La pénurie de pain perdure et le régime de Kaïs Saïed ne trouve toujours pas de solution efficace. Officiellement, si l'on se tient aux propos du chef de l'Etat, la crise est causée par la spéculation de certains boulangers et minoteries. La présidence a publié, mercredi 16 août un peu après minuit, le bilan des saisies totalisant quelque 6325 tonnes de marchandises, entre farine blé, semoules etc. Sous-entendu, les autorités veillent au grain pour lutter contre les spéculateurs. Ce même mercredi 16 août au soir, on a procédé à l'arrestation de Mohamed Bouanen, président de la Chambre syndicale des patrons de boulangeries (Utica). Les partisans de Kaïs Saïed ont immédiatement rebondi sur les réseaux sociaux pour dire que ce propriétaire de 24 boulangeries serait derrière les pénuries observées. Ils tentent de confirmer la thèse présidentielle qu'il y a des cartels et des mafias qui font tout pour envenimer la situation socio-politique et affamer le peuple. La semaine dernière, le chef de l'Etat a limogé le PDG de l'Office des céréales. Sous-entendu, il serait la cause de la crise.
Pourtant, et comme le relève adroitement la centrale syndicale UGTT, via son organe médiatique Echaâb News, il y a, pas moins, de huit navires en rade au Port de Radès. Ces navires transportant blé et orge attendent d'être payés par les autorités tunisiennes pour décharger leurs cargaisons. Ce que l'on sait, par ailleurs, c'est que l'Etat a de gros soucis de déficit budgétaire et ceci est clairement écrit noir sur blanc dans la Loi de finances 2023. Le gouvernement a tablé sur un crédit du FMI pour obtenir les devises nécessaires afin de faire face à ses achats, entre-autres le blé et l'orge. Le prêt du FMI n'a pas été accordé, à cause de l'entêtement du chef de l'Etat, le ministère des Finances n'a donc pas de quoi payer les cargaisons de blé et d'orge. Les choses sont simples à expliquer, mais vu qu'elles sont très couteuses politiquement, le chef de l'Etat s'interdit de les dire et préfère parler de spéculation, présenter comme des butins de guerre les saisies ridicules effectuées (les tonnes dont parle la présidence correspondent à une production de quelques heures pour une boulangerie) et présenter comme des malfrats les professionnels du secteur. Peu importe la vérité sur terrain, les partisans de Kaïs Saïed préfèrent prendre pour de l'argent comptant ce que dit le président de la République et injurient à longueur de journées toute voix discordante qui leur parle des bateaux en rade et des caisses vides de l'Etat. La théorie du complot est, comme toujours, plus facile à gober.