Le projet de loi relatif à l'institution de la peine de substitution, examiné, début Mai, par le Conseil des ministres a été le thème d'une conférence de presse tenue, mardi, par M. Béchir Tekkari, ministre de la Justice et des Droits de l'Homme, au siège du département, en présence des représentants des médias nationaux et étrangers. Ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de la consolidation du dispositif des droits de l'homme, de la promotion du système pénal, de l'institution d'une peine de substitution en tant que sanction alternative à la peine de prison, de la promotion de la peine de travail d'intérêt public et de l'élargissement du champ de la conciliation par médiation en matière pénale. M. Béchir Tekkari, qui était accompagné du coordonnateur général des droits de l'homme et de plusieurs cadres du ministère, a fait observer que ce projet de loi est de nature à permettre la réduction du nombre des peines de prison de courte durée pour des contraventions et des délits simples ne constituant pas de danger pour le sécurité et la liberté des individus ou pour la société, en substituant à ces peines des sanctions qui sauvegardent la dignité de l'homme, assurent sa réhabilitation et préservent son intégration au sein de la société. Il a fait remarquer que les trois mesures inscrites dans le cadre de ce projet de loi permettront d'éviter l'emprisonnement de près de 10 mille personnes par an indiquant que : « que cette mesure s'appliquera aux débutants et aux auteurs des crimes simples ». Le ministre a souligné, à cet égard, que de nombreuses études, ont montré que le taux de récidive chez les personnes ayant accomplis une peine de substitution est de loin moins important que celui chez les personnes ayant accomplis une peine d'emprisonnement. Il a précisé, à cet égard, que ce taux ne dépasse pas 15 pc contre 40 pc pour les prisonniers. S'agissant de la première mesure juridique prévue par ce projet de loi, le ministre a indiqué que cette mesure permettra de remédier aux lacunes constatées au niveau de la peine de travail d'intérêt public, en vigueur en Tunisie depuis 1999. Le ministre a précisé que le nombre des décisions de peine de travail d'intérêt public ne dépasse pas les 500 décisions chaque année. Le ministre a ajouté que cette mesure permettra de garantir la couverture sociale des personnes et les conditions de sécurité professionnelle dans le but d'encourager l'application de cette peine affirmant que cette sanction ne concernera que les débutants. Le ministre a donné des explications concernant les spécificités de cette peine qui consiste dans la réalisation de travaux de nettoyage et d'aménagement dans le cadre des activités municipales et associatives. En ce qui concerne la deuxième mesure, relative à la peine de substitution pénale, qui sera appliquée pour la première fois en Tunisie, le ministre a indiqué que cette peine concernera les personnes n'ayant pas d'antécédents judiciaires parmi les personnes auteurs de certains délits et contraventions. Elle permet l'institution de dédommagements variant entre 20 dinars à 5 mille dinars. Pour ce qui est de la troisième mesure relative à la conciliation par médiation pénale, le ministre a affirmé que cette mesure permet le classement de l'affaire en cas de conciliation entre les deux parties, la partie lésée et l'accusé, à travers la médiation du procureur de la République. S'agissant de loi relative au recouvrement des droits, le ministre a fait observer que cette loi tend à lutter contre le phénomène de la récidive à travers la facilitation des conditions de recouvrement des droits et l'obtention d'un bulletin de casier judiciaire propre (bulletin N°3). Il a annoncé, que le ministère de la Justice et des droits de l'homme et le ministère de l'Intérieur et du développement local collaborent, actuellement, en vue de mettre en place un système informatisé garantissant une mise à jour automatique des listes des personnes parmi les auteurs des contraventions et des délits simples et permettant de s'informer sur les antécédents judiciaires des personnes. Les questions des journalistes ont porté sur un nombre de thèmes relatifs, notamment, à la véracité des rumeurs d'enlèvements d'enfants, aux critères adoptés pour la promotion et la mutation des magistrats et aux visites d'organisations non-gouvernementales aux prisons tunisiennes ainsi que sur la Ligue tunisienne des droits de l'homme. En réponse à la question sur les rumeurs relatives à des cas d'enlèvement présumés d'enfants, M. Bechir Tekkari a réaffirmé que, selon les investigations judiciaires et de la sécurité, aucun cas d'enlèvement d'enfants n'a été enregistré et qu'il s'agit de rumeurs mensongères et non-fondées. Il a, dans ce cadre, annoncé l'arrestation de la personne responsable de la propagation de cette rumeur à travers le réseau Internet en raison de la panique qu'elle a semé auprès des enfants et des parents. Après avoir donné des éclaircissements sur les critères en vigueur en matière de promotion et de mutation des magistrats et sur la création d'un syndicat des avocats, le ministre a répondu aux questions des journalistes concernant la visite d'ONG internationales aux prisons civiles, indiquant, dans ce contexte, que la Tunisie est un Etat indépendant et souverain, précisant que « si la Tunisie a accepté la visite de certaines ONG, alors qu'elle n'y était pas obligée, cela témoigne de son ouverture sur son environnement extérieur ». La Tunisie, a-t-il expliqué, adopte cette démarche en vertu d'accords conclus avec ces ONG ajoutant que tout manquement à ces accords, à l'instar de la limitation des visites à des prisonniers cités dans des listes pré-établies, est contraire au principe de l'égalité énoncé par la Constitution tunisienne et consacré par la loi sur les prisons. Le ministre a mis l'accent, dans ce contexte, sur l'importance d l'accord conclu avec la Croix Rouge qui effectue, régulièrement, depuis 2005, des visites dans les prisons tunisiennes. S'agissant de la Ligue tunisienne des droits de l'homme, le ministre a, de nouveau réaffirmé, qu'elle constitue un acquis national, faisant part d'une préoccupation face à la crise qu'elle traverse et formant l'espoir qu'elle puisse parvenir à une solution rapide dans le cadre du respect de la loi afin qu'elle retrouve la place qui lui revient dans le dispositif des droits de l'homme en tant que structure indépendante non seulement du pouvoir mais également de toute influence politique, dans la mesure où la défense des droits de l'homme, doit demeurer à l'écart de toutes formes d'instrumentalisation. Evoquant la loi relative à la lutte contre le terrorisme, M. Béchir Tekkari a précisé que la législation tunisienne ne prévoit pas de tribunaux d'exception, ni de mesures de garde à vue ou de détention préventive pour les affaires de terrorisme. Il a fait remarquer, à cet égard, que cette loi est sujette, à l'instar des autres législations, à une évaluation périodique dans l'objectif de l'améliorer. En ce qui concerne le transfert des lieux d'incarcération en raison de leur caractère vétuste, le ministre a mis l'accent sur le souci de faire en sorte que ces établissements soient installés à proximité des zones urbaines afin de faciliter aux parents la visite des détenus. Le ministre a évoqué la question de la participation des avocats à des émissions de débats télévisés, dans le cadre de la télé-réalité, faisant remarquer que le règlement intérieur des avocats organise la question. Il a souligné, à cet égard, qu'il ne peut y avoir d'intervention tant que ces programmes ne présentent pas une atteinte au prestige de la justice et aux données personnelles et ne constituent pas une violation de la loi. S'agissant de la lutte contre certains crimes dont celui relatif aux stupéfiants, le ministre a fait remarquer qu'il s'agit, en Tunisie, d'un phénomène sans gravité. Il a, à cet égard, évoqué la révision de la loi sur les stupéfiants afin d'aider les consommateurs débutants à s'intégrer dans la société à travers leur prise en charge par les centres de désintoxication et leur protection contre les risques de récidive.