En Tunisie, la paralysie politique fait obstacle aux réformes économiques indispensables pour une véritable relance. Depuis plus d'une décennie, le modèle économique tunisien s'essouffle de plus en plus malgré les nombreuses promesses de réforme. Une réforme qui n'a que trop tardé. L'instabilité politique, sociale et sécuritaire ainsi que la crise sanitaire ont concouru à maintenir le statu quo, entravant la capacité du gouvernement à prendre les mesures idoines pour entamer le programme des réformes économiques. Nous sommes aujourd'hui face à une réalité financière amère qui n'a pu freiner le niveau élevé de dépenses publiques des dix dernières années, mais a plutôt vidé les caisses de l'Etat et augmenté le déficit. La crise économique s'est greffée aux tensions sociales qui n'ont pas permis d'atténuer les problèmes de fond, bien que les gouvernements successifs aient tracé les contours d'un programme plus large de relance économique et d'une stratégie de réforme globale. A terme, l'exécutif s'est contenté d'apporter de petits ajustements techniques à sa politique économique pour surmonter les bouleversements politiques et les troubles sociaux majeurs, faire face à un environnement économique très volatil et répondre aux attentes des citoyens. Prudemment et sans grande cohérence, les gouvernements reconnaissaient la crise et introduisaient de timides mesures avec une réponse superficielle à une crise ardue. Ils ont eu ainsi tendance à sous-estimer ou à masquer des données économiques inquiétantes, en l'occurrence l'état des finances publiques et la manière dont l'argent public est dépensé. La dernière décennie a laissé un héritage complexe en Tunisie. Le pays était sous la pression continue des dettes extérieures croissantes qui n'étaient pas désormais sans danger. A l'évidence, la réforme profonde dont le pays a besoin nécessite une ouverture stratégique tant vis-à-vis de l'étranger qu'au sein même du pays, pour permettre à divers acteurs économiques, politiques et sociétaux de participer à la construction d'un nouveau modèle pouvant assurer à la fois stabilité et croissance. Les négociations avec le FMI et la Banque mondiale entamées, depuis lundi dernier, se penchent également sur l'état de l'économie nationale et les signes de sortie de la crise financière et de reprise économique, dans un contexte jugé fragile, compte tenu de la dégradation de la situation épidémiologique. La Tunisie ne s'est pas rangée, cette fois-ci, à l'orthodoxie économique prônée par le Fonds monétaire international. Le gouvernement est parti en négociations avec le FMI sur la base de projets de réforme, a déclaré Ali Kooli, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Appui à l'investissement. Au terme du 4e round des consultations de Beit Al Hikma, organisé par la Présidence du gouvernement, le ministre a fait état d'une «nouvelle et meilleure stratégie de négociation avec le FMI qu'il qualifie de «différente» des précédentes négociations avec ladite institution. Le ministre estime que la Tunisie entame la relance des relations avec le FMI, avec une volonté sincère et une détermination forte à aboutir à un nouvel accord. C'est ce que le Chef du gouvernement, Hichem Mechichi, a affirmé à l'agence Reuters, précisant que « la Tunisie recherchera un programme de prêt de 4 milliards de dollars auprès du Fonds monétaire international (FMI) lors des négociations ». Les politiciens et les partenaires sociaux devraient être eux aussi unis pour permettre au gouvernement de saisir cette «dernière chance» de sauver l'économie. «Tous les efforts doivent être unifiés en Tunisie, car nous considérons que nous avons atteint la dernière opportunité et nous devons l'utiliser pour sauver l'économie ». En somme, la signature d'un programme avec le FMI n'est plus un choix pour la Tunisie. Au-delà du fait qu'il nous donne accès à des crédits à taux réduits, « c'est devenu une exigence de la plupart des partenaires internationaux et aussi une condition d'accès aux marchés. Je suis aussi contre un nouvel emprunt sans réformes structurelles. Sans réformes, nous allons augmenter l'endettement et hypothéquer davantage notre souveraineté. Le programme de réforme doit être avant tout pour notre pays avant qu'il ne serve pour négocier avec des partenaires», estime Nizar Yaiche, ancien ministre des Finances.