Par Lassaad BEN AHMED En moins d'une semaine, on décrète l'état d'urgence et on lance l'initiative pour sauver l'économie du pays. A première vue, l'équation n'a pas l'air d'être équilibrée étant donné que la relance économique et la tension sécuritaire ne font pas bon ménage. Or en pratique, il existerait un rapport dialectique entre les deux : plus le secteur économique est défaillant, plus la menace terroriste augmente et, inversement, plus le défi sécuritaire est maîtrisé plus les opérateurs économiques sont encouragés à sortir de leur attentisme et leur hésitation. C'est dire que les deux fronts sont intimement liés. Et si BCE décrète, dans la polémique, l'état d'urgence, il y a une semaine, l'annonce par l'Utica, jeudi dernier, de l'initiative «Une année pour sauver l'économie du pays» équivaut à une déclaration de l'état d'urgence économique. Déduisez-en que les deux événements partagent le même dénominateur, celui de sauver le pays. Et «Sauver le pays» ne relève pas de simples slogans politiciens, car tous les indicateurs versent dans le même constat du danger imminent. Mauvaise saison agricole, saison touristique compromise, pays fortement endetté et ennemis aux portes. Quoi d'autre pour justifier l'état d'urgence. Il va sans dire qu'au sein même de l'initiative économique de l'Utica, la composante sécuritaire est fortement présente et recommandée comme étant un préalable de première ligne, non seulement pour remettre la machine économique en marche, mais surtout pour redonner espoir aux jeunes et aux régions qui, faute de perspectives, deviennent une proie facile aux recruteurs de terroristes. Il s'agit donc d'un cercle vertueux qui commence à se profiler, mais qui nécessite une large adhésion de tous les Tunisiens pour pouvoir sortir de ce bourbier au plus vite. L'Utica a proposé le délai d'une année, mais ce n'est qu'à titre indicatif. Car, en réalité, tout dépendra de l'enchaînement des faits suivant lequel se déroulera leur gestion, et surtout du degré d'implication des différentes composantes de la société. Ce qui retient l'attention à ce niveau est que l'organisation patronale, bien que suscitant l'adhésion des différentes organisations représentant le secteur privé, a fait cavalier seul, contrairement lors du processus de sauvetage politique mené par le Quartet. C'est une grande responsabilité que les patrons se mettent sur le dos, malgré l'importance du rôle de l'Ugtt, d'une part, et des acteurs politiques, d'autre part, dans la réinstauration d'une paix sociale durable et favorable justement à la relance politique. Il y a lieu de rappeler, à ce niveau, que certaines perturbations sociales, devenues cycliques d'ailleurs, relèvent purement de la manipulation politicienne et n'ont d'autre débouché que de semer le chaos qui ne profite à personne sauf à ceux qui ne peuvent se retrouver que dans l'anarchie. Le fait que ces perturbations soient cycliques est aussi bien rassurant qu'inquiétant. Rassurant, parce que tant qu'elles ne s'installent pas dans la durabilité, cela prouve qu'il s'agit d'un phénomène conjoncturel appelé à disparaître tôt ou tard. Et inquiétant car cela empêche l'économie de passer à la vitesse de croisière. Pourtant, la rentrée s'annonce encombrée de mesures économiques : loi de finances complémentaire, nouveau code d'investissement, réforme du système de compensation et promulgation de la loi sur le partenariat public privé...