Par Abdel Aziz HALI En l'an I du sinistre «Etat islamique», la question qui se pose est la suivante: que peut faire le monde arabe face à ce cancer qui ne cessa de progresser telle une métastase? Le 29 juin 2014, l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), dit Daech (acronyme en arabe), proclamait le rétablissement du «califat» dans les territoires qu'il contrôle à cheval sur l'Irak et la Syrie et prend le nom d'Etat islamique avec à sa tête Abou Bakr Al-Baghdadi Al-Husseini Al-Qurashi. Un an après, l'organisation de l'EI a fini par étendre son territoire sur la région Mena comme en témoignent ces dernières semaines la chute de la ville stratégique de Syrte en Libye et ses multiples percées dans le nord de la Syrie avec la chute de Palmyre et de Hassaké. Si au Cham et au Kurdistan irakien, les Kurdes incarnaient par les Unités de protection du peuple (YPG) et les Pashmergas ont su tenir — avec beaucoup de bravoure et grâce à l'aide des frappes aériennes de la coalition internationale — la dragée haute aux djihadistes de l'étendard noir, tout porte à croire qu'aucune stratégie régionale n'est d'actualité pour lutter efficacement contre Daech et alliés. Au lendemain des attentats de France, de Tunisie, du Koweït et de l'Egypte avec l'assassinat, avant-hier, du procureur général égyptien, Hicham Barakat, le silence de la Ligue arabe est des plus inquiétants. De plus en plus dénigrée par les mouvements démocratiques et la société civile de la région, cette organisation panarabe aux allures d'un syndicat de chefs d'Etat s'est distinguée par son mutisme et une frilosité presque légendaire devant les événements récents. A part une réunion qui devait être tenue, avant-hier, en urgence à la demande du Koweït pour examiner les répercussions des attentats terroristes qui ont ciblé des fidèles au Koweït et des touristes en Tunisie, aucun signe en provenance du Caire ne parle de l'entrée en action de la tant attendue «force militaire conjointe». En effet, il y a trois mois, le 29 mars 2015, les 22 Etats membres de la Ligue arabe avaient décidé de créer une « force arabe commune », lors d'un sommet à Charm El-Cheikh en Egypte. Normalement, cette alliance pourrait intervenir à la demande d'un pays arabe dont la sécurité est menacée. Et comme l'avait signalé le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil El Arabi, le but de cette force est de «défendre notre sécurité collective». Sauf qu'un épais brouillard plane toujours sur la date de l'entrée en action de cette armada arabe et aucune date n'a été avancée pour annoncer son baptême du feu. Et pendant ce temps-là, dans un message sonore attribué à Abou Mohamed Al-Adnani, le porte-parole officiel de l'organisation, Daech a promis l'enfer aux chiites et aux Occidentaux en appelant, le 23 juin 2015, les musulmans à engager la guerre sainte contre les «mécréants» durant le mois de jeûne. Ironie du sort ou hasard du calendrier lunaire, le premier tiers du Ramadan 1436 de l'Hégire a coïncidé avec le premier anniversaire de la proclamation du «califat» islamiste. Ainsi à l'image du Groupe islamique armé (GIA) en Algérie, lors de la décennie noire des années 90, Daech avait pris l'habitude, ces trois dernières années, de passer à la vitesse supérieure, pendant les 30 jours de Ramadan, en exécutant une série d'attentats. D'ailleurs, dans une étude parue le 7 juin dernier, un think tank américain, «The Institute for the study of war», avait, étrangement, prédit des attentats daechiens durant ce mois de piété et de spiritualité. «L'Etat islamique prépare donc probablement une vague d'opérations en vue d'atteindre de nouveaux objectifs (...) ou commettre de nouveaux attentats qui viendront commémorer la proclamation du califat dès les premiers jours de Ramadan», lit-on dans cette étude. Pis encore, ce think tank proche des services secrets américains avait souligné dans sa publication que l'organisation de l'Etat islamique pouvait « appeler à des attaques synchronisées à l'étranger afin de démontrer sa capacité à intimider l'Occident. » «Il est très probable que les partisans de l'Etat islamique tenteront de multiplier les attaques lors de la période de Ramadan, privilégiant les attaques par des cellules de deux-trois personnes ou d'individus isolés», souligne, mot à mot, cette étude du think tank «The Institute for the study of war». Assurément, ces derniers événements étaient prévisibles, sauf que les Etats du monde arabe n'ont pas encore pris au sérieux les menaces de cette organisation terroriste, Qu'on le veuille ou pas, c'est dans le sang que Daech a fini par célébrer son premier unhappy birthday.