Les pluies étaient attendues depuis quelques mois déjà. Tellement souhaitées que le ministère des Affaires religieuses avait appelé les Tunisiens à effectuer la prière dite d'Al Istisqâa'. C'est maintenant chose faite. La pluie a fait ses premières apparitions, il y une vingtaine de jours, mais le vrai grand retour a eu lieu en ce vendredi 23 septembre avec des précipitations torrentielles, notamment à Sousse puis à Tunis, la capitale, suivies d'inondations et de nombreux dégats. Un retour en « trombe » qui a engendré des inondations dans ces deux grandes villes et causé une paralysie totale de la circulation routière. Mais les experts assurent que ce blocage des activités n'est pas totalement dû à l'abondance des chutes des pluies, mais plutôt à une infrastructure de base défaillante, à des canalisations inadéquates puisque ne répondant plus au volume des activités, au trafic routier, notamment le transport en commun, et à l'évolution démographique et des zones urbaines.
Les mêmes experts précisent que, lors de la mise en place des infrastructures de base, plus spécialement les canalisations destinées à l'évacuation des eaux pluviales et celles usées, il n'y a pas eu d'études préalables, à la fois minutieuses et prospectives. Les résultats ne se sont pas faits attendre, et ce depuis plusieurs années dans la mesure où, chaque année, les Tunisiennes et Tunisiens vivent un véritable cauchemar avec les premières pluies. On accueille, certes, les premières précipitations avec joie et espoir, mais ils sont mêlées aux inquiétudes causées par ces inondations et ces paralysies qu'elles engendrent.
Mais ce qui est étonnant et inquiétant est que tout le monde sait parfaitement que ces premières, intervenant chaque année entre la mi-août et la mi-septembre, sont de grande ampleur. Pourtant, à chaque saison, les autorités concernées, à savoir les services municipaux et le département de l'Equipement et de l'Habitat, se laissent surprendre et se font dépasser par les événements. C'est ainsi que les récentes chutes de pluies, qui n'ont duré d'ailleurs que l'espace d'un petit quart d'heure, ont suffi pour tout bloquer en faisant déborder tous les regards des deux villes, aussi bien à Sousse qu'à Tunis, sans oublier les véritables rivières d'eau qui s'étaient formées, véritables hantises des piétons et, surtout, des automobilistes dont les véhicules risquent gros dans ces conditions.
En effet, les voitures se trouvent, souvent, prises au piège dans des situations où elles ne peuvent plus faire marche-arrière à cause du goulot d'étranglement tout en risquant gros au cas où elles continuent à avancer puisqu'elles peuvent être englouties par les eaux montantes. Et dans ce cas, adieu les plaques électroniques qui prennent un coup fatal. Le comble, cette fois-ci, est ce qui est arrivé au niveau de l'échangeur de l'Ariana, plus précisément du côté de l'hôpital Matri puisqu'il a été submergé par les eaux pluviales alors qu'en théorie tout devait être au point pour parer à ce genre d'éventualités.
Or, voilà ce que le ministère de l'Equipement a trouvé comme excuse pour justifier ses défaillances. Dans un communiqué rendu public, samedi 24 septembre 2016, il a indiqué que les travaux de l'échangeur Mahmoud El Matri ont été effectués selon les standards internationaux, mais que certains d'entre eux n'ont pas été achevés, dont notamment, ceux relatifs aux canalisations des eaux pluviales. Le département de l'Equipement ajoute que les grandes quantités de pluie enregistrées le 23 septembre dans la ville de l'Ariana n'ont pas pu être correctement évacuées à cause de l'entassement des ordures au niveau des grilles avaloirs, ce qui a compliqué encore plus la situation
C'est ainsi qu'il fallu d'une simple dépression orageuse, assez majeure certes, qui traverse notre pays, pour que l'on constate que ces pluies ont mis à nu l'infrastructure déplorable de gestion des eaux que nous avons sur l'ensemble du pays. Le directeur régional de l'Office national d'assainissement (ONAS) de Sousse, Noureddine Haj Ali est revenu sur les débordements des canalisations d'eaux usées et a reconnu qu'ils sont dus principalement à l'absence de réseau de collecte des eaux de pluies dont manquent, aujourd'hui, nombreuses villes tunisiennes. Le directeur régional de l'ONAS a ajouté que des mesures ont été prises pour endiguer cette catastrophe écologique survenue à Chott Meriem, notamment, le nettoyage de cette zone en question. D'après lui, l'absence de plan urbain d'aménagement et les constructions anarchiques sur le littoral ont entravée les différents projets de développement et de raccordement de la zone de Chott Meriem au réseau de collecte des eaux usées.
En tout état de cause, au moment où les agriculteurs et les propriétaires de terres agricoles se sont réjouis de ces précipitations de pluie qu'ils ces attendaient pour sauver leur saison et où des citoyens de certaines zones attendaient, également, ces précipitations pour se ressourcer en eau potable, voilà qu'elles ont causé des inondations dans plusieurs zones de la Tunisie comme c'est le cas, chaque année puisque le mauvais état de notre infrastructure et de nos canalisations est lamentablement mis à nu.
D'ailleurs, l'on se demande si ces chutes de pluies avaient duré plus qu'une demi-heure ! On préfère ne pas y penser car on devine l'ampleur du cauchemar qu'auront vécu les riverains des zones urbaines avec les bouchons d'automobiles, l'arrêt des moyens de transport en commun et les montés des eaux bloquant les piétons.