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Interview de Slim Khalbous : La recherche scientifique ne manque pas d'argent, elle manque de bonne gouvernance !
Publié dans Business News le 23 - 12 - 2016

Il enseigne depuis 1995 dans les universités tunisiennes, et en tant que professeur-invité dans plusieurs universités en France, au Maroc et au Liban. Ancien directeur général de l'IHEC, Slim Khalbous, est ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique depuis 100 jours.
Cette semaine, le ministre s'est livré,lors d'une interview à Business News. Il y expose une vision de la recherche et de l'enseignement, rigoureuse et moderne. Il a aussi été question des journées de dynamisation de la recherche scientifique qui ont eu lieu des 16, 17 et 18 décembre 2016 à Hammamet organisées par l'Agence nationale de promotion de la recherche scientifique (ANPR). Elles ont été l'occasion de mettre en exergue l'impératif de la mise en place d'une politique globale de renforcement des activités de recherche.
Trois jours pendant lesquels les responsables de la recherche en Tunisie se sont retrouvés pour fixer les priorités nationales en matière de recherche. Entretien.

En quoi l'édition de cette année, des journées de dynamisation de la recherche scientifique, est différente des années précédentes ?
Cette année, ces journées ont été très différentes de celles organisées dans le passé. On aurait pu dire que c'est la première édition d'une nouvelle formule. On a d'ailleurs retardé la date pour une meilleure organisation et on a élargi le nombre de participants ainsi que leur nature.
La première innovation de cette année a été donc le nombre important des participants des autres ministères et cela pour mieux définir les priorités de la recherche. Car le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique ne peut seul définir les priorités nationales en matière de recherche.
Pour cette édition, nous avons communiqué avec le ministère de la Santé pour la recherche médicale, avec celui de l'Agriculture, des TIC, de la Jeunesse et des Sports et tout ministère ayant un lien direct ou indirect avec le nôtre. Je dis direct, parce que c'est nous qui finançons les laboratoires des autres ministères et paradoxalement nous n'avons aucun droit de regard sur les centres de recherche des autres ministères.
Je donne l'exemple du ministère de l'Industrie qui, à travers l'API, effectue des recherches sur les brevets sans être en relation avec les écoles d'ingénieurs.
Donc le problème principal était la coordination entre toutes les entités quelle que soit leur affiliation ministérielle. On a donc invité, secrétaires d'Etat et directeurs généraux en charge de la recherche.
La nouveauté également cette année, c'est que la recherche touchera aussi le domaine de la Défense, et ce sous un aspect militaire et sociologique qui est tout aussi important, car après la révolution on a vu des comportementsqu'on n'arrivait pas à expliquer. Nous n'avons pas aujourd'hui assez de recherches dans ce domaine !
Aussi, pour la première fois, nous avons parlé des priorités nationales. Nous avons aujourd'hui beaucoup de ressources attribuées à la recherche, nous devons simplement mieux les coordonner vers un même objectif.
Et sur ce point précis, nous devons distinguer aujourd'hui deux choses : la liberté académique et le choix d'une nation. Chaque chercheur a la liberté de travailler sur le sujet qui lui semble bon et juste, en revanche, un pays met des ressources en faveur de la recherche, il faut qu'il dise aussi quelles sont ses priorités, où il veut aller, pour ensuite consacrer toutes ses ressources vers ces objectifs là. Par le passé, il n'y avait pas de priorisation en fonction des priorités nationales. Et puis le budget de certaines recherches est flou.
Aujourd'hui, c'est toute la philosophie qui régit la recherche scientifique qui est à remettre en cause. Et c'est précisément pour cela que nous avons préparé ces journées. Il fallait aussi donner de l'espoir à tous ces gens ! Personnellement, je suis chercheur depuis plus de 20 ans et je sais que là, le moral est à plat ! Le moral des chercheurs est à plat ! Ils ont lutté pendant des années et rien ne changeait. Dans mon mot d'ouverture, je leur ai dit que j'espère que cette fois ci, ce sera différent et que lorsqu'on se retrouvera dans un an, on dira : « Il y a eu des choses ! ».
L'autre nouveauté cette année, a été la méthode de travail : nous avons pour la première fois utilisé la méthode du « scoring » pour la prise des décisions et on a demandé à tous les chercheurs présents dans les ateliers de faire plusieurs choses : énumérer les défis, les critères qui caractérisent ces mêmes défis et pour chaque critère il y avait une note indexée par rapport à l'importance et pour finir une note pour pondérer l'importance. Une méthode scientifique donc, qui nous a aidés à mettre en évidence les priorités, une approche managériale.

Une méthode que vous avez mis en place ? Etant justement votre domaine de compétence académique ?

