Banalisée, la violence prend des proportions de plus en plus inquiétantes au sein de la société La violence est définie comme le fait d'agir sur quelqu'un contre son gré en utilisant la force. Qu'elle soit violence physique, verbale ou même psychologique, elle est liée, en effet, au respect des droits de l'Homme. En Tunisie, comme partout dans le monde d'ailleurs, ce phénomène gagne de plus en plus de l'ampleur à cause, entre autres, de la montée de l'individualisme, l'émergence des nouvelles technologies et des réseaux sociaux et certaines autres transformations qu'ont connues les sociétés modernes. On observe, d'ailleurs, plusieurs formes de violence dans la société, au sein des couples, au sein de la famille, dans les espaces publics... et même l'enceinte scolaire n'est plus épargnée de ce fléau ! Ce qui s'est passé la semaine dernière dans l'un des établissements scolaires, situé à Tunis, prouve que l'école tunisienne aujourd'hui est traversée elle aussi par des turbulences qui nous invitent tous à réfléchir sur des méthodes efficaces afin de lutter contre ce phénomène, rétablir la confiance entre l'enseignant et l'apprenant et faire de l'école un «havre de paix». Comment faire en sorte que ces conflits soient résolus pacifiquement et amènent toutes les parties concernées et les composantes de la famille, de l'école... à dialoguer dans le respect mutuel pour mieux vivre ensemble ? Comment amener les enseignants, les élèves, les parents d'élèves, à dialoguer, à faire de l'école une société démocratique, avec ses normes où règnerait le respect mutuel pour un mieux-vivre ensemble ? Notre docteur en sociologie de l'école, Imen Daâdouche, explique tout d'abord les raisons directes et indirectes de ce fléau et propose quelques solutions pratiques pour limiter ces différentes formes de violence. Une crise de valeurs morale plus que pédagogique «A mon avis, nous assistons à une crise des valeurs et toute forme de violence s'explique par le déclin du rôle des institutions chargées de l'éducation et de la socialisation, à l'instar de l'école, la famille... Ces institutions semblent aujourd'hui incapables de répondre aux besoins et aux attentes des individus, en particulier les enfants et les jeunes. Il y a notamment de nouvelles demandes sociales, en contrepartie les institutions n'y répondent pas. Il y a aussi de nouvelles valeurs : les jeunes sont en quête de reconnaissance, car ils ont un vécu chargé d'expériences d'injustice, soit dans l'école, soit au sein de la famille et une charge négative causée la violence au sein dans la famille, dans la rue, sur les réseaux sociaux.....», note l'experte. Et de renchérir : «Depuis les années 90, la société a connu des transformations : elle est devenue la société des individus. L'émergence de nouvelles valeurs a conduit l'individu à défendre ses intérêts. Le nouveau système social, auquel appartient l'individu, produit plusieurs formes de violence, accentuées par l'absence de sentiment d'appartenance. La frustration ressentie conduit à la violence verbale, physique et même symbolique». Le rôle des jeux vidéo et des réseaux sociaux La docteur en sociologie explique aussi que les réseaux sociaux jouent un rôle important dans la propagation de la violence car il y a une sorte de banalisation et de normalisation de l'acte de violence qui est devenu plus facile aujourd'hui .à cause de l'émergence de certains jeux vidéo qui influencent les adolescents fragiles et vulnérables. Cette influence excessive est, en réalité, le reflet de la configuration sociale, poursuit Imen Daâdouche. «Plus les jeunes manipulent les jeux, les réseaux sociaux, plus on leur donne le pouvoir de faire ce qu' ils veulent». Notre experte précise aussi que le rythme effréné et infernal du quotidien et le stress produisent une charge négative et une sorte de concurrence agressive qui pousse les individus à vouloir arracher leurs places d'une manière ou d'une autre. «A cet effet, nous pouvons dire que la sacralité des valeurs a changé ! On assiste à une crise de valeurs morales. Le changement ou le bouleversement radical des valeurs marqué par le passage de la collectivité à l'individualisme est l'une des principales causes de ce fléau». Quant aux solutions possibles apportées par notre experte afin de lutter contre ce fléau, il est obligatoire d'instaurer tout d'abord une culture du vivre-ensemble au sein des structures scolaires, des institutions.... «Nous avons besoin d'ouvrir de nouvelles pistes de réflexion et un débat sociétal entre les ministères de l'Education, de l'Enseignement supérieur... afin d'être davantage à l'écoute des jeunes. Il faut aussi instaurer la culture de la communication et de l'interaction au sein de la famille afin de créer un climat de confiance basé sur le respect, l'autonomie, la tolérance et le vivre-ensemble et bannir de la sorte le discours de la haine», recommande la spécialiste.