Leur nombre, avant la révolution, n'excédait pas les 699. Il a atteint 2.237 pendant la période post-révolutionnaire La toxicomanie, la poly-toxicomanie et le recours aux psychotropes constituent de réels problèmes de santé publique aussi bien en Tunisie qu'à l'échelle internationale. Le cannabis représente la substance stupéfiante la plus utilisée par les usagers de drogue pour son prix nettement moindre par rapport aux autres drogues, comme l'héroïne, la cocaïne et l'ecstasy. En Tunisie, l'usage du cannabis a connu une importante évolution durant la période post-révolutionnaire. Une évolution favorisée, sans doute, par l'insécurité et les défaillances en matière de contrôle au niveau des frontières et de lutte contre le trafic et la contrebande. Aussi, le laboratoire de toxicologie du CHU Farhat Hached, à Sousse, s'est-il penché sur l'étude des saisies du cannabis sur les deux périodes, pré et post-révolutionnaires ; soit trois ans avant et après les évènements du 14 janvier. Cette étude a fait la une du récent numéro de la revue trimestrielle de la Société des sciences pharmaceutiques de Tunisie « Essaydali ». Le laboratoire de toxicologie a axé son travail d'analyse et d'étude sur 19.519 dossiers d'expertise de saisies dont 3.076 dossiers portent sur le cannabis. Il faut dire que la saisie de cannabis a connu un boom significatif après les évènements du 14 janvier 2011 puisqu'on passe de 232 saisies, en 2008, à 1096 saisies en 2014. Le nombre de saisies avant la révolution n'excédait pas les 699. Il a atteint 2.237 pendant la période post-révolutionnaire. Les saisies ont ainsi quintuplé au bout de six ans. Le cannabis saisi prend souvent la forme de préparations, ( résine de cannabis ); soit 596 saisies de résine sur un total de 699. L'on note, aussi, 25 mégots de cigarettes et 23 cigarettes roulées ou « joints ». Après la révolution, augmentation avec 1.891 pour la résine, 127 pour les mégots, 120 pour les joints, 47 saisies pour la plante en vrac ou ses éléments broyés ou non. Ce domaine illicite semble plus menaçant dans la mesure où les saisies sont plus importantes en quantités. Avant la révolution, elles consistaient en de petites quantités, destinées à l'usage personnel ou à celui d'un petit groupe, tout au plus. Après la révolution, la police, la garde nationale, la douane et les services pénitentiaires interceptent plus de réseaux de trafiquants qui sont spécialisés dans le trafic de grandes quantités de cannabis. L'évolution des saisies de cannabis reflète des mutations d'ordre social, démographique et sécuritaire. Le cannabis, vu au microscope ! Les drogues transférées au laboratoire prennent diverses formes. Les pharmacologues ont eu à analyser des végétaux comme la marijuana, des préparations de cannabis comme la résine ainsi que différents objets spécifiques à la préparation et à l'usage de ce stupéfiant, notamment des couteaux, des pipes et des narguilés. Le travail d'analyse comprend plusieurs examens spécifiques. L'examen botanique permet d'étudier les caractéristiques de la plante confisquée, notamment sa tige, ses feuilles et son fruit dit « akène ». L'examen microscopique s'impose, aussi, lorsqu'on doit analyser la plante, l'akène mais aussi les préparations suspectes, telles que la résine de cannabis, le tabac mélangé à des granulations suspectes ou encore le cannabis en poudre. Les pharmacologues ont, également, usé d'autres méthodes analytiques, notamment le recours aux substances chimiques comme le Diortho-aniside tétraazoté qui, via une réaction chimique, permet de déceler le cannabis par une coloration rouge violacée, la chromatographie qui détecte le stupéfiant grâce aux UV. Les jeunes s'y mettent davantage La cartographie des saisies avant la révolution plaçait le gouvernorat de Sousse en tête de liste avec 46% des saisies. Il était suivi de Kasserine ( 19,5% ) et de Kairouan ( 13,9% ). Après la révolution, l'on retrouve la même classification mais à quelques différences près. La contribution du gouvernorat de Sousse aux saisies du cannabis a connu une nette évolution. La région de Sfax représente 13,7% des saisies et Kasserine 11,7%. L'étude montre, par ailleurs, l'augmentation du nombre de saisies provenant du Sud et en particulier de Médenine et de Gafsa avec respectivement 11,4% et 8,3%. Ce qui est encore plus alarmant, c'est que le profil des usagers de drogues et de cannabis en particulier a changé au fil des six dernières années, gagnant ainsi du terrain auprès de la catégorie jeune. Avant, les usagers de cannabis étaient, majoritairement, des hommes âgés entre 30 et 40 ans. Après la révolution, c'est la tranche d'âge 20/ 30 ans qui en est la plus concernée. Pis encore, des saisies de cannabis ont été effectuées auprès de 49 jeunes âgés de moins de 20 ans.Plus de 45 femmes ont été interceptées comme possédant ou usant de cannabis.