Avec Simshar, le cinéma maltais signe son premier film «industriel» avec Lotfi Abdelli en tête d'affiche. Dans un pays comme Malte dont la population ne dépasse pas les 400.000 habitants, il est très difficile de parler d'industrie cinématographique. Mais voici qu'on assiste à la sortie d'un film maltais sur nos écrans, une sortie justifiée par le fait que la tête d'affiche de ce long métrage de fiction n'est autre que Lotfi Abdelli. Simshar est le premier long métrage de la réalisatrice maltaise Rébécca Cremona et où le fond maltais du film a pesé de tout son poids. Ce qui est visible dans ce film c'est que la production n ‘a pas lésiné sur les moyens pour donner au cinéma maltais sa première grande production et c'est tant mieux ! Un fonds maltais qui a su sur quel type de réalisateur miser car il ne s'agit plus désormais de miser sur «l'auteurisme» ou «l'expérimentalisme» pour mettre le cinéma d'un pays en avant. En fait, la réalisatrice maltaise a fait des études de cinéma à Los Angeles et a travaillé sur les plus grosses productions hollywoodiennes dans des postes clés. Résultat : elle connaît bien les ingrédients nécessaires à un bon film. Dans Simshar, même si elle s'abandonne parfois à une lenteur trop méditerranéenne, elle repêche vite son spectateur et le remet dans le plat. Rébécca Cremona traite de deux thèmes à la fois : d'un côté, l'histoire vraie d'une famille de pêcheurs maltais qui a perdu deux de ses membres lors d'un accident de pêche et, de l'autre, le drame des réfugiés clandestins qui arrivent par milliers sur les côtes de l'Italie à Lampedusa et sur les côtes maltaises. Un film tiré de la réalité mais qui a nécessité un retour sur les deux événements car il y a eu presque un incident diplomatique entre l'Italie et Malte en 2008 à cause de ces clandestins naufragés dont personne ne voulait et que l'Etat maltais a recueillis malgré la colère persistante de sa population. Ce sont ces deux drames qui ont conduit le film pendant plus d'une heure et demie où on a adhéré à l'idée que le droit international doit être revu puisqu'il criminalise le sauvetage des immigrés clandestins. Le combat des membres de la famille maltaise pour survivre pendant des jours en mer après la destruction de leur embarcation par le feu est aussi un moment touchant dans le film. On reprochera peut-être à ce film son montage qui ne rapproche pas assez les deux drames l'un de l'autre afin d'accentuer la tension dramatique que la réalisatrice cherche à créer. Bien entendu, les Tunisiens ne se seraient jamais déplacés pour aller découvrir un film maltais s'il n'y avait pas le nom de Lotfi Abdelli en tête d'affiche. Un rôle que notre acteur national a campé avec beaucoup de professionnalisme et de patience car il s'agit du premier rôle de ce film, en d'autre termes il s'agit de l'acteur qui porte le plus de poids sur ses épaules. Et il s'en est sorti avec brio car il est rentré directement dans la composition d'un personnage tout à fait étranger par rapport à ce qu'il a l'habitude de faire tout en restant ferme sur ses jambes. Il faut dire que l'univers méditerranéen ne lui est pas étranger et qu'il semble avoir interprété ce rôle en étant convaincu par cette cause humanitaire qui fait l'actualité de tous les temps.