En Tunisie, le taux d'endettement extérieur est de plus de 53% du PIB. Or, dans le domaine empirique, un taux de 35% est déjà considéré comme à haut risque. Il n'est pas difficile d'en tirer les conclusions Pour Slim Chaker, ministre des Finances, la situation du pays semble beaucoup plus dramatique qu'on le pensait. Un constat qu'il a bien confirmé lors du sommet de Reuters pour l'investissement au Moyen-Orient. Selon lui, l'économie nationale saigne à blanc. Elle est en pleine hémorragie financière, et elle risque d'être victime, d'ici peu, d'un véritable tsunami. Un diagnostic quelque peu sévère, trop pessimiste, sinon exagéré. Surprenant même. Certes, le soulèvement du peuple tunisien a fini par affecter sérieusement tous les fondamentaux de l'économie nationale et tarir toutes nos ressources financières. Mais on reconnaît, toutefois, que depuis quelque temps notre économie émet des signes rassurants, surtout que l'appareil de production, resté grippé longtemps, a commencé à retrouver un certain rythme, les investissements étrangers, notamment en portefeuille, à s'améliorer progressivement, et certains secteurs stratégiques, l'agriculture et l'énergie notamment, à bien se comporter. Ce n'est apparemment pas l'avis du ministre des Finances. Justement, il estime que le soutien et l'élan de solidarité de la communauté internationale n'ont pas été capitalisés. Car, les instances internationales et les grandes nations ont failli à leurs engagements, ce qui a totalement bouleversé nos plans de relance et de redressement. Il affirme que l'aide étrangère s'est limitée jusque-là au volet sécuritaire et notamment à la lutte contre le terrorisme. Cette négligence de la communauté internationale a été ainsi largement pénalisante. Et elle risque de le devenir encore plus. De ce fait, les puissances étrangères doivent revoir leur position, réagir vite et surtout prendre en charge, sur cinq ans, le programme de sauvetage de l'économie nationale évalué à 25 milliards de dollars. D'ailleurs, le ministre des Finances évoque la possibilité de recourir à un nouveau crédit du FMI de l'ordre de 2 milliards de dinars. La revalorisation des ressources financières d'abord Une telle éventualité a été toutefois reçue avec beaucoup de réserves en raison notamment d'un taux d'endettement extérieur déjà trop élevé et une capacité de remboursement très affaiblie. Et à partir de 2017, ce constat devrait s'aggraver encore davantage, puisque notre pays est appelé à entamer le remboursement de ses nouveaux crédits. Et le tableau serait beaucoup plus sombre si l'on tenait compte de la dette des entreprises publiques estimée à plus de 4 milliards de dinars. Autant d'implications graves et qui justifient l'inquiétude des experts économiques et financiers, qui rappellent que l'endettement étranger est une menace sérieuse pour la pérennité de toute économie. Ils reconnaissent en effet que les crédits extérieurs et notamment leur taux d'intérêt très élevé ont toujours constitué un handicap majeur pour la politique de développement national, notamment en termes d'investissement et de création de richesses. Cela est d'autant plus vrai que depuis quelque temps, les emprunts sont orientés en grande partie vers les dépenses de fonctionnement. Et même si le budget 2016 projette de réduire sensiblement les dépenses de fonctionnement, il n'en est pas moins sûr qu'on tirerait profit, puisque les ressources seront les mêmes. Cela est d'autant plus vrai que notre principal atout, la fiscalité, n'est pas encore au point, faute de rigueur, de transparence et d'efficacité. Le niveau d'évasion et de fraude en témoigne clairement. Aujourd'hui, n'en déplaise à notre ministre des Finances, l'Etat doit absolument trouver les parades nécessaires pour maîtriser, sinon limiter ses dettes extérieures. Car dans le domaine empirique, toute dette extérieure dépassant les 35% du PIB devient une véritable menace pour la croissance économique. Or, en Tunisie, ce taux est de plus de 53%, et il devrait se situer aux alentours de 60% d'ici peu. Il n'est pas difficile donc d'en tirer les conséquences.