Gisèle Halimi est venue récemment en Tunisie, son pays natal, pour partager avec ses concitoyens les joies de la Révolution. Elle en parle avec ferveur dans l'entretien qu'elle a accordé à Investir en Tunisie. D'abord comment avez-vous vécu la Révolution tunisienne? Gisèle Halimi : Bon j'étais en France mais j'ai suivi tout ce qui passe en Tunisie instant après instant, à travers la couverture des chaines de par le monde. La Révolution tunisienne est unique ! Dans ses étincelles, dans son parcours, et même dans son résultat. Mon cœur battait très fort lorsque je me souviens des images des coups de fusils et des bombes lacrymogènes qui visaient les manifestations pacifiques. J'étais triste de voir autant de martyrs et de blessés dans les différentes villes tunisiennes. Mais après le départ du président déchu, je pense que j'étais la personne la plus contente du monde. J'ai senti la liberté dans tout mon corps. Lorsque j'ai franchi le territoire tunisien, les larmes aux yeux, j'avais le sentiment d'être de nouveau née. Voulez-vous dire quelque chose aux Tunisiens? Mon message est premièrement unité, unité et unité. Parce qu'une révolution qui part sur des bases aussi formidables que celles-ci, avec comme auteur initiateur le peuple et le peuple lui seul, ne peut être que formidable. Dans ces moments, la moindre fraction du peuple dans des morceaux de partis politiques, d'associations et des groupements, la révolution sera perdue. En revanche, si sur cette éclosion formidable de cette révolution populaire, si en même temps qu'elle est close en rassemblant aujourd'hui toutes les forces prêtes pour le changement et la reconstruction, là on peut gagner. Parce qu'après Ben Ali, il faut reconstruire le pays et reconstruire la démocratie. Je suis optimiste parce qu'en Tunisie réside les plus grandes sources, solutions et possibilités pour faire cette démocratie et réaliser l'unité. Donc Tunisiens restez unis, vous avez créé l'histoire ! Quel rôle peut jouer la femme tunisienne ? La femme tunisienne a été, et grâce à Bourguiba, en dehors du cercle des femmes arabes. Donc, pour la femme tunisienne, non seulement il ne faut rien touché de ses acquis, mais faire en sorte de les moderniser et de les actualiser. Je peux vous affirmer que parfois et dans des sujets bien déterminés la femme tunisienne était en avance par rapport à la femme française. Et je suis sûre que les vents du changement qui ont commencé en Tunisie vont tout changer dans le monde arabe, y compris les droits de la femme dans ces pays. Qui est Gisèle Halimi ? Née Zeiza Gisèle Elise Taïeb le 27 juillet 1927 à la Goulette en Tunisie. Gisèle Halimi est avocate, militante féministe et politique franco-tunisienne. Issue d'une famille juive traditionaliste, elle choisit dès sa jeunesse le combat féministe et politique. Gisèle Halimi entre au barreau de Tunis en 1949. Elle poursuit à Paris, à partir de 1956, sa carrière d'avocate. Fortement engagée dans plusieurs causes, elle a milité pour l'indépendance de la Tunisie et aussi pour l'Algérie. Elle dénonce les tortures pratiquées par l'armée française. Dans le même esprit, elle préside une commission d'enquête sur les crimes de guerre américains au Viêt Nam. Avocate de l'activiste palestinien Marouane Barghouthi, ancienne ambassadrice de France auprès de l'UNESCO, Gisèle Halimi est mariée à Paul Halimi, administrateur civil au ministère français de l'agriculture dont elle porte toujours le nom.