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Tunisie - Manifestations du 9 avril : Le régime policier marque un retour fracassant!
Publié dans Business News le 09 - 04 - 2012

Une chose est sûre, la manifestation d'aujourd'hui restera dans les annales. Une véritable dégénérescence qui laissera aux milliers de manifestants sur place, un amer goût de déjà-vu.
Reportage
«Rien n'a vraiment changé, on se croirait de nouveau le 14 janvier. Ils nous insultent et nous tabassent avec une telle rage», déclare un des manifestants à l'avenue Habib Bourguiba, aujourd'hui 9 avril 2012. Plusieurs milliers de personnes sont sorties manifester en cette fête des Martyrs, sur la grande artère de Tunis, l'avenue Habib Bourguiba, interdite aux rassemblements. Une manifestation, ou plutôt un ensemble de rassemblements et de marches, organisés ou parfois même spontanés, commémorant la journée des martyrs et protestant contre l'interdiction de tout rassemblement dans l'avenue, décrétée le 28 mars 2012. Enroulés dans des drapeaux tunisiens et entonnant en chœur l'hymne national, les manifestants scandaient : «Ni peur, ni terreur, le pouvoir est au peuple!» ou encore «toujours fidèles au sang des martyrs». Un défi qui a rapidement dégénéré en heurts violents entre manifestants et police, mais aussi entre manifestants et contre-manifestants venus mettre leur grain de sel dans une marche assez controversée.
9h30. L'avenue Habib Bourguiba se réveille. Les Tunisois vaquent à leurs occupations, les cafés se remplissent, les boutiques ouvrent leur porte. Des voitures de police. Une, deux, dix… des bus remplis des brigades anti-émeute.
La tension est palpable. Devant le Théâtre municipal, un des rassemblements gonfle, pendant qu'un autre est parti de la place des Droits de l'Homme. Les slogans sont scandés, l'hymne national entonné. Les manifestants avancent, ils sont de plus en plus nombreux. Ils avancent vers le ministère de l'Intérieur. Les policiers sourient. Ils savent ce qui va se passer. Nous ne le savons pas encore. L'ambiance est festive malgré l'atmosphère tendue, le drapeau tunisien est à l'honneur. Le barrage formé par les voitures de police, sur l'avenue Habib Bourguiba, avant le ministère de l'Intérieur, est rapidement ouvert par les policiers, toujours calmes.
Pourtant, la tension est palpable. Il va se passer quelque chose, mais quand ? Les manifestants avancent devant le ministère de l'Intérieur grâce au passage ouvert par la police. L'hymne national, une fois. Deux ou trois slogans. Des deux côtés, les policiers encerclent les manifestants, et sans que personne n'ait pu le prévoir, les premières bombes lacrymogènes sont lancées au milieu de la foule. Une rue, perpendiculaire à l'avenue, permet de s'échapper, les larmes aux yeux, la respiration saccadée, tous vers l'avenue Jean Jaurès et les rues avoisinantes. Le temps de reprendre son souffle et d'y voir plus clair qu'une autre pluie de grenades lacrymogènes tombe sur la tête des manifestants.
La manifestation de l'avenue Habib Bourguiba n'a donc pas fait long feu. Certains parviennent à se réfugier dans les cafés encore ouverts de l'avenue. «Une amère impression de déjà vu», déclarent-ils, «une sorte de 14 janvier bis»…les coups de feu en moins.
Dans les rues avoisinant l'avenue Habib Bourguiba, devenues des portes d'accès aux manifestants désireux de rejoindre l'artère principale, des jets de pierre ont été échangés entre les manifestants et les forces de l'ordre ponctués par des jets répétés de gaz lacrymogènes.
Les manifestants ont également été attaqués par une contre-manif de jeunes «barbus» qui lançaient des pierres en direction des manifestants, dans une des ruelles avoisinantes à l'avenue Habib Bourguiba.
On assiste de même à des altercations et à de vifs échanges entre manifestants et commerçants, présents sur place, indignés de devoir fermer boutique, une journée de grande affluence.
Si certains commerçants regrettaient le «grabuge» qui les empêche de travailler dans l'avenue Habib Bourguiba, de nombreux manifestants sur place et des familles de martyrs de la révolution revendiquaient leur droit légitime de manifester sur l'avenue «une des raisons pour lesquelles nos fils seraient morts».
«Nous sommes venus dénoncer la répression du nouveau pouvoir et revendiquer la chute du gouvernement», nous confie un jeune manifestant sur place, fuyant des bombes de gaz lacrymogènes qui pullulent, un peu partout.
Des centaines de manifestants, refoulés de l'avenue Habib Bourguiba, sont ensuite allés directement prêter main forte au rassemblement de l'avenue Mohamed V, parti de la place des Droits de l'Homme. Cette marche, rassemblant de nombreux représentants de la société civile, de partis politiques et des journalistes, était, faut-il le rappeler, autorisée. Les policiers, avec des dizaines de camions et de bus, se préparent.
