Le ver était bien dans le fruit et personne n'a voulu aller plus loin. Il y avait trop d'intérêts et d'interventions pour ne pas réveiller le lapin qui dort. Le problème du dopage n'est pas nouveau en Tunisie et c'est «La Presse» qui a été le premier journal à le dénoncer avec une manchette qui avait fait sensation à cette époque là. C'était dans les années 79/80, au lendemain d'une compétition de natation qui a eu lieu à Monastir : nous avons eu l'occasion de voir un dirigeant faire ingurgiter des ampoules à de très jeunes nageurs. Qu'y avait-il dans ces ampoules ? Personne ne peut le dire, mais le fait même que l'on agisse de cette manière pour faire croire à ces jeunes qu'ils nageraient mieux avec cet apport était un délit. Nous avions titré : «On dope nos enfants !». Bien entendu, il y eut des tentatives pour expliquer ces agissements, mais... quelques années plus tard, nous avions enregistré le départ d'une nageuse de renom suite à un malaise cardiaque au terme d'une compétition, puis la suspension d'une autre pour «dopage». Le ver était bien dans le fruit et personne n'a voulu aller plus loin. Il y avait trop d'intérêts et d'interventions pour ne pas réveiller le lapin qui dort. En fait, c'était un monstre, une gangrène qui rongeait et qui détruisait tous ceux qui se laissaient entraîner dans son tourbillon. Avec ces «affaires», on a commencé à s'intéresser au sport tunisien et après la natation il y eut l'haltérophilie qui se fit prendre au niveau international. Comme pour la natation, on rejeta tout sur l'entraîneur et ces affaires en restèrent là. Pourtant ! Au niveau national, à notre connaissance, il n'y a jamais eu d'athlète ou de sportif confondu pour dopage. A moins que, pour éviter le scandale, on ait préféré tout faire en douce et c'est là une prime à la tricherie. La Tunisie qui à une certaine époque s'était dotée d'un laboratoire à la pointe du progrès à Bab Saâdoun, reconnu pas les instances internationales, classé par le CIO comme un des plus performants du Bassin méditerranéen et qui rayonnait sur toute l'Afrique, avait cessé d'investir dans ce domaine. Les laboratoires spécialisés dans la lutte contre le dopage nécessitent, en effet, des investissements énormes qui n'en finissent jamais. Le matériel se doit d'être à la pointe et sa remise en cause est reliée aux progrès scientifiques que les chercheurs effectuaient. Les matières dopantes sont découvertes tous les jours grâce aux avancées technologiques. C'est ainsi que l'on a découvert que des athlètes qui s'étaient dopés à une époque où il était impossible de vaincre les écrans ou produit masquant que l'on faisait absorber aux athlètes pour dissimuler le produit essentiel, avait largement profité, remportant or et argent.. Le grand scandale qui a suivi l'éclatement de l'Union Soviétique, puis de la réunification de l'Allemagne n'est pas près d'être oublié. D'ailleurs, tout le monde se souvient des performances incroyables que les nageuses de l'Allemagne de l'Est enregistraient. Le pot aux roses avait fini par être découvert le jour où les langues s'étaient déliées et que les savants en la matière immigrèrent vers un certain nombre de pays pour monnayer leur sinistre savoir-faire. De toutes les façons avec l'importance que revêt de nos jours le sport, meilleur vecteur pour véhiculer le prestige et le « progrès » d'une nation, avec les primes offertes, avec les intérêts en jeu, avec les multinationales qui investissent à tour de bras pour rafler les marchés dans tous les domaines, on n'est pas près de fermer ce dossier. Au point de dire que... ceux qui n'ont pas été démasqués aujourd'hui, le seront demain, car avec les avancées scientifiques et la lutte que se livrent les grandes puissances du sport, on fera tout pour démasquer les tricheurs d'en face, le temps que l'on découvre ceux qui ne l'ont pas été jusque là chez soi. Le scandale révélé la veille de Rio et qui met en évidence des tricheries russes(espérons que ce n'est pas un règlement de compte politique qui desservirait énormément l'éthique sportive) est révélateur : tous les moyens sont devenus bons pour prouver qu'un système marche. En Tunisie, qui s'en soucie ? De toutes les façons, on ne peut jamais affirmer que notre sport est clean avec ces calendriers effroyables et ces engagements à tort et à travers. Le meilleur moyen de l'affirmer est bien d'ouvrir sérieusement le dossier et d'obliger les fédérations concernées à obéir aux recommandations olympiques pour se prémunir contre ce danger. L'institution de visites inopinées, les contrôles systématiques après chaque compétition, le suivi sans équivoque de toutes les activités sportives et surtout la nécessité de protéger ceux qui mettent la main sur un écart quelconque sont inévitables. Mais sommes-nous dotés en hommes et en matériels pour relever ce défi ? Pour l'aspect hommes, il est très possible que nous puissions nous en sortir, car ceux qui veillent au contrôle des médicaments au niveau de la Pharmacie Centrale et de ses laboratoires spécialisés, sont en mesure de faire le travail, employant les moyens qui coûtent horriblement chers, du matériel à remettre à niveau sinon à rénover, et une conviction sincère de mettre un terme à l'absence de réactions au niveau des différentes parties prenantes.