Le chef de la Représentation de la Banque européenne d'investissement (BEI) en Tunisie et en Algérie, Jean-Luc Revéreault, a expliqué que cette institution était présente dans l'ensemble des pays du monde à l'exception des pays dits riches et appartenant à l'Organisation de coopération et de développement économique. A l'occasion d'une rencontre médiatique tenue le 17 février 2022, Jean-Luc Revéreault a précisé que la BEI avait pour objectif l'amélioration des conditions de vie des citoyens européens ou non-européen, en Union européenne ou à l'extérieur de celle-ci. « L'ensemble de nos projets ont un impact sur les citoyens de chaque pays que ce soit au niveau de l'infrastructure ou au niveau de la création de valeur… En 2021, la BEI a été chargée par l'Union européenne d'entamer un plan de relance assez important… La BEI a battu un record historique en accordant des prêts atteignant un total de 65 milliards d'euros… La Tunisie a bénéficié d'un financement à hauteur de sept milliards de dinars depuis 2011… Ceci avait fait de nous le premier bailleur de fonds et partenaire financier de la Tunisie », a-t-il dit. Jean-Luc Revéreault a expliqué qu'un tiers de cette somme avait été consacré aux PME, TPE et au secteur industriel et deux tiers à l'Etat et aux entreprises publiques. La Tunisie se place en première position mondiale (hors de l'Union européenne) en matière de volume des prêts accordés par la BEI par rapport à la population ou du PIB du pays. La Tunisie aurait pu profiter de plus de projets et d'une nette amélioration des conditions de vie des citoyens. Principale cause s'opposant à ceci : un taux de décaissement assez bas. Jean-Luc Revéreault a révélé que le chef de l'Etat avait demandé au président de la BEI, Werner Hoyer, à l'occasion de sa visite à Bruxelles durant le mois de juin de 2021, si cette institution pouvait financer le projet du TGV « Le président de la République tunisienne lui avait parlé de ce projet… Nous avions décliné l'offre… Je pense qu'il y aura dans le futur moins de routes et plus d'infrastructures ferroviaires… La Tunisie devrait se focaliser sur le réseau déjà existant et son amélioration… Il est assez dense et nécessite un plan de réhabilitation important... Nous avons travaillé sur ce sujet avec la SNCFT et nous avons pu identifier des points critiques nécessitant un renforcement afin de faire rouler le train à une vitesse normale au lieu de se limiter à quarante km/h… L'étape d'après serait un train à grande vitesse, mais qui ne soit pas limité à Tunis-Sfax… Nous devons exploiter l'idée d'un TGV transmaghrébin », a-t-il déclaré. Le chef de la représentation de la BEI en Tunisie et en Algérie a expliqué que plusieurs prêts avaient été validés et signés. « Sur un montant avoisinant les trois milliards d'euros, un milliard d'euros n'a pas été décaissé… A mon arrivée, je me suis posé la question sur les raisons derrière ce phénomène… Le rapport du diagnostic réalisé en 2020 a identifié deux ou trois causes qu'on pourrait résumer en l'incapacité du promoteur à mettre en œuvre les standards du bailleur. Il s'agit de standards relatifs aux règles des marchés publics, aux appels d'offres, aux règles environnementales, aux règles sociales (les expropriations) et aux règles portant sur l'hygiène et la sécurité environnementale. Nos équipes et consultants effectuant une visite sur le chantier rédigent un rapport en cas de constatation de manquement à ces standards. Ceci cause le blocage du décaissement », a-t-il poursuivi. Jean-Luc Revéreault a évoqué l'obligation de consulter les habitants et de dédommager les commerçants affectés lors de la réalisation de projets de développement. Il a souligné l'importance de la mise en place d'un mécanisme de recours tunisien en plus de celui déployé par la BEI. Il a insisté sur la tenue de sessions de formation, la gestion de plaintes et l'indemnisation correcte des personnes ayant subi un préjudice. Ceci inclut l'indemnisation pour préjudice indirect conformément au standard de la BEI. Il a précisé que l'indemnisation s'appliquait, également, aux