(Sourire) Non non, c'est le fruit d'un travail d'équipe de tout le cabinet. J'ai juste impulsé le mouvement…
Donc, une méthode scientifique, une participation plus large, voilà peut-être ce qui a fait que cette année, on en a parlé plus.
Maintenant, nous allons prendre les priorisations générées à partir de l'évènement et les coupler avec la stratégie du gouvernement. Nous allons aussi en discuter avec les autres ministères pour en faire une sorte de « feuille de route » utile : pour la création de laboratoires, pour la détermination des budgets et les bourses de recherches. Et ça c'est nouveau en Tunisie ! On aurait dû le faire depuis longtemps !

Est-ce que le budget alloué à la recherche scientifique a baissé ou augmenté ?

Je vais vous répondre en deux étapes : Quantitativement le budget a baissé de peu. Mais là n'est pas le problème ! Le vrai problème est celui la gouvernance.
Nous avons aujourd'hui des centaines de millions de dinars qui ont été attribués à la recherche durant les 5 ou 6 dernières années. Argent aujourd'hui, bloqué dans les comptes et qu'on n'arrive pas à dépenser et ceci est le grand problème des laboratoires. Ces ressources constituent pour nous une bouffée d'oxygène.
Pour pouvoir les dépenser, il faut penser à la gouvernance et aux textes de loi, qui devraient tendre à faciliter les dépenses publiques et notamment pour la recherche, qui ne devrait pas être traitée comme les autre entités publiques. C'est aberrant toute cette standardisation et règles de l'administration publique que nous avons. Ça nous freine ! Réformer la gouvernance publique est par ailleurs une des priorités du gouvernement.
Autre problème : Pour promouvoir la recherche, il y a beaucoup d'argent auquel on pourrait accéder via l'international. Nous ne sommes pas en train d'en profiter, car on n'a pas de stratégie claire. Où est ce qu'on veut aller ? J'ai noté également que lorsqu'on fait des partenariats, on ne sait pas gérer l'argent qui provient de l'étranger.
Et quand on n'a pas de stratégie claire, l'argent issu des partenariats repart d'où il est venu. Nos règles sont tellement compliquées qu'on fait fuir l'argent étranger.
Troisième axe important, le secteur privé. Aujourd'hui, le privé est complètement en dehors de la recherche et de l'innovation ! Il va falloir trouver le moyen de les encourager à venir investir.
Pour cela, nous avons pensé à plusieurs pistes : en premier, une taxe pour la recherche tout comme la taxe à la formation professionnelle, une taxe récupérable. Finalement, les entreprises qui viendront vers nous pour récupérer leur argent, verront que l'université représente pour eux des solutions extraordinaires.
Il y a aussi la piste de la baisse des impôts. Une baisse qu'on peut imaginer proportionnelle à leur engagement dans la recherche.


L'étude de l'IACE sur l'employabilité parue cet été fait état de jeunes diplômés non employables. Que compte faire le ministère par rapport au phénomène sachant que c'est un sujet sur lequel vous avez beaucoup travaillé au sein de l'IHEC notamment ?
Il faut qu'une nuance soit claire : Le ministère n'est pas en charge de trouver un travail pour chaque étudiant, en revanche le ministère est en charge de le former convenablement.
On doit faire en sorte de trouver un compromis entre les exigences pédagogiques et la demande du marché du travail. L'un ne va pas sans l'autre. La mission de l'université a toujours été de former des gens compétents.
Le processus de transfert des compétences ne se fait plus aujourd'hui, car l'université s'est renfermée sur elle-même ! On a avec le temps cadenassé l'université en enlevant les cours où il y avait discussion ainsi que toutes les associations (sont restées seulement celles qui composaient avec le pouvoir). Les rapports à l'international ont aussi été réduits.
Lorsqu'on parle avec les chefs d'entreprises, on se rend compte que le problème des jeunes diplômés n'est pas au niveau des connaissances techniques mais bien de ce qu'on appelle aujourd'hui communément les « soft skills ». Ils évoquent des difficultés liées à la présentation, aux langues, particulièrement l'anglais et le français, le travail en équipe, le leadership…. C'est seulement après tout cela qu'ils regardent les compétences techniques. En bref, ils nous disent qu'ils peuvent former les nouveaux arrivants à l'utilisation d'une machine ou d'un logiciel, que ce n'est pas un problème. Par contre, ils ne peuvent pas les former à parler couramment anglais ou à travailler en équipe.

