Sfax, capitale du sud tunisien, vit ces derniers jours de vives tensions qui ont atteint un point inquiétant à la suite de l'assassinat d'un citoyen, poignardé à mort par des Subsahariens. Altercations, heurts et interventions sécuritaires, la situation n'est pas de tout repos, alors que le pouvoir en place mène des négociations, non dévoilées à l'opinion public, à propos de la gestion des flux migratoires avec la partie européenne. Retour sur une situation qui risque de déborder. Dans la nuit du 2 au 3 juillet, les Tunisiens ont suivi avec beaucoup d'inquiétude les vidéos publiées en direct sur les réseaux sociaux parvenant du quartier du Rbat au gouvernorat de Sfax. Les vidéos illustraient une bagarre entre habitants du quartier et migrants subsahariens installés dans la région. La scène était assez violente. Maison incendiée, citoyens blessés, et une grande confusion. La situation s'est temporairement calmée après l'intervention des forces de l'ordre. Cependant, ce calme n'était que de courte durée. Les tensions ont repris de plus belle la nuit d'après. Mais cette fois-ci, le sang a coulé. La scène a été filmée par le député, Mahdi. Un homme, âgé de 41 ans, résidant dans la région, a été tué, lors de nouveaux affrontements entre des migrants et la population locale. Il était de passage lorsqu'il avait constaté la bagarre. Descendu de sa moto pour voir ce qui se passe, il a reçu un coup qui lui a été fatal. La scène était d'une extrême violence. Les auteurs du crime ont pris la fuite. Après l'enterrement du jeune homme, des protestations ont eu lieu. Les habitants révoltés, ont voulu expulser les Subsahariens installés dans le quartier. Certains ont bloqué la route et incendié des pneus. Les forces de l'ordre sont intervenues pour maintenir l'ordre et éviter les éventuels débordements. Du côté des parties officielles, les informations se font rares et brèves, loin de l'attente des citoyens inquiétés par les derniers développements. Les premières informations sont parvenues du côté du porte-parole et procureur de la République près le Tribunal de première instance de Sfax, Faouzi Masmoudi, à propos de la première nuit de heurts. Il a déclaré, dans ce contexte, que 34 Subsahariens avaient été placés en garde à vue pour entrée sur le territoire tunisien sans documents légaux et pour séjour irrégulier, suite aux enquêtes menées après les altercations de dimanche soir.
Revenant sur le meurtre du citoyen, le responsable judiciaire a indiqué aux médias qu'une enquête pour meurtre avec préméditation a été ouverte par le parquet, en vertu des articles 201 et 202 du Code pénal. Elle a été confiée par le juge d'instruction à la police judiciaire de Sfax Nord. Le procureur a, en outre, spécifié qu'outre les trois personnes placées en garde à vue, dans cette affaire, l'enquête englobera une quatrième personne soupçonnée d'être impliquée et qui est actuellement en fuite. Cela dit, aucune information n'a été communiquée par le ministère de l'Intérieur. Seulement dans l'après midi d'hier, on apprend par voie de communiqué laconique, que sur instruction du ministre de l'Intérieur, que le directeur général de la Sécurité nationale et le directeur général de la Garde nationale, accompagnés d'un groupe de hauts responsables sécuritaires se sont rendus, dans la matinée au gouvernorat de Sfax afin d'examiner la situation sécuritaire sur le terrain, suivre de près les développements récents dans la région et superviser le fonctionnement des différents services du ministère de l'Intérieur. Cette visite vise à prendre les mesures et les dispositions nécessaires, selon le ministère. Toutefois aucune mesure n'a été prise, ou du moins annoncée. Le ministre de l'Intérieur ne s'est pas déplacé sur les lieux. Sa mission était de recevoir le président de la République au siège du ministère. Le président de la République a affirmé que la Tunisie est un pays qui n'accepte sur son territoire que ceux qui respectent ses lois. Elle ne tolère pas d'être utilisée comme une zone de transit ou un territoire d'implantation des personnes venant de plusieurs pays africains, et elle n'accepte pas non plus d'être gardienne de frontières autres que les siennes. Le même discours habituel prônant la théorie du complot et le conspirationnisme. Des mesures ? Des décisions ? Elles ne sont pas au rendez-vous. Elles ont toutefois laissé place à des interrogations : "Comment ces migrants peuvent-ils parcourir des milliers de kilomètres et se diriger vers une ville ou un quartier spécifique ? Connaissent-ils ces villes ou ces quartiers alors qu'ils se trouvaient dans leur propre pays ? Sont-ils des migrants ou des personnes déplacées par des groupes criminels qui exploitent leur misère et trafiquent leurs membres, ciblant ainsi la paix sociale en Tunisie ?", c'est tout ce que nous avons pu lire dans le communiqué de la présidence de la République. Les services de la présidence de la République nous font, par la suite savoir, que le chef de l'Etat s'est entretenu avec le chef du gouvernement libyen Abdulhamid Aldabaiba à propos du phénomène de la migration irrégulière et la nécessité d'efforts concertés pour trouver des solutions rapides à ce phénomène, ont été discutés au cours de cet entretien. Le président de la République a rappelé que la solution ne peut être que collective entre tous les pays concernés, qu'ils soient du sud ou du nord de la Méditerranée. Toutefois, d'après les propos du porte-parole du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), Romdhane Ben Amor, la discussion portait sur le refus libyen d'une pratique honteuse de la part des autorités tunisiennes. En effet, selon des témoignages concordants, des migrants illagéux ont été acheminés par bus aux frontières libyennes pour y être tout simplement abandonnées. C'est ainsi que les autorités tunisiennes espérent se débarrasser du problème. Force est de constater que cette situation intenable au gouvernorat de Sfax, est le fruit d'un cumul de plusieurs mois. L'installation des migrants subsahariens et les campagnes d'incitation contre eux ont conduit à une inévitable explosion sociale. Or cette situation est au cœur du phénomène de la migration clandestine vers la rive nord de la Méditerranée. Une question primordiale pour notre partenaire européen qui tente de conclure un accord avec la Tunisie pour réduire les flux migratoires. Cet accord présenté sous une forme de package de coopération attractive semble subir quelques obstacles au niveau des négociations. Et comme d'habitude le manque de transparence des autorités tunisiennes et le double discours adopté laissent prévaloir le flou, face à une Tunisie rongée par des difficultés économiques fragilisant sa paix sociale.