Béji Caïd Essebsi, leader de Nidaa Tounès a accordé un long entretien à Nouri Nesrouche du journal algérien « Al Watan ». Il y dissèque la situation politique du pays et livre son appréciation sur Ennahdha et les islamistes. Tout en affirmant que la Tunisie n'est pas très vulnérable grâce aux nombreux acquis économiques, sociaux, culturels, éducatifs de l'ère Bourguiba, il n'en admet pas moins qu'elle se trouve menacée par la pauvreté, le chômage, la marginalisation de certaines régions mais également de l'extérieur par certains courants jihadistes dont l'activisme sous-tendu par des idées importées constitue un vrai danger. Une menace, dit-il, qui ne saurait être combattue que par la cohésion nationale. Concernant sa perception d'Ennahdha, BCE soutient que ce parti fait partie du paysage politique et est devenu un acteur incontournable de la vie politique tunisienne. « Nous lui reprochons de prendre plus de place qu'il ne devrait », assure-t-il, ajoutant qu'il n'est pas question que la Tunisie puisse avoir un parti dominant et unique, car cela mènerait progressivement vers la dictature. Aussi, affirme-t-il, Ennahdha ne peut gouverner seul, tout comme n'importe quel parti parvenu au pouvoir. De ce fait, un consensus effectif doit se dégager entre tous les partis politiques agissants. Après avoir indiqué que Ennahdha et ses alliés de la troïka ont montré leurs limites à l'épreuve du pouvoir, il les appelle à dialoguer avec toutes les sensibilités politiques du pays, à accepter le partage du pouvoir et à trouver un modus vivendi avec les composantes de la société tunisienne. Au sujet de la dissolution des LPR, Ligues de protection de la Révolution, Caïd Essebsi indique qu'elle est inéluctable quoiqu' Ennahdha les considère comme l'âme de la Révolution et s'oppose à la volonté générale de les voir dissoutes. Soutenant le droit de chacun d'exprimer ses idées, l'ex-Premier ministre s'insurge contre l'usage de la violence comme moyen de militantisme. A la question de savoir si la création de l'Union pour la Tunisie vise à sauver la Tunisie, BCE réitère son affirmation que le pays n'est nullement menacé. C'est, dit-il en substance, dans un objectif de rééquilibrage et de recomposition du champ politique en vue de réaliser un système démocratique dont l'un des fondements est l'alternance et dont il faudra créer les conditions. Evoquant le gouvernement en voie de constitution par Ali Laarayedh, le fondateur de Nidaa Tounès admet l'existence de beaucoup de handicaps mais qu'il ne faut pas condamner les gens avant qu'ils aient commencé à travailler : « On ne peut juger qu'à la pratique ». M. BELLAKHAL