Je ne prétends pas m'y connaître en politique et je m'en porte bien. Aussi, tout genre de tractations, de négociations occultes et de marchandages officieux me déroutent. Il est fort à parier que beaucoup de mes compatriotes sont dans mon cas. Cependant, cela ne m'empêche pas d'appréhender certaines questions avec une certaine lucidité, du moins je le suppose, d'en discuter et d'en tirer quelques conclusions. Celles qui agitent mes cellules, mises ces derniers jours à rude épreuve, ont été occultées par cette énorme affaire de Baghdadi Mahmoudi qui semble avoir été montée sciemment pour précisément faire passer la pilule, en catimini. Pourtant, peu de gens ont appelé à la vigilance et tiré la sonnette d'alarme pour les risques que les décisions prises à l'insu du peuple et à la faveur de la diversion produite par l'affaire de l'ex-Premier ministre de Kadhafi, peuvent entraîner pour l'avenir de notre pays, de nos institutions, de nos enfants. Tout simplement ! Il s'agit, on l'aura deviné de cette « résolution » absolument inexplicable d'ouvrir le pays, dans l'acception la plus large du terme aux Maghrébins. Pas de passeports dorénavant pour nos « frères », pas de document de voyage non plus. Il suffira d'une simple carte d'identité et notre « Eldorado tunisien » ouvrira largement ses bras à tous ceux qui voudront y entrer pour y faire un tour, pour y résider à perpétuité, sans carte de séjour, pour y travailler, pour y acquérir biens meubles et immeubles, pour enfin brandir le droit d'élire, comme tout Tunisien de souche, les édiles municipaux. Je ne sais pas dans quel esprit sont nées de telles idées, mais il est évident que ce ne sont là qu'élucubrations et théories fantasmatiques. Car, il me semble, qu'en ces périodes troubles que vivent la région et particulièrement les pays arabes et maghrébins, lever tout contrôle aux frontières est un pur suicide. Qui entrera, quand et pourquoi ? A-t-on si vite oublié les interceptions aux frontières sud de bandes d'individus aux intentions inqualifiables ? Et qui pourra, dorénavant, s'opposer à l'entrée, fleur aux dents ou aux fusils, des combattants de l'AQMI ? Inquiétant, très inquiétant, il est presque certain que le ou les auteurs de cette idée explosive n'ont pas pensé à de telles éventualités. À moins qu'un marché ait été conclu ! Quant au travail libre de ces milliers de gens qui n'hésiteront pas à franchir le Rubicon, n'importe qui, en Tunisie rappellera le million de chômeurs autochtones pour lesquels le gouvernement tente, par des procédés diversifiés, de trouver des solutions et que, jusqu'à ce jour, il n'a nullement réussi à satisfaire. A-t-on l'intention de nous obliger à revêtir les habits du racisme et à crier, à l'adresse de nos frères arabes et maghrébins, qu'ils viennent manger le pain des Tunisiens ? Enfin, et sans ergoter sur le droit de « nos frères » à la propriété et sans nous poser la question de savoir si, dans les autres pays du Maghreb, les Tunisiens bénéficient d'une telle faveur, c'est la question du droit au vote communal de ces gens qui inquiète, au plus haut degré. Outre le fait qu'une question similaire du droit de vote des émigrés continue à se poser dans les pays européens qui s'y sont toujours opposés, nous ne pouvons qu'exprimer notre peur immense quant à notre identité tunisienne laquelle, à plus ou moins long terme, sera en danger de déliquescence. Il y a assurément anguille sous roche ! Mais quelles motivations ont poussé les géniteurs de ces idées absconses et inconcevables à pondre de telles inepties, en ce moment précis ? L'on avance, avec aplomb mais sans convaincre, la volonté de « réaliser l'unité maghrébine constamment en panne ». Si cela est vrai, il est certain que ce ne peut qu'être la mauvaise solution, car il y a lieu de se demander si les autres pays du Maghreb recherchent vraiment cette unité. Cette intégration maghrébine doit être d'abord et prioritairement économique qui favoriserait ensuite l'intégration des peuples. Mais certaines mauvaises langues parlent d'une stratégie du parti au pouvoir de chercher à « racoler des voix » pour les municipales. Dieu ! Cela se pourrait-il ? Nos gouvernants provisoires ne sont pas à une aberration près et cela ne saurait étonner outre mesure. Où sont les partis ? Où est la société civile ? Où est l'opposition ? Les discussions byzantines et les querelles de sérails accaparent toutes nos forces, tandis que nos gouvernants provisoires bradent le pays et l'exposent aux dangers les plus divers. M. BELLAKHAL