familles ne possédant pas de titres financiers. « Nous avons, aussi, mobilisé des équipes de sociologues pour collaborer avec les promoteurs et entrer en contact avec les familles. Interrogé sur les projets enregistrant le plus de retard dans la réalisation, Jean-Luc Revéreault a mentionné ceux relatifs à la mise en place du réseau ferroviaire rapide, au Groupe chimique tunisien et à la mise à niveau de stations d'épuration et du réseau de l'Office national d'assainissement. « D'un autre côté, le projet le plus rapide était celui en collaboration avec le ministère de l'Education. Nous avions déployé une équipe de consultants et d'assistance technique pour suivre l'avancement au niveau de 400 chantiers… Il s'agit d'un projet de mise à niveau des établissements scolaires dans le secondaire… C'est un excellent exemple de réussite. Le projet montre ce que l'administration tunisienne serait capable de réaliser… Nous souhaitons répliquer le projet pour les écoles primaires. Malheureusement, le ministère des Finances n'était pas d'accord. J'espère que nous signerons un accord au cours de l'année 2022 », a-t-il déclaré. Notons que la BEI avait lancé en 2017 un programme de modernisation des établissements scolaires à hauteur de 70 millions d'euros permettant la réhabilitation de 383 et la construction de 59 établissements scolaires. Jean-Luc Revéreault est, également, revenu sur le programme de réhabilitation et l'intégration des quartiers populaires bénéficiant d'un budget égal à 294 millions d'euro, facilitant aux citoyens l'accès aux services et stimulant l'écosystème local tels qu'un atelier de couture. Ce projet concerne 310 quartiers. Le chef de la représentation de la BEI en Tunisie et en Algérie a indiqué qu'un autre projet portant sur le traitement des eaux usées et des déchets industriels et ménagers avait été entamé en 2005. Un autre projet baptisé Depolmed s'est vu octroyé une enveloppe de 69,6 millions d'euros permettant de réhabiliter et d'étendre quatre stations d'épuration dans le but de préserver la qualité des eaux du littoral et la réduction de la pollution de la mer Méditerranée. Les énergies renouvelables font, également, partie des programmes de la BEI en Tunisie. Elle avait choisi de se présenter depuis l'année dernière comme étant la banque du climat. « Ce projet porte sur la modernisation et le renforcement du réseau de la Steg afin de préparer l'injection vers le renouvelable… Nous espérons multiplier les projets avec la Steg afin de rattraper le retard dans ce secteur… La Tunisie a la possibilité de devenir un acteur majeur dans ce secteur. Elle est connectée directement à l'Italie à travers un gazoduc qui pourrait permettre de transférer l'énergie verte grâce à l'hydrogène…. Compte tenu de la situation financière de la Steg et de la Tunisie, le secteur privé pourrait s'occuper de la production et charger la Steg de la distribution… Nous sommes prêts à aider la Steg à se verdir », a-t-il expliqué. Jean-Luc Revéreault a indiqué que les pays actionnaires de la BEI étaient exclusivement ceux appartenant à l'Union européenne. Il a souligné le rapprochement entre la BEI et l'Union européenne. Il a expliqué que les ratings publiés par les agences de notation n'avaient pas d'impact sur la collaboration entre la BEI et la Tunisie. Il a insisté sur l'indépendance de l'institution qu'il représentait dans l'évaluation des projets à financer. Il a insinué que la dégradation des relations diplomatiques avec l'Union européenne pouvait porter préjudice à la collaboration entre la Tunisie et la BEI. Le chef de la représentation de la BEI en Tunisie et en Algérie a rappelé le lancement de l'Instrument européen de voisinage (EIV). Il s'agit d'une branche regroupant les activités de la BEI à l'extérieur de l'Union européenne. Celle-ci est axée sur les énergies renouvelables, l'accès à l'eau, l'éducation et la santé afin de garantir une croissance inclusive durable. « Nous comptons renforcer notre présence sur le terrain… J'espère qu'on pourra créer un hub régional pour l'Afrique du Nord en Tunisie », a-t-il dit.