Par M'hamed JAIBI Les généreuses mesures en faveur du secteur du tourisme annoncées par la ministre Salma Elloumi, et qui le mettent pratiquement sous perfusion, ont miraculeusement mis fin à de longues années de polémiques, d'hésitations et même de menaces quant au destin des nombreuses entreprises touristiques en difficulté, dont certaines en cessation de paiement. Menaces dont le point culminant s'est matérialisé, sous le gouvernement Hamadi Jebali, par diverses versions d'ouverture sur la spéculation foncière et immobilière en direction d'un hypothétique «tourisme islamique» qui transformerait nos hôtels boiteux en d'envahissants palais pour émirs pétroliers. Mais les mesures annoncées sont coûteuses et viennent renouer avec l'Etat providence et aggraver plusieurs déficits que les pouvoirs publics semblaient déterminés à combattre et réduire. De plus, elles risquent d'être interprétées comme des satisfecit accordés à certains hôteliers pour une gestion que les diverses administrations publiques et les banques ont jugé désastreuse. Il serait donc sans doute préférable de faire la différence entre deux catégories de patrons d'entreprise touristique, ceux que la crise ayant suivi la révolution a atterrés et ceux dont la mauvaise gestion est notoire et qu'il faut absolument empêcher de jouer le rôle de mauvais exemple à suivre, non seulement pour les hôteliers, mais, plus généralement, pour tous les patrons d'entreprise, qu'elle soit de services, artisanale, agricole, commerciale ou industrielle. Cela dit, les mesures de soutien annoncées visent, en fait, autant à aider les établissements touristiques à survivre à la crise mortelle qui s'annonce, qu'à s'efforcer de maintenir et consolider les emplois, tout en secourant les éventuels futurs travailleurs licenciés, victimes de l'inévitable chômage technique qui a déjà affecté, ces quatre dernières années, un nombre important de personnes vivant du tourisme ou de l'artisanat, et qui, suite à l'attaque terroriste de Sousse, va très probablement sévir davantage. L'ampleur de l'effort consenti par l'Etat pour les mesures annoncées est inattendue, à la mesure du désastre qui frappe notre tourisme, après quatre années de contre-performances succédant à un inquiétant déclin. Mais l'Etat ne se suffit pas de moratoires et d'exemptions, il se porte garant pour des crédits sur 7 ans aux établissements qui souhaitent financer leurs activités professionnelles durant les saisons 2015 et 2016 que la crise menace frontalement. Et si la baisse de la TVA est une mesure classique à laquelle ont recours plusieurs pays, ainsi que le rééchelonnement des dettes fiscales et de celles envers la Steg et la Sonede, malgré les grandes difficultés que vivent ces deux sociétés, le rééchelonnement sur 7 ans sans intérêts ni pénalités des dettes sociales des entreprises touristiques risque d'aggraver sérieusement le déficit de la Cnss, à un moment où l'option des 65 ans ne semble pas faire l'unanimité. Des appréhensions qui valent également pour Tunisair et la CTN, sociétés nationales marchant sur un fil et qu'on veut impliquer, au détriment de toute rigueur, dans l'attraction en Tunisie, à la rescousse du tourisme, de nos concitoyens vivant à l'étranger.