Vendredi 30 décembre 2016, a été rendue publique la dixième enquête quinquennale sur le budget, la consommation et le niveau de vie des ménages en Tunisie. On y apprend qu'en moyenne les dépenses de consommation effectuées par personne et par an ont progressé de 48,8% sur la seule période allant de 2010 à 2015. On y constate également une contraction du taux de pauvreté dans le pays , de l'ordre 5,3%. L'échantillon, sujet de l'étude, est constitué de quelque 27 mille familles tunisiennes dont les dépenses et acquisitions ont été recensées. Leur consommation alimentaire, leurs conditions de vie ainsi qu'une mesure de la pauvreté ont été les principaux domaines d'étude touchés par ce document.
Le pouvoir d'achat représente ce que l'on peut s'acheter avec son revenu disponible brut. Selon le rapport cité, on constate une nette progression de l'indice. C'est une nouvelle plutôt bonne, au sein d'une conjoncture bien morose. Depuis 2010, les dépenses de consommation effectuées par personne et par an sont passées de 2601 dinars à 3871 dinars. Cependant, cette augmentation ne concerne pas la part consacrée aux produits alimentaires qui s'est repliée, passant de 29,3% à 28,9% du budget total des dépenses. Le Tunisien s'est donc adapté à la conjoncture et il parait clair aujourd'hui qu'il a changé ses habitudes de consommation. Il consacre moins de ressources pour l'habillement, les boissons alcoolisées et le tabac, les meubles, l'électroménager, ou encore, la culture et les télécommunications. En revanche, il a nettement augmenté ses dépenses en matière de logement, d'électricité et d'eau, de transport, de santé et soins personnels, de vacances ou encore d'éducation. Pour toutes ses dépenses, une famille en l'an 2000 dépensait annuellement 6450 dinars, aujourd'hui elle en dépense 15.561 dinars. Nous devons par ailleurs signaler que ces dépenses varient en termes de volumes d'une région à une autre. Car bien des régions souffrent d'un taux de pauvreté qui reste élevé malgré la contraction globale de cette valeur.
En Tunisie, l'approche retenue pour la mesure de la pauvreté consiste à aborder cette problématique en terme de conditions de vie et l'indice phare pour la mesurer est le « seuil de pauvreté » qui désigne le niveau de consommation minimum en deçà duquel une personne est considérée comme pauvre, ne disposant donc pas d'un niveau de vie convenable. L'indice concernerait aujourd'hui, 15,2% des ménages tunisiens (1,7 millions de personnes) contre 20,5% en 2010. Soit une baisse de 5,3 points. Les estimations issues des résultats de l'enquête montrent également une nette baisse du taux de pauvreté qualifié de « sévère ou extrême » qui est passé de 6% en 2010 à 2,9% en 2015 et qui concernerait près de 320 mille Tunisiens. Cet indice varie de manière forte selon les régions. Pour le Grand-Tunis, seulement 0,3% des familles souffrent d'un taux de pauvreté sévère. Pour Bizerte, Gafsa et Sousse l'indice s'élèverait à 3,5% et plus du double pour Zaghouan, Béja, Le Kef et Seliana. Kairouan et Kasserine restent les deux régions les plus touchées par le phénomène, enregistrant des taux bien supérieurs à 10 %, soit touchant 2 personnes sur 5.
On peut noter aussi que, sur les cinq dernières années, une contraction simultanée du taux de pauvreté a touché toutes les régions du pays. Il en ressort néanmoins que l'incidence de pauvreté est inégalement distribué selon les différentes régions du pays. Cette dispersion est mesurée dans le rapport selon l'indice de Gini.
Le coefficient de Gini est un nombre variant de 0 à 1, où 0 équivaut à l'égalité parfaite et 1 signifie une inégalité parfaite. Dans le rapport de L'INS, on relève que l'indice diminue de manière importante sur la période 2010-2015. L'inégalité aurait donc diminué au cours de cette période. Une baisse due, vraisemblablement, à la hausse des revenus salariaux enregistrée pour la même période, relève l'INS.
Dans le cadre du rapport, l'enquête alimentaire révèle que le régime alimentaire demeure, dans sa totalité, basé sur les céréales et cela bien que la quantité consommée par habitant baisse continuellement depuis 1985. Elle est en effet passée de 204,4 Kg par personne durant l'année 1985 à 174 Kg pour 2015. La consommation des produits laitiers a, quant à elle, explosé. En 1985, le Tunisien consommait près de 14 Kg de produits laitiers par an. Aujourd'hui, il en consomme 40,7 Kg. Et pour ce qui des fromages et yaourts, la consommation a été multipliée par 5 et plus. La consommation de viande et volailles a elle aussi augmenté de manière importante, passant de 17,8 Kg par an et par personne à 32,5 Kg pour l'année 2015.
Pour ce qui est de l'accès aux services communautaires comme les caisses sociales, les résultats dégagés démontrent que la part de la population pauvre affiliée aux caisses sociales (CNSS et CNRPS) reste nettement inférieure à celle non pauvre. En effet, seulement 19% des Tunisiens considérés comme pauvres sont affiliés contre plus de 40% de ceux qui ne le sont pas. Pour ce qui est de la couverture sanitaire, plus de 80% de la population tunisienne en bénéficie et la différence entre ceux qui sont considérés comme pauvres et ceux qui ne le sont pas reste minime (1,7%).
Le pouvoir d'achat, tel qu'il est défini par les statistiques, est une mesure pour l'ensemble de tous les ménages. Ce qui veut dire que si le nombre de ménages et la population augmentent, le pouvoir d'achat par personne n'augmente pas nécessairement aussi vite. Il représente donc une moyenne de la quantité de biens et de services que l'on peut acheter avec une unité de salaire.
Au-delà du contexte économique actuel, la population tunisienne enregistre un niveau de vie en nette progression, selon le rapport et vue l'importance que prendra l'indice pour les années à venir, d'autres instituts comme l'association des consommateurs devront le mesurer. Intrinsèquement lié à la consommation et aux salaires, cet indice tant scruté dans les économies développées reste en Tunisie peu significatif. Pour le Tunisien moyen, même quand il monte, le pouvoir d'achat diminue.