Campagne sécuritaire à Monastir: Arrestation de 70 individus recherchés    Sbeïtla: Des familles déplacées à causes des crues du 1er juin (Déclaration)    Journées du film Cubain à la Cinémathèque Tunisienne du 5 au 8 juin 2024 (Programme)    Le chercheur en économie et spécialiste des affaires chinoises, Rong Huan, à La Presse : « Une collaboration sino-tunisienne en marche »    Promo Hajj 2024 By Ooredoo : Des offres exceptionnelles pour rester connecté avec la famille et les amis    Tunisie : Réserves en devises de la BCT au 31 Mai 2024    Egypte: Al-Sissi charge Moustafa Madbouli de former un nouveau gouvernement    L'Espérance de Tunis remporte le derby de Tunis face au Club Africain dans le chaos    Ons Jabeur se qualifie pour les quarts de finale de Roland-Garros et affronte Coco Gauff mardi    Nabil Ammar participe à la réunion ministérielle préparatoire du sommet Corée-Afrique    La Chine, un partenaire qui comprend mieux les pays en développement    Hausse des températures ce week-end: Plus de 40°C à l'ombre!    Politique : L'Alliance pour la patrie organise une rencontre nationale    Investissement dans l'agriculture et la pêche: Où est passé le secteur privé?    Top 10 des producteurs et exportateurs de Mangues dans le Monde, Afrique et Pays Arabes    Tej, la nouvelle plateforme dédiée à l'édition des certificats de retenues à la source    Houssemeddine Touiti : les produits de base sont disponibles et les quantités seront augmentées en prévision de l'été    Afif Ben Yedder: Un pionnier de l'édition panafricaine    11 décès et 314 blessés dans différents accidents en 24h    Le personnel des pharmacies privées porte aujourd'hui le brassard rouge    "Le Département et les ministres des Affaires étrangères, 1956-2010" : Le nouveau livre de Béchir Guellouz    Daily brief national du 03 mai 2024: Ahmed Hachani à Séoul : La Tunisie au Sommet Corée-Afrique    Play-out – Le match OB-USBG désigné un jour à part : Et l'équité dans tout cela ?    Le CSS piégé en fin de match à Monastir : Une nouvelle désillusion...    Expatriés : Bouzamoucha file en Suisse    Artes annonce un bénéfice en hausse de près de 19% à fin 2023    Bady Chouchène expose à l'espace Aïn : Une symphonie visuelle    "Back to black" de Sam Taylor-Johnson, actuellement sur nos écrans : Le refrain tragique d'Amy Winehouse    Salwa Abassi : la décision du ministère interdit le port du keffieh et de tout autre habit facilitant la triche    Les Maldives interdisent aux Israéliens d'entrer sur leur territoire    Météo : Ciel passagèrement nuageux sur les différentes régions du pays    Les enfants tunisiens débutent le tabagisme dès l'âge de 7 ans    Ahmed Hachani à Séoul : La Tunisie au Sommet Corée-Afrique    Solidarité avec Gaza – Les Maldives interdisent l'entrée des Israéliens    Ons Jabeur chante et enflamme le public de Roland-Garros    Décès de Mohamed Amine Ziadi    Match CA vs EST : lien streaming du derby de Tunis du 02 juin 2024    Attention danger en mer Rouge : Pour punir l'Occident le Soudan autorise une base navale russe    Dr Ali Bousrih: Un illustre vétérinaire    «Je me suis bâti sur une colonne absente» de Meriam Bouderbela, Asma Ben Aissa, Ali Tnani et Haythem Zakaria à la galerie le Violon bleu: Filer les temps    Solidarité mondiale : les capitales se lèvent pour dénoncer les crimes sionistes    Découvrez les trésors cachés des Peintres Italiens en Tunisie à la TGM Gallery    Cessez-le-feu à Gaza : Le Hamas réagit positivement à la proposition de Biden    Olfa Abdelkefi Chakroun: L'architecture et l'empathie    Vague de chaleur mortelle en Inde    Urgent : Secousse tellurique à Bizerte    Tunisie: Ce dimanche, accès gratuit aux musées    Pour des raisons de santé, Wael Dahdouh met fin à sa visite en Tunisie    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Reportage à Siliana : Le sang qui coule aura son prix
Publié dans Business News le 29 - 11 - 2012

Il a fallu rebrousser chemin à trois reprises avant d'arriver à la ville de Siliana. La route de Bouârada était barricadée et ravagée par le feu, une autre route est coupée, pont inachevé ou brisé oblige et une troisième se faufilant à travers la montagne de Bargou et dont les bords menacent, par moments, de s'effondrer en petits rochers sur les véhicules.
Les routes n'étaient pas coupées pour braquer des véhicules comme le prétendent certaines personnes, ni pour agresser. L'ambiance y était violente, enflammée, certes, mais la population montait la garde, essentiellement, pour bloquer le passage aux renforts des forces de l'ordre parvenant à Siliana qui était déjà assez ravagée et ensanglantée.
En effet et en arrivant à l'hôpital, on découvre un spectacle chaotique : La foule qui crie son désarroi, les pompiers qui accourent transportant des blessés, les couloirs regorgeant de gens et un mouvement rapide et incessant… Les urgences de l'hôpital régional de Siliana grouillent de blessés, jeunes et moins jeunes, criblés de balles, touchés aux yeux, au torse et aux jambes… Le nombre de blessés augmentant, des ambulances d'autres régions viennent en renfort. « La veille, le bloc opératoire a été envahi par la police », témoignent des citoyens en nous interpelant dans la foulée.
