La culture, un outil capable de renouveler les relations diplomatiques Il faut se rendre à l'évidence : aujourd'hui, la diplomatie classique seule ne représente plus un moyen très efficace pour mettre en œuvre la politique étrangère. En effet, la mondialisation qui caractérise la scène internationale est basée essentiellement sur la culture, l'échange de visions, la découverte d'autres cultures, la comparaison de sa façon de vivre à celle des autres. En somme, le développement culturel. La culture est la base du progrès, c'est la clé du développement dans une société, car c'est à travers la culture que les problèmes auxquels une société fait face sont les mieux traités. Après la révolution politique, la Tunisie a besoin d'une révolution culturelle, afin d'établir un esprit critique chez ses citoyens et faire face aux problèmes locaux omniprésents tels que l'extrémisme et le fanatisme religieux, l'intolérance, les tabous sociaux et religieux, le statut de la femme, et le mépris qui existe entre différentes classes sociales. Retombées internationales L'image de la Tunisie a été gravement affectée par les attaques et les assassinats terroristes qui sont survenus après la révolution. Etant un pays touristique, la Tunisie a vu son économie gravement atteinte. En effet, la diplomatie culturelle représente un instrument avec lequel la Tunisie pourra dépasser les obstacles que la diplomatie classique n'arrive pas à surpasser. Par conséquent, la culture pourrait être un moyen très efficace pour asseoir la réputation d'un pays démocratique et civilisé à l'échelle internationale. En effet, on doit considérer que la culture est un moyen pour renouveler les relations diplomatiques. Une diplomatie alternative de nature à diversifier l'action diplomatique classique. D'après M. Mourad Sakli, professeur universitaire, musicologue, homme politique tunisien, et ancien ministre de la Culture, de janvier 2014 jusqu'à février 2015, « la diplomatie culturelle revêt une importance capitale en dépit de la nature des relations diplomatiques officielles entre les différents pays, toujours sujettes à certaines « fluctuations ». Dans ce sens, la diplomatie culturelle permet d'améliorer les relations diplomatiques officielles quand elles sont déjà bonnes ou acceptables, mais aussi d'entretenir des relations importantes pour l'avenir des pays et des peuples même dans le cas où ces relations officielles sont mauvaises ou même inexistantes (souvent à cause de l'histoire des pays, de leurs positions géographiques ou encore des manques d'intérêt politiques ou économiques respectifs). » L'image qui devrait circuler La Tunisie est unique, surtout si on cherche à la comparer aux autres pays de l'Afrique et au Monde arabe. En effet, la liberté de la femme, le planning familial et la tolérance religieuse font partie de la vie sociale en Tunisie depuis longtemps. Le sunnisme est le courant de l'islam omniprésent et auquel la majorité de la population tunisienne est affiliée. Par conséquent, les conflits religieux ont toujours été assez rares. Ainsi, les attaques et les menaces terroristes qui sont survenues après la révolution sont le résultat d'idéologies diffusées par des mouvements et des groupes salafistes qui nous sont étrangers. Montrer cette image au monde et faire circuler ces informations sur la Tunisie est la responsabilité des organisations et institutions culturelles tunisiennes, afin d'inciter des citoyens du monde entier à venir visiter la Tunisie et, donc, redonner vie au tourisme tunisien. C'est dans cette perspective que M.Sakli a souligné que « la diplomatie culturelle peut représenter une vitrine intéressante du potentiel de notre pays, laquelle peut inciter d'autres publics cibles à s'approfondir dans la découverte de notre culture et, de ce fait, visiter la Tunisie. Dans ce sens, il est inutile de rappeler le rôle que peut jouer le tourisme culturel dans la diversification des produits touristiques et son potentiel dans le tourisme de l'avenir, non seulement à travers les visites des musées et des sites archéologiques dans le cadre des séjours balnéaires, mais à travers la mise en place de circuits appropriés qui combinent notre patrimoine matériel, notre patrimoine immatériel, notre histoire ainsi que des événements importants répartis sur tout le pays qui mettent en évidence aussi bien notre potentiel artistique que géographique. » Dialogue des cultures C'est aussi dans cette perspective que le projet Dar Eyquem a été crée. Dar Eyquem est une association promouvant la collaboration entre artistes méditerranéens professionnels par la création, la production et la diffusion de spectacles, d'expositions et des rencontres. . Shiran Ben Abderrazak, metteur en scène et directeur opérationnel de ce projet le définit comme étant un « moyen visant à promouvoir la collaboration entre artistes méditerranéens (tunisiens et étrangers) à travers, principalement, des Résidences d'Artistes, et qui va offrir à la Tunisie une structure d'accueil et de production des arts de la scène et du spectacle vivant sans pareille dans notre pays. Cette Résidence confirmera qu'il est possible d'accueillir des artistes professionnels étrangers en toute sécurité et qu'une collaboration entre professionnels de pays différents peut donner lieu à des représentations de spectacles de grande qualité dès lors qu'il n'y a plus de censure pour brider la liberté de création.» M. Ben Abderrazaka indiqué qu'« un projet qui produit des spectacles de qualité issus de collaboration entre des artistes de pays différents ne peut que contribuer au rayonnement touristique et diplomatique de la Tunisie. Diplomatique, car le fait de faire dialoguer des cultures entre elles montre que nous sommes un pays ouvert sur les autres. Et touristique, car si les spectacles produits sont de très grande qualité, alors, cela pourrait ouvrir un nouveau marché touristique qui est en train, d'ailleurs d'être exploré en ce moment : le tourisme culturel. » De son coté, M. Sakli a indiqué que : « l'action intellectuelle, artistique et, donc, culturelle en général traduit non seulement un état de connaissances, de technicité, d'esthétisme et de vision de la vie et du monde, mais aussi et surtout un degré de liberté d'expression et de liberté dans une acception plus large. Il est inutile alors de rappeler que la liberté constitue l'une des pierres angulaires de tout système démocratique » Aujourd'hui, et plus que jamais, nous avons besoin de mieux communiquer avec les institutions culturelles qui opèrent à l'échelle internationale. Ces institutions peuvent coopérer avec les institutions culturelles nationales et rendre l'art accessible à tout le monde. Si on trouve, à titre d'exemple, sur internet toutes les productions artistiques de tous les pays assez facilement, la recherche web n'offre pas une formation complète qui permet à l'individu de bien comprendre le contenu auquel il a accès. En outre, la culture ne devrait pas être seulement pour l'élite, contrôlée juste par quelques personnes. M. Sakli a signalé que : « l'accès à la culture, l'accès à une culture de qualité, généralisée, constitue un facteur important sur le chemin du progrès pour tous les pays, y compris le nôtre. Par ailleurs, dans le contexte tunisien, la culture avec sa diversité et ses spécificités peut constituer aussi un élément de progrès et d'émancipation de par son potentiel inestimable et toujours peu exploité dans le développement durable, la création d'emplois ; l'économie tunisienne ne profite pas encore suffisamment du potentiel qu'offre le pays en matière de patrimoine matériel, de patrimoine immatériel et d'expression littéraire et artistique. Dans ce sens, suivre des stratégies clairement énoncées qui répondent à des objectifs précis et éviter de naviguer à vue constitue une nécessité pour notre pays. » En outre, la culture est un instrument d'activité sociale. C'est pour cela que les artistes devraient avoir les moyens pour aller à l'étranger pour présenter leurs œuvres.