Le journaliste palestinien Abdel Bari Atwan a consacré l'éditorial de son journal en ligne Raialyoum au feuilleton de la recherche d'un Chef du gouvernement pour le pays. Après avoir exprimé sa crainte réellement sérieuse de voir la révolution tunisienne échouer et que réalisations (du reste fort limitées) s'effondrer, l'éditorialiste rappelle la pente raide sur laquelle a été engagé le pays sans que soit émue outre mesure une élite politique occupée davantage à défendre bec et ongles ses prérogatives, dans un mépris total de l'intérêt du pays et du peuple. Signalant l'échec du dialogue national et l'entêtement de l'opposition et de la troïka au pouvoir de clamer leur rejet des candidats respectifs à la primature, M. Atwan s'étonne qu'en Tunisie, présentée comme un pays au système éducatif d'avant-garde et disposant d'une réserve importante de compétences, l'on ne puisse pas trouver une personne de consensus apte à diriger momentanément le pays et le mener à la prochaine étape. L'éditorialiste revient sur Ahmed Mestiri, candidat de la troïka, pour énumérer ses nombreuses vertus et son passé de militant de la démocratie et d'opposant notoire, tout en relativisant ses qualités, « assurément émoussées » par un âge trop avancé pour la mission à laquelle on veut le vouer. M. Atwan rappelle sans ambages que la révolution tunisienne a été faite essentiellement par des jeunes. Il s'étonne que la classe politique actuelle, pour la plupart sénescente, tienne à écarter cette jeunesse entreprenante à souhait de la direction du pays, et s'obstine à ne regarder que vers le passé alors que le peuple tunisien aspire à des horizons nouveaux et plus larges. Déplorant que trois années après la révolution rien n'ait été réalisé tant au niveau de la rédaction de la constitution qu'à celui de la fixation d'une date pour les élections, M. Atwan dénonce cette propension de l'élite politique à mettre ses intérêts propres et partisanes au-dessus des intérêts d'un pays exposé à toutes les menaces. Il assure qu'aujourd'hui la révolution a été déviée de ses objectifs originels et qu'il est profondément décevant que des hiérarques aussi distingués que Ghannouchi et Caïd Essebsi affichent leur incapacité à s'entendre sur une personnalité appelée à diriger le pays en cette phase transitoire de quelques mois. L'éditorialiste se félicite enfin que l'armée tunisienne soit restée neutre et que son commandement soit peu attiré par le pouvoir autrement, dit-il, sa patience aurait été épuisée et un scénario à l'égyptienne se serait reproduit. Enfin, M. Atwan souhaite à la Tunisie une « élite politique meilleure » qui se soucierait davantage de l'intérêt du peuple afin de lui éviter les affres des situations qui prévalent en Libye, au Yémen, en Syrie ou en Egypte. « Ce que le peuple tunisien ne mérite nullement », a-t-il conclu.