Cela fait déjà trois jours que la ville est sans pain, que les citoyens vivent entre la peur et la colère « J'ai évacué ma famille de la maison. Hier, la police a fait des descentes dans les foyers toute la nuit »… Pendant ce temps là, les ambulances continuaient à affluer transportant des blessés, tandis que les tirs en l'air se faisaient entendre et que l'odeur du gaz lacrymogène et de la fumée sont des plus étouffants.
Entre « Je sacrifierai âme et sang pour toi Siliana » et « Ennahdha dégage », les gens sont perplexes et surpris de la réaction musclée des forces de l'ordre.
Plus de 200 blessés dont une vingtaine de cas critiques et beaucoup de personnes ayant perdu un œil, ou les deux…
Un tour dans la ville ne donne pas, toutefois, une idée précise sur le degré de la montée de violence policière, les édifices et les constructions ne semblent pas avoir été assaillis, tout était fermé, quelques rues étaient barricadées mais les bâtiments ne comportaient aucune trace d'incendie ou d'attaque.
La population de la ville, vide, est partagée entre l'hôpital et la place devant le gouvernorat où les manifestants continuaient à faire face à la police.
Hormis un gouverneur qui ne leur a rien offert, la population revit, semble-t-il, les mêmes pratiques, à savoir clientélisme, favoritisme, nomination parachutée, chômage et, aujourd'hui, des rafales de balles.
« Ils nous ont attaqués, même dans la mosquée », nous lance un jeune, d'autres criaient que si au départ, ils exigeaient principalement le limogeage du gouverneur, aujourd'hui, ils jurent la rupture définitive avec le gouvernement.
Les salafistes de la ville participent, par ailleurs, aux protestations et aux regroupements. Ils ne semblent pas soutenir le gouvernement et ne réagissent pas quand les gens attaquaient le parti Ennahdha. A l'exception d'une personne qui, contrairement à tous, criait à tue-tête dans le couloir de l'hôpital « Continuez à parler, personne ne peut nuire au gouvernement ou à Ennahdha ». Mais on l'ignorait, trop pris dans le malheur pour répondre à une personne qui s'active en solo à défendre un gouvernement, ayant déjà perdu toute légitimité, du moins sympathie dans cette ville.
Un jeune s'enveloppant dans le drapeau tunisien crie pourtant « je ne suis plus un Tunisien ! » La rupture avec la Tunisie, dans cette zone coupée et défavorisée, est de plus en plus évidente. La ville est, pourtant, à seulement 120 kilomètres de la capitale.
La population témoigne que les forces de la sécurité nationale locale ne participaient pas au carnage. En effet et en passant devant le poste, on pouvait voir les agents regroupés, debout et impuissants, devant la porte. Personne de la ville n'attaquait le bâtiment et la police nationale locale se contentait d'être là en tant que spectateur, ne pouvant évidemment pas intervenir pour protéger les habitants…
Tout se jouait presque autour du gouvernorat, même si la fumée dense et opaque, ne laissait apparaître que des ombres, fantômes de cette ville sinistrée, dans un mouvement incessant d'allées et venues, mais toujours accompagnées du bruit des balles tirées…
A travers les traits fatigués des gens et dans le flot de mouvements désordonnés, toute la ville était révoltée, même si en la parcourant, on pouvait étrangement passer dans des rues complètement vides et silencieuses à certains endroits. Les principaux incidents sont signalés aux alentours de l'hôpital, du local de l'UGTT et du gouvernorat.
« Tout cela à cause d'un différend entre deux personnes ? », dixit Hamadi Jebali… Quiconque aurait écouté les témoignages de la population de Siliana aurait su que ce n'était que la goutte ayant fait déborder le vase.
Le 17 décembre 2010, le suicide de Mohamed Bouazizi par immolation était présenté par le pouvoir à l'époque comme étant un simple fait divers. Mais c'était la goutte qui avait fait déborder le vase et exprimer le ras-le-bol général.
Les mêmes témoignages font part du fait que le gouverneur n'ait rien fait pour améliorer la situation des citoyens dans la ville : il refusait, selon eux, de rencontrer qui que ce soit. Il aurait lui-même fait dresser une haute muraille entre la population et lui-même.
Alors aujourd'hui, la population de Siliana ne demande plus seulement le limogeage du gouverneur, mais demande « la tête du ministre de l'Intérieur » exigeant qu'il soit destitué et arrêté afin de rendre compte de « ses crimes à Siliana ».
« Sommes-nous des animaux ? », « Expliquez-nous ! Dites-nous si oui ou non sommes-nous des humains ?! Sinon pourquoi utiliser des balles destinées à la chasse des animaux ? », s'interrogent-ils avec grande indignation !
En quittant Siliana et reprenant la route qui traverse les montagnes et les plaines d'une région riche en potentiel écologique et touristique, la sérénité qu'offre le spectacle dérangerait presque, coupant soudainement de l'ambiance incendiaire de la ville. Oui, Siliana, mouvementée ou calme, tiraillée par les balles ou se reposant derrière la montagne de Bargou dans un train de vie quotidien ennuyeux, est bel et bien coupée du reste de la Tunisie…


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.