Journée de colère à Sousse, région la plus touchée. Le département de tutelle envisage l'octroi d'une indemnité mensuelle de deux cents dinars sur six mois, en attendant que la situation s'améliore. RIU Hôtels § Resorts quitte définitivement la Tunisie Journée de colère, hier, à Sousse, décrétée par des dizaines d'employés d'unités hôtelières qui ont fini par poser la clé sous le paillasson, donnant ainsi écho à une région sinistrée par les effets dévastateurs de l'attentat meurtrier du 26 juin dernier. Un mouvement de protestation initié par près de 1.600 salariés inquiets, car désormais sous la coupe du chômage technique et de lendemains incertains. La crise lancinante, qui frappe tout le secteur touristique et qui laisse présager de probables nouvelles protestations dans d'autres villes et de nouvelles tensions, annonce des journées difficiles autant pour les employés et les professionnels du tourisme que pour les autorités de tutelle, qui sont appelées à désamorcer à temps la bombe sociale et trouver des solutions aussi bien pour les hôteliers qui plient bagages et ferment leurs unités hôtelières que pour leurs employés, agents et cadres en proie au désarroi. Les Tunisiens vont ainsi devoir faire face à une véritable crise dont l'issue ne dépendra pas que de la volonté politique ou des moyens dont dispose l'Etat tunisien. Le coup de massue porté par le drame d'El Kantaoui a été fatal pour le secteur du tourisme qui, dans son ensemble, agonise depuis 2011 en subissant les affres aussi bien du terrorisme que de toutes les crises, économiques et sociales. Les événements de 2010-2011, la houleuse et dangereuse phase de transition politique, puis les deux attentats meurtriers du Bardo et de Sousse, respectivement au printemps et début de l'été 2015, ont eu raison de ce secteur économique stratégique qui, il n'y a pas si longtemps, pesait 7% du PIB, fournissait près de 400 mille emplois directs et indirects et couvrait 56% du déficit de la balance commerciale. Sans oublier son effet d'entraînement sur les domaines économiques attenants comme le transport aérien, les métiers para-touristiques et autres. Indemnité de 200 dinars et stage La question de la mise au chômage technique des salariés des unités hôtelières, qui baissent le rideau les unes après les autres, est à l'ordre du jour du département de tutelle, lequel étudie des mesures alternatives afin de parer au plus urgent. Un répertoire des hôtels qui ont fermé leurs portes est en cours d'actualisation et on parle déjà de 55 unités hors circuit. La solution déjà envisagée réside dans l'application de la loi relative au chômage technique qui se base sur l'octroi au salarié au chômage technique d'une indemnité mensuelle de 200 dinars pendant six mois renouvelables une fois, en attendant la reprise de l'emploi ou autre. L'octroi de cette prime obéit toutefois à une condition, celle de suivre un stage de formation dans les écoles spécialisées de l'Etat. Cette formation devant à terme faciliter la réinsertion du salarié dans le marché de l'emploi. Une alternative qui ne remplace pas certes l'emploi initial mais qui peut ouvrir, si nécessaire, des horizons. En attendant, les derniers touristes maghrébins, surtout algériens, maintiennent encore ouvertes, tant bien que mal, les dernières unités hôtelières qui résistent et qui n'ont pas encore baissé le rideau. Cela ne saurait d'ailleurs tarder. L'arrière-saison s'annonce morose. Après Djerba, zarzis, Sousse, Hammamet, Monastir, Mahdia, Tozeur...la fièvre de la fermeture n'a épargné aucune région, aucune catégorie d'hôtels. La dernière mauvaise nouvelle concerne le leader du tourisme mondial : la chaîne espagnole RIU Hôtels § resorts, qui compte 9 hôtels en Tunisie dont l'Imperial Marhaba, scène de l'attentat d'El Kantaoui du 18 juin 2015, a annoncé hier sa décision de quitter la Tunisie. RIU avait déjà quitté le pays une première fois, mais est finalement revenue en mai dernier pour s'installer à Djerba. Le retour n'aura pas duré longtemps, les responsables de la chaîne espagnole auraient affirmé, selon Destination tunisie.info, vouloir quitter définitivement la Tunisie afin de préserver la notoriété internationale du label RIU. Mesures de sauvetage Après la polémique déclenchée par les mesures de sauvetage proposées par la ministre du Tourisme à l'intention des hôteliers et du secteur dans son ensemble, après l'attentat de Sousse, un geste qui a été fort contesté par l'Ugtt et par des partis politiques, la sortie de crise semble difficile. Pourtant il faudra y arriver car l'effet dévastateur de la faillite du secteur touristique n'échappe à personne. En parlant de crise économique et sociale, celle que traverse le secteur touristique est sans doute la plus parlante et la plus grave. C'est pourquoi, mieux vaut rediscuter et réexaminer ces mesures puisque le principe était de maintenir les salariés à leurs postes, sinon au moins la moitié d'entre eux, en attendant un retour de manivelle dans le bon sens, c'est-à-dire dans le sens de la reprise. Sinon, trouver d'autres solutions au plus vite pour contenir la vague de la colère. S'il y a un enseignement à tirer de la succession de crises, l'une plus grave que l'autre, que vivent les Tunisiens c'est d'apprendre à gérer les problèmes par le dialogue, de parler en termes de responsabilité collective face aux problèmes nationaux et de mettre au devant de toutes les considérations l'intérêt général, celui de tous les Tunisiens.