On assiste à un nouveau phénomène: partir pour mieux revenir, en champion cette fois-ci, et ce, par le choix de l'exil vers ces pelouses incertaines. L'exportation des joueurs tunisiens en Europe est l'un des gros points d'interrogation de notre sphère footbalistique. Certains ont beau faire la pluie et le beau temps chez nous, il se verront par la suite attribuer le «ballon de plomb» du côté du Vieux continent ! Ali Kâabi, ex-pensionnaire de la Dream team tunisienne de 1978 n'en pense pas moins que la matière et le talent sont là. Ce qui n'est pas le cas de la qualité de l'enseignement prodigué, de l'encadrement et du cursus suivi: «Les joueurs tunisiens sortent déjà trop tard du pays. Ils attendent du club d'adoption qu'il les accueille comme des stars, à bras ouverts. Ils oublient qu'ils doivent avant tout faire leurs preuves, et que ce qu'ils ont vécu en Tunisie, c'est fini. Il faut tout effacer et recommencer pour avoir la reconnaissance. Nos joueurs manquent terriblement d'ambitions. Ils ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. C'est pour cela que la transition est difficile à l'étranger. En clair, nos joueurs doivent avoir faim. Ils peinent à se forger une carapace car ils sont dorlotés chez nous. Le grand technicien, Arrigo Sacchi ,l'explique simplement. Il disait que ce qui fait la différence entre deux bons joueurs, ce sont les qualités humaines. L'exemple le plus frappant est, à titre d'exemple, Gennaro Gattuso. Il redoublait d'effort et suait plus que les autres à l'entraînement et ce fut payant. Résultat, il a même été entraîneur-joueur du Fc Sion après une carrière internationale au plus haut niveau. Il y a quelques exemples de réussite de footballeurs tunisiens suite à un profond respect de la profession. Je citerais Zoubeir Baya à Fribourg et Besiktas Istanbul, Aymen Abdennour, Radhi Jaidi (Bolton, Birmingham et Southampton), ainsi que Karim Haggui (Strasbourg, Bayer Leverkusen, Hanovre et Stuttgart). Sans oublier Temime qui a excellé à ses débuts à Marseille avant de rentrer dans les rangs. C'est dire combien la personnalité du joueur est importante pour s'inscrire dans la durée. S'il voit un jour sa vie rêvée prendre forme en empruntant les chemins de traverse menant au haut niveau européen, il ne doit pas, par la suite, déchanter dès les premiers accrocs. Même s'il ne perce pas, il ne doit pas de suite penser au retour en mère patrie. Car les championnats étrangers de second rang sont aussi un marché réaliste. Nous ne sommes pas dans un contexte de contes de fées et il n'y a pas de place à la faiblesse mentale. Nos expatriés doivent assimiler le fait que jouer en Europe n'est pas seulement un moyen pour eux d'exister médiatiquement, et seulement une sorte d'antichambre donnant sur les riches championnats du Golfe pour des joueurs de niveau intermédiaire. Pour beaucoup d'entre eux, on assiste malheureusement à un nouveau phénomène: partir pour mieux revenir, en champion, cette fois-ci, et ce, par le choix de l'exil vers ces pelouses incertaines...!»