L'Histoire de la Tunisie en deux heures, c'est beaucoup et très peu. Car il est extrêmement difficile d'endiguer le flot d'informations et de références que nous offre Raja Farhat. Raja Farhat, nous l'aimons, parce qu'il sait, mieux que personne, raconter, et que nous avons tous une âme de ceux qui aiment les contes. Nous l'aimons, parce qu'avec lui, l'Histoire, la grande, celle des livres, perd sa raideur de manuels, ses pelotes emberlificotées de dates et de batailles, ses successions de rois et de généraux aux noms imprononçables. Nous l'aimons, parce que c'est dans une promenade vagabonde et érudite, une déambulation savante et aventureuse qu'il nous entraîne dans son dernier spectacle. Et l'on se dit que cet homme, qui a effectué une belle carrière internationale dans le domaine de la culture et de la francophonie, a vraiment perdu son temps tant qu'il ne s'est pas mis à conter. L'Histoire de la Tunisie en deux heures, c'est beaucoup et très peu. Car il est extrêmement difficile d'endiguer le flot d'informations et de références que nous offre Raja Farhat. L'Histoire, selon Raja, n'est pas linéaire : elle est, comme dans la vraie vie, toute en concordances, allers et retours en arrière, cycles vertueux ou pas, coups de théâtre, analogies, rappels. Et lui qui est le roi de la digression contrôlée, le maître incontesté de la pensée vagabonde qui s'avère toujours remarquablement maîtrisée, n'hésite pas à nous offrir d'étranges méandres. Freud au pays de Cléopâtre, la princesse Napoléon aux côtés des guerres chiites, les princes de Mahdia et Cléopâtre Séléné. On s'envole de Kairouan à Vienne, pour faire escale à Rome le temps d'une pause, avant de plonger en Syrie. Toutes ces spirales ramenant, d'une manière ou d'une autre, à l'Histoire de la Tunisie. Quitte à passer par la légende s'il le faut. Car, finalement, comme l'affirme Raja Farhat, rien n'est plus vrai que les légendes. Alors suivons donc Raja Farhat à travers les chemins de traverse d'une Histoire comme nous ne l'avons jamais apprise, parsemée de personnages extraordinaires comme cette Om Limam, qui fut reine incontestée de Kairouan, ou ce général immense qui se leva pour défendre la terre des siens. Une histoire où les anecdotes et les clins d'œil relaient les hauts faits, où les correspondances à travers les siècles relèvent des évidences, et où on finit par se demander : «comment n'y avais-je pas pensé ?» Le génie de Raja Farhat, c'est qu'il raconte comme il parle, prenant à témoin son public, n'hésitant pas à partir sur une association d'idées qui le mène toujours quelque part, aussi inattendue soit-elle... Et notre plaisir à nous étant de le suivre.