La région de Nabeul vit à l'heure de la cueillette des fleurs de bigaradier, une tradition bien enracinée dans la région du Cap Bon et jalousement conservée par la population. Les premières cueillettes, qui viennent de commencer, se limitent encore à quelques exploitations familiales car la campagne officielle a été fixée à partir du 10 avril. Ce rendez-vous est incontournable. Pas une campagne ne passe sans que l'on fasse sa provision d'eau de fleur de bigaradier (Zhar). Cette essence, très appréciée, se prête à une multitude d'usages. Elle sert, entre autres, comme arôme pour parfumer les pâtisseries, confiseries et café. Elle est, également, utilisée pour traiter l'insolation, les douleurs intestinales et, également, comme produit cosmétique notamment pour le nettoyage de la peau. C'est, par excellence, un produit du terroir. Le bigaradier, jadis introduit dans la région par les Andalous, constitue une ressource économique aux dimensions culturelles et sociales. La première unité d'extraction d'eau de bigaradier dans la région remonte au début du XIXe siècle. La région compte aujourd'hui 108 mille pieds de bigaradiers répartis sur 390 ha. Plus de 60% de la cueillette est transformée dans les cinq unités industrielles de la région. Nabeul capitale du Zhar Avec le retour du beau temps et l'allongement de l'ensoleillement, la région de Nabeul prend l'allure d'un gigantesque atelier de fabrication d'eau de fleurs de bigaradier (ZHAR), atelier qui s'étend à travers les villes et les campagnes. La cueillette des fleurs de bigaradier est, également, l'occasion de renouer avec la tradition. C'est une fête pour les familles nabeuliennes qui, dès la maturation de la fleur de bigaradier, s'affairent à sa cueillette et sa collecte avant qu'elle n'éclose et perde sa valeur, la campagne ne devant pas dépasser 3 à 4 semaines. La cueillette contribue, aussi, à stimuler des activités traditionnelles très présentes dans les habitudes des familles nabeuliennes dont l'utilisation de l'alambic, ustensile traditionnel servant à la distillation des fleurs de bigaradier essentiellement, mais aussi, à l'extraction d'autres essences comme l'eau de rose ou l'eau de l'églantier. La campagne donne lieu à de nombreuses activités de négoce; plusieurs familles nabeuliennes s'adonnant pendant cette période à la collecte des récoltes pour revendre le précieux produit sur des marchés occasionnels, à Nabeul-ville, Dar Chaabane El Fehri, Bou Arguoub ou encore à Beni Khiar. D'importantes quantités sont acheminées vers les centres de collecte à destination des cinq unités de distillation industrielle de la région. Le néroli de Nabeul, très prisé à Grasse La filière du zhar joue un rôle économique important car ce produit est à la base de la fabrication d'essence de néroli qui est exporté vers plusieurs marchés extérieurs, notamment, la ville française de Grasse pour être utilisé dans la fabrication de parfums haut de gamme. Ce produit procure, en effet, des recettes en devises variant entre 3 et 4 millions de dinars par an (une tonne de fleurs de bigaradier produit en moyenne 1kg de néroli et 600 litres d'eau de zhar). Le néroli est très prisé sur les marchés extérieurs car il est unique par sa qualité et ses caractéristiques. Les prévisions tablent cette année sur une production d'environ 1200 tonnes de fleurs de bigaradier contre 1550 durant la campagne précédente. Cette baisse s'expliquerait par le retard enregistré au niveau des pluies automnales et le manque d'ensoleillement à l'approche des cueillettes, ensoleillement nécessaire pour la croissance de la fleur. En effet, les fleurs de bigaradier sont très sensibles aux phénomènes climatiques. C'est pourquoi la campagne de cueillette ne devra démarrer officiellement que le 10 avril alors qu'elle avait débuté un 18 mars l'année dernière. Malgré la baisse de la production, cette activité économique demeure prospère et offre d'importantes perspectives d'exportation, notamment, à travers la conquête de nouveaux marchés ainsi que les possibilités d'investissement en Tunisie dans la fabrication de senteurs et huiles essentielles.