Avec le soutien du ministère de la Culture et le Complexe culturel de Tataouine, la nouvelle création «Ourouk Erraml» (Les veines du sable) du chorégraphe Hafedh Zellit a été présentée dans le cadre du festival Tunis, capitale de la danse, à la salle Le Mondial à Tunis. La scène s'ouvre sur un décor constitué d'un fond d'ombre et de lumière laissant entrevoir des figures humaines qui se trémoussent au gré du son du souffle du vent. L'atmosphère est à la fois ludique et onirique, annonçant le rythme du spectacle et sa singularité. Le cadre où défilent les tableaux dansants est un désert tel qu'il est imaginé par Hafedh Zellit, un endroit « où la lumière atteint une extrême pureté, là où tout est serein... Où derrière ce ton ôcre qui couvre la terre jusqu'à l'horizon se trouve une infinité de couleurs qu'on ne peut pas déceler... » A travers cette chorégraphie, Hafedh Zellit tente de transmettre au public le secret contenu dans les veines du sable, de répondre à l'appel de son esprit et se laisser transporter vers un lieu « où les étoiles sont à portée de main... Là où les êtres s'attachent les uns aux autres jusqu'à l'unisson». Ce travail nous entraîne vers ce désert qui change d'aspect et de couleur, tantôt clair et brillant, tantôt sombre et lugubre, tantôt serein et calme, tantôt furieux et violent. La scène, ainsi que les personnages et les événements s'imprègnent de ses couleurs et de ses odeurs. Les corps sidérés ou en mouvement nous renvoient vers nos plus lointaines origines et puisent leur énergie dans la nuit des temps. Une aventure de gestes purs, un océan d'ondulations où l'intime de la sensation, de la recherche corporelle se mêle à une belle dimension scénique, sans que pour autant on en soit ému, mais juste intéressé. Sur scène, les danseurs, en figures éclatées, solos ou duos se présentent sous l'aspect de jeunes hommes aux somptueuses statures, aux longs bras effilés, d'autres prennent l'apparence de diverses créatures du désert (mention spéciale pour les costumes et le maquillage). Le mouvement se poursuit dans la même atmosphère, dans une quasi-obscurité, élégamment animé par la lumière changeante du désert et les divers sons de ses créatures, qui découpent le geste et l'amplifient. On en reçoit une vision d'un admirable travail de corps, en une sorte de flux et de reflux comme ceux des dunes de sable sous l'effet du vent : un mouvement perpétuel, hésitant entre danse aérienne et tournoiements, qui contrastent avec l'ancrage des corps au sol. A travers cette nouvelle création, Hafedh Zellit essaye de déployer son langage propre et son style particulier et fait dialoguer plusieurs dualités, l'Homme face à son semblable, l'Homme et la Nature, le Passé et le Présent, le Traditionnel et le Contemporain. Au cœur d'une expérience métissée, mêlant danse contemporaine et folklorique, la musique rythmée et les chansons bédouines donnent du rythme et du sens aux mouvements silencieux des corps et de la répartie aux corps dans l'espace. Cette même danse à même le sol ou aérienne confère au spectacle une valeur scénique et esthétique exceptionnelle. Hafedh Zellit a pu nous entraîner dans une aventure inédite alliant tous les éléments essentiels du spectacle et cela malgré les petits problèmes techniques et le manque de moyens auxquels on a dû faire face et que, heureusement, l'équipe a pu régler avec tact et efficacité !