Les souvenirs remontent à des images d'enfance exprimant la beauté tranquille de la nature ainsi que la beauté des âmes humaines. Oka ou «Notre maison», dernier-né du cinéaste malien Souleymane Cissé, concourt pour le Tanit d'or dans la compétition officielle. Ce film documentaire très «perso» se décline dans un va-et-vient entre le passé et le présent, racontant un déni de justice vécu par les quatre sœurs du cinéaste malien qui est une figure emblématique du cinéma africain. Personnage central du film, cette maison a abrité plusieurs générations de la famille d'un artiste à Bamako. Représentant les racines et les liens d'attaches familiaux, lieu des souvenirs et de la mémoire, cette demeure voit ses propriétaires, des femmes âgées expulsées en 2008, en dépit du droit. Au fil des scènes, les sœurs du réalisateur témoignent dignement et dénoncent cette histoire d'expropriation complexe et compliquée sur fond de corruption, de violence et d'injustice. Entre passé qu'il explore avec tendresse et nostalgie, et présent qu'il dénonce fermement, le film s'égrène. Les souvenirs remontent à des images d'enfance exprimant la beauté tranquille de la nature ainsi que la beauté des âmes humaines, mais aussi la quiétude, la paix, la tolérance, l'espoir et l'amour pour ses sœurs qui l'ont éduqué et aimé. Le passé, magnifié et transcendé, est opposé au présent détesté et détestable, car marqué par l'injustice, les crises politiques et immobilières, la violence, le désespoir et le manque de dignité. L'auteur-réalisateur de Yeelen (La lumière), récompensé par le Prix spécial du jury de Cannes, mène, ici, un combat pour qu'éclate la vérité. Pour cela, il prend la parole en voix off pour montrer, dénoncer et prévenir contre les lendemains incertains et difficiles et un présent brumeux, marqué par la guerre et l'injustice, au mépris des traditions de tolérance ancestrales. La crise immobilière, selon Cissé, «est la future bombe à retardement qui menace le Mali et qui pourrait se terminer par une guerre si tous les litiges ne sont pas résolus en toute justice». Or, les méandres de la justice corrompue sont complexes et pesants, c'est pourquoi Cissé lance un cri d'alarme, en utilisant le cinéma, afin d'éviter, à ses yeux, la future guerre de l'immobilier. Pour cela, il oppose la force tranquille et la quiétude du passé, à travers des scènes filmant ce petit enfant, qu'il était, en parfaite symbiose avec la nature, dont ces arbres imposants représentent ses racines. Dans Oka cissé suggère un retour aux valeurs du passé pour améliorer le présent.