L'autre axe sur lequel nous sommes en train de travailler porte sur les méthodes d'enseignement. Il y a aujourd'hui beaucoup d'enseignants, qui malheureusement, sont en retard de dix ou quinze ans par rapport à la méthode utilisée pour la transmission du savoir.
Les étudiants en 2016, utilisent énormément internet, l'information n'a donc plus de valeur. C'est la méthode qui a de la valeur. Il faut s'adapter par rapport à l'époque dans laquelle on vit.
Il faut aussi que les étudiants acquièrent la méthode pour auto-apprendre. Il faudrait faire plus de méthode et moins de contenu. S'ils apprennent cela, ils seront capables de s'adapter aux évolutions diverses dans leurs domaines de compétence, parce qu'ils auront acquis une méthode, et non pas une quantité de connaissances.
La dynamique aujourd'hui, est en dehors de l'université. Dans les années 70, les mouvements sociaux et culturels sortaient des universités. Il faudrait rouvrir l'université sur son environnement. Car quand les évolutions sortent de l'université elles sont plus étudiées.

Ne pensez-vous pas que l'enseignement supérieur privé a su explorer ces pistes pour réaliser le succès qu'on lui connait aujourd'hui ?

Une partie du succès du privé provient de « l'échec » du public. C'est une réalité. Ma position est la suivante : les réformes finies, une université publique avec un enseignement de qualité et gratuite est imbattable. La référence donc, doit être le public, néanmoins, une progression du privé est inéluctable. C'est la tendance mondiale, y compris chez nous.
La question qui se pose est : comment trouver une complémentarité entre les deux ?
Le privé doit aller dans les niches ou l'enseignement public n'est pas fort, il doit le compléter !
Moi je vois que la complémentarité entre les deux est possible si on en fait une politique nationale et en l'absence de cette politique, forcément chacun va prendre une direction dépendante de ses intérêts. Je ne vais pas pointer du doigt le privé, il a tout simplement profité d'un vide stratégique national. Je ne suis pas le ministre de l'Enseignement supérieur étatique uniquement mais de tout l'enseignement supérieur. Le sort de tous les étudiants tunisiens m'intéresse.
Il ne faut pas opposer les deux car ce qui compte réellement c'est la qualité. Et il y a des standards internationaux sur lesquels nous devons nous aligner. On va pousser le privé pour aller vers la qualité, comme on poussera le public. Si les universités privées atteignent un niveau de qualité internationale en respectant les standards, qu'il soit le bienvenu. L'enseignement ne peut être un commerce comme les autres, je n'ai aucun problème idéologique avec le privé mais l'avenir de nos enfants en dépend !

Un des problèmes de l'enseignement privé est posé par l'ordre des ingénieurs qui s'est plaint que des ingénieurs issus du privé, au bout de trois ans de formation, se retrouvent au même niveau que les ingénieurs issus du public sur le marché du travail. Comment faire ?

Ils ont raison ! Je les ai reçus d'ailleurs et on a convenu d'un travail de réforme des études d'ingénieurs. Il faut mettre au point une stratégie nationale et elle sera prête avant la fin de l'année. Quand on a vu un développement très « dur » et très rapide du secteur privé, on a un peu lâché et on n'a pas fait attention, et effectivement, on s'est retrouvé avec certaines aberrations. Donc, l'ordre des ingénieurs, à juste titre, nous a dit : là vous faites une formation à double vitesse. On ne peut pas, d'un côté, faire une sélection extrêmement dure avec des diplômés au compte-goutte et de l'autre côté dire : c'est pas grave je laisse. Ça fait des sous-diplômes et il n'en est pas question.
L'idée n'est pas d'arrêter le privé, l'idée est de dire : quel est le système national ? Il faut que ce soit un système où tout le monde est d'accord, un système pour le pays qui déterminera le type de formation qu'on veut pour nos ingénieurs. Et après, si le privé peut le faire, ce sera tant mieux.
Le problème aujourd'hui est que même le cahier des charges des universités privées n'est pas totalement respecté. J'ai appelé tous les syndicats, avec la présence du numéro 2 de l'UTICA M. Elloumi, à une réunion et j'ai été très clair : les bonnes universités, aucun problème, les universités qui ne respectent pas du tout les règles, ce n'est pas acceptable et on appliquera la loi. Et puis, les universités qui sont au milieu doivent faire leur mise à jour sinon ce sera un problème. On a convenu de se conformer petit à petit au cahier des charges et s'il faut même revoir le cahier des charges pour que les règles soient mieux applicables, on le fera.
Ce problème se pose pour les études d'ingénieurs mais il se pose aussi pour d'autre types d'études : les études médicales, même les études philosophiques. Ils sont peut-être moins représentés mais il existe quand même des problèmes. Il n'y a ni tabou, ni blocage idéologiques. Une fois ces deux éléments acquis, on peut trouver des solutions communes.

Quelle est la vision du ministère concernant la situation du chercheur tunisien particulièrement s'agissant de sa relative précarité ?

