L'Organisation tunisienne de la défense des droits des personnes handicapées exigera l'embauche d'une personne handicapée sur cinquante recrutés. La restructuration postrévolutionnaire de la politique générale promettait de rétablir la justice sociale et de compenser les catégories vulnérables et marginalisées en les dotant enfin de leurs droits de citoyens à part entière. Cinq ans après la révolution des jasmins et à l'aube de l'ère démocratique, les catégories vulnérables continuent à vivre quasiment les mêmes nuisances. Les personnes en situation de handicap ont bataillé dur pour rappeler l'Etat à ses responsabilités et constitutionnaliser sa redevance en matière de protection et de promotion des personnes en situation de handicap. Certes, de notables pas ont été franchis dans ce sens. Toutefois, la mise en application des principes de l'égalité des chances et de la justice sociale se fait lente car, contrecarrée par les persistantes défaillances des politiques générales, soit la politique sanitaire, éducative, culturelle, administrative, professionnelle, etc. Ces politiques forment une chaîne continue, ponctuée hélas par des lacunes qui jouent au détriment des handicapées. Pour attirer l'attention sur ce point crucial, responsable de l'intégration ou de l'exclusion des personnes en situation de handicap dans la société, l'Organisation tunisienne pour la défense des droits des personnes handicapées a organisé mardi dernier, avec la participation de l'association Handicap International, une conférence de presse sur la concrétisation des droits des personnes handicapées et leur intégration effective dans tous les secteurs. Mme Bouraouia Agerbi, présidente de l'Organisation, a indiqué que l'objectif de cette rencontre consiste à révéler les problèmes pour y trouver les solutions appropriées. «Pour réussir l'intégration effective des personnes handicapées, il est nécessaire d'intervenir au niveau de l'infrastructure de base et de l'aménager en fonction des différents besoins spécifiques aux personnes handicapées », a-t-elle souligné. Elle a rappelé que l'Organisation, appuyée par d'autres ONG, a bataillé dur afin de constitutionnaliser les droits des personnes handicapées, d'imposer leur droit à l'intégration inconditionnée et de faire reconnaître leur mérite en tant qu'acteurs au développement. Parmi les démarches entreprises, Mme Agerbi cite le Protocole de Tunisie sur les droits des personnes handicapées, auquel ont adhéré maintes organisations nationales et internationales dont la Ligue tunisienne de soutien aux droits des personnes handicapées, le Forum tunisien pour l'autonomisation des jeunes, l'association «voix du sourd» de Tunisie, le bureau des Nations unies pour les droits de l'Homme, etc. «Ce protocole reste jusqu'à nos jour inexploité. Nous lançons, d'ailleurs, un appel insistant pour inciter les parties concernées à la mise en application des recommandations formulées dans ce document dans les politiques générales, et ce, à partir de 2016», a –t-elle ajouté. Une commission spécifique dans chaque ministère Les personnes en situation de handicap ont réussi, aussi, à inciter le gouvernement à la création d'un secrétariat d'Etat, lequel sera chargé des affaires des personnes handicapées. Ce qui fut. «Cette institution permet la coordination entre l'Etat et la société civile et, par conséquent, entre l'Etat et les personnes handicapées. Une lourde tâche qui serait tellement allégée grâce à l'instauration d'une commission spéciale pour les personnes handicapées dans chaque ministère. Chaque commission rédigerait des rapports détaillés qui seront, par la suite, remis au secrétariat d'Etat pour une meilleure connaissance des problèmes, des difficultés que vivent les personnes handicapées, pour cerner leurs besoins et pour le suivi de l'avancement des éventuels projets pour l'intégration des personnes handicapées», a expliqué Mme Agerbi. Participer au développement local D'un autre côté, la représentativité des personnes handicapées dans les conseils ministériels s'avère être un acquis. Il sera suivi d'une commission spécifique des personnes handicapées dans le conseil des députés du peuple. C'est du moins ce à quoi aspirent les membres de l'Organisation. L'oratrice a plaidé pour l'intégration des personnes handicapées dans la vie politique, par le biais évidemment du scrutin municipal mais aussi à travers l'implication des handicapés dans les programmes de développement local. Mme Agerbi a appelé les personnes handicapées à revendiquer leur droit de citoyenneté. Un droit qui ne peut être acquis sans la promotion de l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. «Nous allons proposer un nouveau quota, nettement plus ambitieux que le 1% : sur cinquante personnes recrutées une personne handicapée. La promotion de l'insertion professionnelle des personnes handicapées constitue un atout pour l'entreprise. Les personnes handicapées sont réputées pour leur sens du perfectionnement, de l'assiduité, de la ponctualité. Ce sont des compétences confirmées. Je cite à titre indicatif Mme Lobna Smida, qui, souffrant d'une paralysie partielle, a assuré avec brio sa mission de conseillère à la Présidence. Mme Dorra Ouali souffre d'un handicap moteur. Ce qui ne l'a pas empêché de devenir professeur en sciences juridiques et de servir ainsi son pays», ajoute l'oratrice. La maman d'un enfant handicapé a attiré l'attention de l'assistance sur l'impératif d'instaurer un Observatoire national des personnes handicapées : une institution qui permettrait d'orienter les personnes handicapées ainsi que les parents des enfants handicapés et de recueillir les éventuelles dénonciations et abus.