Les voisins dénoncent l'absence des moyens de sécurité nécessaires à la protection des ouvriers. Les habitants de la rue Ali-Bach Hamba, à Tunis, se sont rassemblés, avant-hier, pour prendre connaissance du sort inquiétant des ouvriers victimes de l'effondrement des murs, dans un chantier de maintenance d'un immeuble délabré. L'immeuble en question n'est autre que l'ancien local de la Banque du Sud, situé dans la rue pré-indiquée ; une bâtisse dont la construction remonte, selon les informations avancées par les riverains, à la Seconde Guerre mondiale. Restée inhabitée depuis bien longtemps, cette bâtisse fait l'objet d'un chantier de maintenance. Le promoteur chargé des travaux détient une autorisation légale, accordée par la municipalité de Tunis. «La situation juridique du promoteur est conforme aux règles en vigueur», indique un responsable de la sécurité nationale. Les travaux de maintenance — et de destruction de certaines parties de l'immeuble — sont menés par onze ouvriers. D'après le responsable de la sécurité nationale qui préfère garder l'anonymat, l'accident a été déclenché par la destruction voulue du plafond situé au cinquième étage ; une intervention qui a fragilisé les murs, lesquels dépourvus de tout support, se sont effondrés sur quatre ouvriers. La Protection civile s'est empressée de secourir les victimes. Stressés, émus, les agents de la Protection civile se sont abstenus d'avancer la moindre information. «Nous n'avons pas le temps de vous répondre, nous devons secourir des vies humaines au plus vite», déclare un agent, irrité. Sous le regard navré de la foule, deux ouvriers ont été extirpés des débris et placés dans l'ambulance de la Protection civile. Puis, un troisième. Transportés sur des brancards jusqu'au véhicule, ces trois ouvriers suscitaient le courroux de la foule. Des jeunes démunis, dont les droits sont bafoués faute bien évidemment des moyens à même d'assurer leur sécurité. «Je travaille dans l'immeuble d'en face, indique une dame, et je les vois constamment chanceler sur les balcons délabrés. Ils ne sont pas sécurisés et ne portent même pas de casques de protection. Hier même, l'un d'entre eux m'a regardée et j'ai eu la trouille qu'il ne perde l'équilibre». «Regardez ces ouvriers ! Voyez les tongs qu'ils portent aux pieds ! Aucune sécurité pour ces jeunes qu'on charge des travaux de maintenance d'un immeuble aussi risqué», ajoute un monsieur, énervé. En voulant demander des informations auprès des ouvriers, ces derniers avaient du mal à surmonter l'horreur. Blêmes, blafards, tétanisés par ce qui vient d'arriver, par le sort de leurs collègues, par le risque de mort qu'ils encourent en voulant juste travailler, de quoi subvenir au besoin le plus élémentaire : manger. «Je ne sais rien du tout», énonce chacun d'entre eux, sur un ton faible, anéanti, à peine audible. Le quatrième ouvrier était encore immobilisé dans le cinquième étage où se sont effondrés les murs, les jambes coincées au-dessous des décombres. Il a nécessité plus de temps pour être retiré des débris. «Les quatre ouvriers sont blessés à des degrés différents. Aucun cas de décès n'a été déploré», précise le responsable de la sécurité nationale.