Les manifestants avancent vers eux, au premier rang desquels on aperçoit Hamma Hammami tenant la main de sa femme, Radhia Nasraoui. Des députés de la Constituante, Khemais Ksila, notamment, ou encore la présidente du mouvement Kolna Tounes, Emna Mnif, sont également présents. Les manifestants avancent, jusqu'au cordon de police déployé au niveau de la Banque Centrale de Tunisie. Ils arrivent devant les policiers, leur tiennent tête, face à face tendu, à quelques millimètres l'un de l'autre.
La scène dure plusieurs minutes. Quelques manifestants s'infiltrent sur les côtés pour dépasser le barrage, trouvant des rangées entières de véhicules des forces de l'ordre. À l'arrière, des policiers préparent leurs fusils utilisés pour lancer les grenades lacrymogènes. Là encore, l'attente. L'hymne national. Un frisson. Les manifestants s'engouffrent par dizaines dans les brèches laissées entre les policiers. Et les premiers tirs. Les premières rangées s'enfuient vers l'avenue Jean Jaurès et les autres reculent. Nous retrouvons Radhia Nasraoui, légèrement assommée, le citron préparé pour l'occasion pour amoindrir les effets du gaz. D'autres s'aspergent de boisson gazeuse, certains ne parviennent plus à marcher, étourdis. «On est habitué, ce n'est pas un peu de gaz qui va nous faire peur, on y retourne!», affirme Hamma Hammami, toujours aux côtés de sa femme.
Effectivement, les festivités sont loin d'être finies. De retour sur l'avenue Mohamed V. Les policiers se repositionnent. Cette fois, ils seront décidés à en découdre frontalement. Des dizaines de grenades lacrymogènes, mais le vent favorable aux manifestants rejette les relents de gaz vers les policiers. «Dieu est avec nous», lancera un jeune homme. Les policiers s'impatientent, ils chargent. Toute personne se trouvant sur leur chemin en fera les frais. Des femmes âgées, d'autres plus jeunes, des enfants, des hommes, les matraques ou les bâtons en bois cloutés ne différencieront personne. Jamila, une jeune manifestante, voyant une femme à quelques mètres se faire copieusement tabasser, lancera à un policier: « Arrêtez ! Pourquoi vous faites ça? Nous sommes tous Tunisiens, comment pouvez-vous frapper vos frères et vos sœurs? », interpellation à laquelle le policier ne répondra que par la violence, physique et verbale. Jusque dans le parking du bâtiment de l'ex-RCD, ils poursuivront les hommes et les femmes, matraque à la main et obscénités à la bouche. Une scène cocasse et pour le moins surprenante, cependant, celle de manifestants se protégeant aux côtés des militaires, derrière les grilles du siège de l'ex-RCD…
La foule se replie à présent au niveau de l'Eglise orthodoxe de l'avenue Mohamed V. Une scène emplie de symboles où les manifestants, drapeau tunisien à la main, sont devant l'église, récemment attaquée par des extrémistes, encerclés encore une fois par les policiers. « Dégage ! Dégage ! », scandent-ils à l'encontre de ces derniers. Le petit rassemblement d'une centaine de personnes est de nouveau dispersé violemment par les forces de l'ordre.
Autre fait notable, les forces de l'ordre, présentes sur place font preuve d'une schizophrénie pour le moins déroutante. Des ordres sont donnés pour réprimer jusqu'à ce qu'il ne reste plus personne alors que d'autres appellent à ne pas user de la violence et à se défaire de leurs matraques. Alors que certains se montrent violents et insultants, d'autres par contre, essaient de disperser la foule avec bienveillance et patience et n'hésitent pas à essayer de raisonner leurs collègues et même à présenter des excuses aux manifestants insultés.
Des femmes pleurent, des hommes sont à terre, incapables de se relever, tout le monde est en état de choc, un mélange d'étourdissement, de gaz, de douleur physique et de fatigue morale, en plus d'une incompréhension révoltante d'une violence disproportionnée.
Emna Mnif, bandeau sur le visage et lunettes de natation sur les yeux, est affligée. «Ali Laârayedh et le gouvernement sont responsables ! Ils ont oublié que par l'avenue Habib Bourguiba, le peuple les a libérés de leur exil doré ! Ils ont oublié que sans ce peuple, ils seraient encore en train de croupir en prison, ou victimes de la répression policière, ils l'ont oublié et ils reproduisent à leur tour ces mêmes pratiques. Le peuple les a mis où ils sont, mais il n'est pas prêt à leur délaisser la liberté qu'il a chèrement acquise, par le sang des martyrs!», déclare-t-elle, en substance, à Business News. «Ce n'est pas fini, nous irons tous devant l'Assemblée constituante, pour observer un sit-in jusqu'à ce que ce gouvernement réponde de ses actes», conclut-elle.
Au niveau de la place de la République (le Passage), les affrontements se poursuivent. Plusieurs personnes, barbues, se portent en renfort aux côtés des policiers. Toute manifestation de protestation est réprimée par ces personnes que beaucoup décriront comme des milices islamistes. Des journalistes, tunisiens et étrangers n'ont pas été épargnés non plus. Progressivement, le centre-ville reprend son rythme normal. Seuls une atmosphère poussiéreuse et les impacts des centaines de grenades lacrymogènes sur le sol, témoignent des affrontements qui ont eu lieu.
Reportage réalisé
par Synda Tajine et Monia Ben Hamadi
Copyright vidéo : Mosaique FM


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