Par Mahmoud HOSNI Le réveil a été brusque, et même douloureux, au lendemain de l'attentat de mardi dernier, pour un double motif. L'attaque a été perpétrée au cœur de la capitale et, de plus, elle a visé un symbole de l'Etat : la garde présidentielle. Un réveil triste et même très douloureux. Car, dirigeants tout autant que citoyens ont eu, enfin, la preuve concrète que le terrorisme — violent et aveugle — peut frapper n'importe où et n'importe quand et que la capitale, tout autant que les autres villes — et même le rif — ne sont pas à l'abri. Une batterie de décisions et de mesures prises par le président de la République, le chef du gouvernement, le Conseil national de la sécurité et certains ministères dénote, enfin, une prise de conscience réelle de la menace terroriste et aussi de ses sources et de ses terreaux. Il y a d'abord la fermeture des frontières avec la Libye — et à laquelle la presse a incité les autorités depuis des mois — source d'approvisionnement d'armes, de terroristes et de trafic illicite en tous genres, qui vient même tardivement et dont il faut prolonger le maintien. Il y a ensuite le degré de vigilance et de surveillance, qui non seulement n'a pas été généralisé, mais n'a pas été hissé à un niveau qui permet de déceler les moindres velléités des terroristes. C'est en quelque sorte un électrochoc que constitue l'attentat du 24 novembre 2015 : le gouvernement se décide enfin à prendre le taureau par les cornes et à affronter le terrorisme jusque dans ses retranchements, en débusquant les cellules dormantes, en pourchassant tous ses éléments, en effectuant des descentes dans tous les lieux suspects, en décidant d'assigner à résidence tous leurs éléments de retour des foyers de Daech, bref en défaisant toute la pelote. Sur un autre plan, le gouvernement s'est enfin tourné vers toutes les régions de l'intérieur confrontées à la fois à la menace terroriste et à la pauvreté pour les doter des commodités nécessaires et créer des emplois. Or, il s'agit d'une mesure qui aurait dû être prise bien avant, dès l'apparition des premiers signes de l'épidémie terroriste, et même sans cette menace, car s'agissant de localités oubliées depuis l'indépendance et n'ayant presque pas bénéficié des fruits du développement. Il y a aussi la responsabilité des partis politiques et des gouvernements successifs qui n'ont nullement cherché à faire participer la jeunesse ni à concevoir des stratégies de mobilisation et d'emploi en sa faveur. Si bien que celle-ci a fini par se jeter — et mourir — dans les aventures de l'émigration clandestine ou, pour une autre partie, dans les bras du terrorisme. C'était l'alternative du désespoir, d'une jeunesse qui ne voyait pas le bout du tunnel. Dès lors, l'on peut estimer que la transition démocratique n'a que trop duré et qu'il est temps de passer à l'action véritable, à la realpolitik, à une stratégie qui accorde la priorité aux dossiers les plus brûlants : chômage et équité du développement régional. Car, jusqu'ici, le gouvernement, en annonçant chaque fois des mesures en faveur des régions et qui nous rappellent tristement celles des temps révolus, nous donne l'impression d'un gouvernement qui travaille pour le moyen et le long termes, qui est installé dans la durée et qui, plus est, gouverne dans la paix et la stabilité, sans cette menace réelle et permanente du terrorisme. Or, le pays n'a pas besoin d'actions à moyen ou long terme, ni d'antalgiques ni de saupoudrage, mais d'un véritable remède de cheval, c'est-à-dire d'actions immédiates, à l'image de l'infrastructure, comme construire deux ou trois axes autoroutiers pour désenclaver les régions les moins favorisées. Mais il s'agit aussi pour les pays de l'Occident, qui combattent le terrorisme, au même titre que la Tunisie, de ne pas se limiter aux gestes traditionnels de compassion et de soutien total, mais de concrétiser ce soutien par la fourniture d'équipements et de matériel à notre armée et à nos forces de sécurité, à même de mieux affronter le terrorisme. Sur le front intérieur, partis politiques, société civile et citoyens sont tenus de traduire cette solidarité, ce front uni contre le fléau maléfique en souscrivant simplement au fonds de soutien aux forces armées et de sécurité, plutôt que d'appeler à une conférence sur le terrorisme qui ne débouchera que sur un débat byzantin et sans effet réel. Car le terrorisme doit être combattu avant tout sur le terrain.