atteindre un tel confort, les adulescents cherchent un sauveur à même de les sécuriser en agissant sur les deux leviers que sont l'empathie et la crainte. Mais aucun sauveur ne peut atteindre l'objectif d'accaparement de pouvoir sans avoir au préalable contribué à la mise en place du désordre. En effet, pour qu'il y est un sauveur, il faut qu'il ait un inéluctable danger. Pour créer ou accentuer le danger il faudrait d'abord s'employer à tout disqualifier. Il faut disqualifier, les institutions, la société civile et les corps intermédiaires. Pire encore il faut en faire la source même de tous les dangers et ainsi concourir à leur élimination. Le corps à corps adulescents/sauveur peut alors s'imposer comme l'unique alternative au chaos.
Le pouvoir confié entre les mains du sauveur, les adulescents peuvent alors se laisser berner par le confort de la servitude volontaire croyant que c'est sa volonté qui est mise en œuvre. Pour l'entretenir dans cette illusion, le sauveur ne manquera pas d'entreprendre des actions (2e,3e,4e,… dose de shoot) visant à éliminer quelques éléments du désordre à chaque fois qu'il entrevoit le doute s'immiscer chez les adulescents. La peur et l'aléatoire deviennent des outils indispensables entre les mains du sauveur. Ce dernier a tout intérêt à alimenter cette peur à coups de menaces intérieures et extérieures, et faire croire que le retour des institutions équivaut le retour du désordre. Il doit constamment rassurer ses adulescents qu'il veille au grain, qu'il fait le travail pour eux et à leur place, qu'ils peuvent dormir tranquille tant qu'il est là pour assumer la responsabilité qui leur fait défaut.
Le confort réside dans l'absence de responsabilité, semblable au confort de l'enfant qui sait qu'il a un père qui « veille » sur lui et ne peut envisager l'idée que les infanticides existent, que l'inceste existe, que les pères indignes pullulent et quand il faut choisir entre les intérêts des adulescents et ceux de leur sauveur ce dernier n'aura aucune hésitation pour faire son choix !

La fable de l'agneau et du berger
Le confort des « moutons de Panurge » on le doit à la présence d'un « berger » à la foi docile, il veille sur le troupeau, et menaçant, il brandit son bâton. Mais c'est un confort précaire parce qu'il est tributaire du berger. Etant humain peut-être trop humain, le berger peut dérailler. Dans sa solitude, il peut envisager le pire pour lui et pour ses moutons. Le précipice n'est jamais loin. Seul maître de leur destin, employant quelques chiens de garde pour contrôler la situation contre toute velléité d'une brebis galeuse, le berger risque de perdre pied en prenant l'ordre apparent pour argent comptant. A l'image de Napoléon dans le roman de George Orwell, La ferme des animaux, où la rébellion était conduite par Benjamin, l'âne de la ferme le dernier à qui on peut prêter la moindre hostilité, celle du berger peut elle aussi provenir des brebis qui ingurgitent et ruminent les élucubrations et les paroles indigestes de leur berger.
L'apothéose de l'euphorie du pourvoir de Napoléon, le cochon, sur les autres animaux a été atteinte quand il a fini par changer son nom, pour s'appeler Mr Jones. Il renie ainsi son animalité en s'attribuant une nouvelle identité après avoir pris beaucoup de poids et mis un costume de petit bourgeois. Si le berger suit le même processus, il risque de se transformer à son tour et faire le chemin inverse, en se mettant lui-même dans la peau d'un agneau perdant ainsi toute humanité et toute autorité sur son troupeau puisqu'il s'était employé à éliminer la distance qui les séparait. La boucle ainsi bouclée, berger et agneaux, agneaux et berger n'ont font plus qu'un, unis dans leur fonction primaire ou « l'état de nature » selon la terminologie de Hobbes. Finis les rêves de grandeur, finie la volonté de se surpasser, finie l'ambition de viser les étoiles. Troupeau et berger peuvent aller paître, copuler et dormir en toute quiétude.

L'inconfort de la souveraineté individuelle
Comme la vie n'est pas forcément un long fleuve tranquille et que l'humanité a grandi à coût de défis, de prise de risques, de spéculations sur l'avenir, on ne peut nous contenter de la vie du troupeau. Contrairement aux sociétés adulescentes, les sociétés adultes doutent, tergiverses, se remettent en question, transgressent, élargissent le domaine du possible, se transcendent et tutoient les dieux au point de se déshumaniser. Humanité augmentée, trans-genrisée, humanoïdée et demain peut-être translucide et télé-portable. Le champ est sans limite à qui ne manque pas d'imagination et de volonté. C'est là où l'éthique intervient pour éviter à l'humain sa perdition sur le chemin inverse du troupeau. L'éthique (Montesquieu dirait la vertu) est indispensable à l'Homme qui chérit sa souveraineté d'Homme et qui en se surpassant reconnait ce qui fait sens à sa vie et le réconcilie avec ses semblables.
Les conquêtes en sciences humaines et physiques se sont faites à coup de « folies ». De Copernic à Elon Musk, de Zarathoustra à Mandela en passant par Erasme, Montaigne, Avicenne et Averroès, l'humanité a conquis une part d'elle-même et de son environnement en se dressant contre l'ordre établi et en remplaçant la génuflexion par le grand bond en avant.

Être souverain c'est aussi transcender sa condition d'Homme pour mieux la vivre. Être souverain, c'est être à la fois libre et responsable. C'est n'avoir besoin ni d'un père protecteur, ni d'un père fouettard. Si « père » il y a, son rôle c'est d'apprendre à ses semblables comment être adulte, autonome et responsable. C'est de leur apprendre à le défier et à le ramener à sa condition d'Homme. La véritable marque de respect qu'un « père » puisse exprimer à ses « enfants » réside dans le souci constant de réveiller leurs consciences au lieu de les endormir.
Il faut donc du chaos non pas pour créer la soumission mais pour favoriser l'inventivité. Là où règne l'ordre, sévit la mort si ce n'est celle du corps, celle de l'esprit ne fait aucun doute.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.