Pour le président de la République, il ne faut pas confondre les choses, la formation du gouvernement d'union nationale qui interviendra avant fin Ramadan ne signifie pas l'annulation des résultats des législatives de fin 2014 Hier, en recevant les participants au dialogue engagé au Palais de Carthage sur l'idée de la formation d'un gouvernement d'union nationale, le président Béji Caïd Essebsi, auteur de l'initiative, s'est trouvé dans l'obligation de mettre les points sur les i : «Il n'a jamais été question de la démission de quiconque ou de la volonté de pousser quiconque à partir. Nous n'allons pas abandonner notre plan de développement 2016-2020. Nous allons nous entendre sur une feuille de route à même de concrétiser les objectifs immédiats sur lesquels nous allons convenir». Les choses sont ainsi claires : que ceux qui prophétisent que tout va être chambardé, que la légitimité électorale née des législatives du 26 octobre 2014 va sauter et qu'il y aura un autre programme à appliquer (certaines parties l'ont déjà publié sur les journaux et consultent pour qu'il soit avalisé par des formations politiques qui ne disposent d'aucun siège au Parlement), qu'ils déchantent tous. La solution avant l'Aïd el fitr Le message du chef de l'Etat est incisif : «Nous écoutons tout le monde. Les propositions exprimées par les responsables que j'ai reçus au Palais de Carthage sont respectables et témoignent d'un haut degré de patriotisme et de maturité qu'exige l'instant par lequel passe notre pays. Elles montrent également que nous avons le même diagnostic de la situation actuelle. Les indicateurs sont négatifs et la situation présente ne doit, en aucune manière, perdurer». Hier, la liste des participants aux consultations s'est élargie. Outre les représentants des partis de la coalition gouvernementale, de l'Ugtt et de l'Utica, on a enregistré la présence du président de l'Utap, l'Organisation des agriculteurs, du secrétaire général du parti Echaâb et du secrétaire général d'Al Massar, de représentants de Machrou Tounès et d'Al Moubadara. Ils sont venus dans le cadre de la volonté du chef de l'Etat «d'élargir les concertations au maximum et pour que personne ne se sente exclu», comme l'a souligné le président lui-même. Il n'a pas manqué de préciser : «Je n'ai aucun engagement avec personne. Et je l'ai dit à tout le monde : tant que nous nous sentons engagés envers la Tunisie, nous sortirons ensemble de la crise». Quant aux consultations, elles ne perdureront pas : «L'opération sera clôturée avant l'avènement de l'Aïd. Mercredi prochain, nous nous rencontrons de nouveau afin de convenir des mécanismes à mettre en œuvre dans le but d'appliquer les priorités sur lesquelles nous allons nous mettre d'accord ainsi que sur la meilleure conception possible pour structurer le gouvernement d'union nationale». Les pendules remises à l'heure ? Une commission restreinte sera constituée et sa tâche sera de préparer l'ordre du jour de la rencontre de mercredi prochain. Quant au départ de Habib Essid et de ses ministres, il s'opérera selon les dispositions que prévoit la constitution. La question que se posent les analystes et les observateurs friands des interventions de Béji Caïd Essebsi et désireux de les analyser à fond est la suivante : a-t-il réussi, à travers sa brève allocution d'ouverture de la rencontre d'hier, à remettre les pendules à l'heure et à dessiner à chacun des participants la fonction qu'il a à assumer et l'espace dans lequel il aura à évoluer ? «Autrement dit, souligne une source proche des négociations, Béji Caïd Essebsi dit stop aux consultations parallèles menées ces derniers jours par Houcine Abassi qui reçoit à tour de rôle, au siège de l'Ugtt place Mohamed Ali, les représentants des partis de l'opposition, notamment ceux non représentés au parlement et essaie de leur soutirer leur soutien à la feuille de route que le département recherches et documentation de l'Ugtt a déjà publiée dans les journaux». «Béji Caïd Essebsi, poursuit la même source, répond également aux déclarations de Rached Ghannouchi et Abdelkrim Harouni, nouveau président du Conseil de la choura d'Ennahdha, qui viennent d'exiger que la part de leur parti au sein du prochain gouvernement soit conforme à son poids réel en tant que première formation politique au sein du Parlement. Pour moi, il s'agit d'une déclaration adressée à la base nahdhaouie, plus particulièrement à la frange qui critique le suivisme exagéré et son alignement automatique sur les idées de Béji Caïd Essebsi. Et puis Abdelkrim Harouni, qui a battu difficilement Abdellatif Mekki à la présidence du Conseil de la choura, a besoin d'une déclaration qui montre qu'il aura son mot à dire au sein du Conseil et qu'il ne sera pas la voix de son maître Rached Ghannouchi. Ce dernier se sent également obligé de rassurer les bases nahdhaouies, notamment dans les régions, qui ne sont pas satisfaites de certaines personnes élues au sein du Conseil de la choura en attendant la constitution du bureau exécutif et la désignation du futur secrétaire général, une épreuve difficile qui attend Rached Ghannouchi dans la mesure où Ali Laârayedh rumine sa défaite et attend son heure pour revenir au-devant de la scène».