Il s'agit d'un problème très complexe qui dépasse largement l'aspect purement financier. C'est un problème de statut, c'est aussi un problème de conditions de travail et c'est un problème de perspective d'emploi.
Aujourd'hui, le statut d'enseignant-chercheur est fixé par une loi. Théoriquement, les deux tiers du salaire d'un enseignant-chercheur sont pour la recherche et l'encadrement. En pratique, les chiffres disent qu'il y a 12 mille chercheurs actifs sur les 19 mille chercheurs officiels. 7 mille donc qui ne sont inscrits dans aucune structure de recherche et qui se contentent d'enseigner.
Ensuite, il y a le statut de chercheur qui a été créé en 2013 et qui s'est avéré être totalement inopérant. Moi, directeur de l'IHEC pendant cinq ans je n'étais même pas au courant de son existence !
Nous allons prendre ce texte qui régit le statut. Une équipe de juristes est d'ores-et-déjà en train de travailler dessus pour l'améliorer ou pour proposer une toute nouvelle version. Mais il nous faut un texte pour le statut de chercheur. Car aujourd'hui, nous avons des milliers de jeunes chercheurs qui préparent leurs thèses, sans parler des docteurs chômeurs malheureusement, comme en biologie, plus des milliers de doctorants en cours. Entre temps, le nombre d'étudiants a chuté, donc le nombre de postes d'enseignants ouverts dans l'université publique a complètement baissé. Aujourd'hui, dans certaines disciplines, on ouvre 10 ou 15 postes seulement par an. Donc, si on ne fait pas une politique pour intégrer tous ces docteurs ailleurs, on va avoir plus de docteurs chômeurs. Ce qui est une honte pour notre pays.

Bien entendu, l'université continuera à recruter ce qu'elle pourra mais ce ne sera pas énorme. On va améliorer le statut de chercheur pour que les centres de recherche, qui eux ont encore des besoins, puissent recruter. Une des réformes importantes que doivent faire les universités privées justement, c'est d'augmenter leur taux d'encadrement, surtout auprès des docteurs. Il faudra que les universités privées recrutent une partie. L'autre partie, c'est les entreprises.
Comme dans les journées de recherche (évoquées plus haut), nous avons sensibilisé les entreprises au besoin de faire des cellules de développement et de recherche, et pas que les multinationales. Les entreprises tunisiennes, quand elles se tournent vers l'export, réalisent toute l'importance de l'innovation aujourd'hui. Donc, on va orienter sur des thèses plus « applicables » pour pouvoir conquérir les entreprises. Demain, je voudrais que les entreprises recrutent des docteurs sans en avoir peur parce qu'aujourd'hui ils se disent que c'est des théoriciens qui ne vont rien leur apporter ou alors ils sont trop ambitieux en termes de salaire. Il faudrait qu'à l'avenir, ils se disent que c'est un investissement et non pas un risque.

L'autre piste est celle de l'international. Nous travaillons avec l'agence de coopération technique pour pouvoir intégrer sur leurs bases de données une liste de docteurs chômeurs établie en collaboration avec la coordination de ces docteurs. Cette liste comprendra les recherches faites par ces docteurs, leurs expériences professionnelles etc.
Nous travaillons également pour développer le transfert de savoir vers l'Afrique. Aujourd'hui nous sommes en partenariat win-win avec l'Europe, pour l'apprentissage et l'innovation il faut aller en Asie, mais pour exporter notre propre savoir, c'est vers l'Afrique qu'il faut se tourner.
J'étais récemment au Mali et j'ai convenu avec la ministre malienne de l'Enseignement supérieur que nous allions faire la formation des formateurs dans les domaines où le Mali a des besoins, notamment en biologie. Ce sont des experts tunisiens qui y veilleront. Nous allons également exporter le système de prépa tunisien en Mauritanie. Des Tunisiens iront là bas pour mettre en place ce système, même les copies seront envoyées par Chronopost en Tunisie pour y être corrigées. Nous allons installer le système purement tunisien en Mauritanie. Ce sera une vraie exportation du savoir-faire tunisien en Mauritanie.

Quand est-ce que ce texte concernant les chercheurs sera prêt ?
L'objectif c'est que d'ici juin, c'est-à-dire avant la fin de l'année universitaire, tous ces textes pour le paiement des étudiants étrangers, la formation continue qui va revenir dans les universités, pour l'ouverture sur l'environnement et la possibilité pour des entreprises de signer des conventions avec les universités, pour l'exportation du savoir tunisien soient prêts. Tous ces textes seront prêts avant juin parce que je veux qu'ils rentrent en application dès cet été pour que la rentrée prochaine se fasse avec tous ces textes là.


Entretien mené par Marouen Achouri & Sofiene Ahres


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