Par Abdelhamid Gmati La Tunisie est méconnaissable. Outre les chiffres nationaux, pratiquement tous au rouge, voici que des organisations internationales nous livrent leurs rapports. Dans son dernier rapport évaluant la compétitivité, le Forum de Davos classe la Tunisie au 92e rang sur 140 pays, avec un indice de 3,9. Une dégradation continue : en 2013 notre pays était classé au 83e rang et au 87, en 2014. En principe, cela devrait inquiéter tous les acteurs économiques, mais il n'y a eu aucune réaction notable. De plus, il semble qu'il n'est pas bon de vivre à Tunis. C'est la revue anglaise «The Economist » qui classe la ville de Tunis à la 4ème place des villes les moins vivables, juste derrière la ville syrienne de Damas, la ville Kiev, la ville libyenne de Tripoli. La position de la Tunisie est expliquée dans ce rapport par «les troubles civils, des actes de terreur et de violence ont déclenché la baisse de la stabilité dans le monde entier». Cependant, et selon un récent rapport du Congrès américain, la Tunisie est le premier exportateur de terroristes dans le conflit qui se déroule en Iraq et en Syrie. Rien de bien réjouissant. Selon les experts, cette situation peu enviable est due, en partie, à la montée du terrorisme, mais essentiellement au climat social qui a résulté de la révolution. Une sorte de gabegie s'est instaurée avec une pléthore de revendications effrénées accumulant des grèves à répétitions touchant tous les secteurs. Des grèves qui ont fortement affecté l'économie tunisienne. Depuis les longues crises bloquant la production de phosphate, jusqu'à celles des enseignants en passant par celles du transport public. Et voici que cela continue avec cette grève de trois jours qui vise à priver de carburants les automobilistes et tous les transporteurs routiers, c'est-à-dire que les activités habituelles seront bloquées et que les travailleurs et les écoliers et lycéens seront ainsi sanctionnés. Déjà les stations d'essence et les divers points de vente sont pris d'assaut. Seule la Sndp, agissant en société citoyenne, assurera, pendant les journées de la grève du personnel des sociétés de transport des carburants, le ravitaillement de ses différents points de vente, Agil, et ce, par sa propre flotte de camions citernes. Ces mouvements de contestation continue sont significatifs d'une certaine mentalité. Celle de vouloir imposer sa volonté et «d'arracher» coûte que coûte des augmentations de salaires, des avantages et des promotions, en procédant par des menaces et des arrêts de travail. Peu importe la situation économique du pays. Le gouvernement a cédé à plusieurs reprises, puisant dans les dettes, ses caisses étant vides. Il n'en va pas de même pour le secteur privé, la situation des entreprises étant déplorable. 65 entreprises ont fermé leurs portes en 2015 et elles étaient 41 à le faire en 2014. Ce qui a engendré une série de licenciements. A-t-on oublié que la principale revendication de la révolution était justement le travail ? Or, le taux de chômage a enregistré, au cours du deuxième trimestre de 2015, une légère hausse de 0,2%, par rapport au premier trimestre 2015, passant de 15% à 15,2%. Ainsi, le nombre de chômeurs s'établit à 605.100 alors que le total de la population active est estimé à 3.991.400. Les syndicats, ou du moins certains d'entre eux, n'en ont cure. Pour eux, il s'agit de s'imposer et de revendiquer à l'infini. A titre d'exemple, les enseignants du primaire ont obtenu trois promotions exceptionnelles, et ce, jusqu'en 2019. Les syndicats ne parlent jamais de travail, de production ni de productivité. Faut-il rappeler que les syndicalistes sont des travailleurs ; c'est-à-dire que leur raison d'être est le travail et que les salaires rétribuent ce travail, que les augmentations récompensent la production et les promotions sont liées à la productivité. Il est déplorable de constater cette mentalité. Je ne travaille pas, je traîne, je m'absente, mais il faut me payer à ne rien faire. Et aussi il faut augmenter, régulièrement, mon salaire et m'octroyer des promotions pour les années à venir, sans avoir à les justifier. Ce ne sont plus des travailleurs, mais des assistés sociaux. Pourquoi ne pas en profiter puisque l'Etat providence est toujours là ?