En suivant Moncef Dhouib, notre visite se déroule comme un plan-séquence d'un film italien. Le décor, le naturel du personnage et la fraîcheur des dialogues, tout y est. Au Kram, dans un coin de rue qui débouche sur l'avenue Habib- Bourguiba, se trouve désormais un cinéma de quartier, le Cinévog. Lieu à l'architecture coloniale majestueuse et imposante, impossible à rater, il nous accueille de loin, avec sa couleur blanche éclatante. Arrivés devant la salle, nous découvrons Moncef Dhouib en train de superviser les dernières touches de la façade. C'est à lui, cinéaste et homme de théâtre, que le Cinévog doit sa renaissance. Après deux ans de travaux, où seuls les fonds propres et les dons d'associations et d'habitants du quartier ont contribué, le vieux Cinévog — né en 1948 parmi la famille italienne Lombardo et fermé depuis des décennies —, entame sa nouvelle vie d'espace culturel autour de la salle de cinéma, célèbre parmi les habitants du Kram, surtout dans les années 50 et 60. En suivant Moncef Dhouib, notre visite se déroule comme un plan-séquence d'un film italien. Le décor, le naturel du personnage et la fraîcheur des dialogues, tout y est. Une fois le seuil franchi, la porte d'entrée donne sur un espace dominé par les deux appareils de projection, le ventilo et des bobines du vieux Cinévog, placées là pour la mémoire du lieu. La salle suivante, future galerie d'exposition, est dans le même esprit. Elle accueille pour le moment des photographies témoignant de l'état de la salle pendant sa rénovation. De là, et sur les explications de Moncef Dhouib, une porte nous mène dans une cour ornée de plantes, qui sépare ce premier bâtiment de la salle de cinéma. Une autre porte nous y introduit pour se retrouver dans un lieu aux couleurs pastel, des chaises aux lampes. Ses murs gris clair accueilleront une cafétéria où se rassembleront les habitués du lieu autour d'une boisson, ou en attendant le film. Sur l'un des murs, des posters des ateliers qui ont lieu au Cinévog. «C'est un espace culturel de proximité et les ateliers y contribuent de manière importante», nous déclare Moncef Dhouib. Les ateliers de théâtre pour enfants et adultes par Leïla Toubel et Dali Dammak, l'atelier de chant avec Hassen Doss et de cinéma avec Moncef Dhouib sont déjà complets, avec une quinzaine de participants chacun. Dans ce rêve adopté par tout le quartier, il y a aussi la part de l'artiste. Avant de nous parler de ses projets personnels, il nous raconte l'accueil merveilleux des habitants du Kram pour le Cinévog, ce nouveau voisin dont les portes leur sont ouvertes. «Certains étaient dans la découverte, d'autres émus et nostalgiques face à ce lieu qui a bercé leur enfance, où ils ont connu leurs femmes», décrit-il. Et d'ajouter: «Nous misons sur la programmation pour les fidéliser». Le Cinévog a ouvert ses portes la veille des journées cinématographiques de Carthage. Dans un mois, l'espace va lancer son activité théâtrale, nous apprend Moncef Dhouib. «Le théâtre, c'est mon dada. Il aura la part la plus importante», annonce-t-il. Le metteur en scène va y présenter son prochain spectacle. Pour l'inauguration, il va programmer des pièces qui font l'actualité. L'événement sera baptisé «Théâtre en vogue». Sans transition, on reparle de la salle de cinéma qui accueille un cycle du film tunisien Les frontières du ciel, réalisé par Fares Nanaa. Cinéclub tous les vendredis et des films pour enfants le week-end, nous apprend-on également. «Nous avons le meilleur son et le projecteur numérique le plus performant de toute la Tunisie», nous dit fièrement Moncef Dhouib, avant de nous saluer pour rattraper un rendez-vous. Lilia Ben Achour, chargée de programmation du Cinévog acquiesce. Elle prend la relève pour nous faire visiter la pièce maîtresse du lieu: la salle de cinéma. Et qu'elle est belle avec ses 400 chaises authentiques remises à neuf, son écran mobile sur une scène de huit mètres de profondeur et son toit ouvrant, propice à des projections à la belle étoile. Un lieu plein de charme, qui fait de la culture la cerise sur le gâteau de la vie du quartier. A visiter d'urgence!