Alors que la contrefaçon continue de fleurir partout dans le monde et que les pratiques anticoncurrentielles font des ravages dans une grande partie des marchés extérieurs, les entreprises exportatrices tunisiennes sont appelées, plus que jamais, à protéger leurs produits. Cette protection passe inévitablement par le dépôt de marque aussi bien au niveau national qu'à l'échelle internationale. Dans des pays concurrents, cette démarche est aujourd'hui indispensable. La deuxième rencontre mensuelle s'inscrivant dans le cadre des matinales de l'export de l'année 2024 avait pour thème « La protection des marques à l'international : quelles démarches et quels outils pour exporter en toute sécurité ». Organisé récemment au Centre de promotion des exportations (Cepex), ce rendez-vous mensuel a pour objectif de mettre en lumière un enjeu de taille pour les entreprises exportatrices, à savoir la protection des produits contre la contrefaçon et les pratiques anticoncurrentielles. «La concurrence sur les marchés internationaux qui sont de plus en plus ouverts n'a cessé de croître. C'est pourquoi chaque entreprise soucieuse de préserver son positionnement sur ces marchés-là doit enregistrer sa marque au niveau international », a déclaré Lazhar Bennour, directeur général de la Coopération économique et commerciale au ministère du Commerce et du Développement des exportations. Tous les secteurs sont touchés Il a ajouté qu'au cours de ces dernières années, plusieurs entreprises tunisiennes ont été victimes de contrefaçon et de pratiques anticoncurrentielles. Raison pour laquelle, elles doivent déposer leurs marques à l'échelle internationale. Et si elles ont les moyens, il est recommandé de le faire auprès de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, une organisation onusienne dont le siège est basé à Genève. « Il faut que les marques se protègent surtout si elles comptent percer de nouveaux marchés. Il faut qu'elles soient averties que plusieurs pratiques enfreignant les règles de la concurrence loyale, telles que la contrefaçon, prolifèrent aujourd'hui dans de nombreux marchés. Plusieurs marques tunisiennes en ont, d'ailleurs, fait les frais », a-t-il affirmé. Et le responsable d'ajouter : «Le dépôt de marques est une culture. A l'échelle nationale, il se fait par le recours à l'Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle (Innorpi). Contrairement à ce que beaucoup pensent, l'enregistrement d'une marque n'est pas très coûteux d'autant plus qu'il s'agit d'un investissement qui va permettre à l'entreprise de consolider sa position sur certains marchés. Notre principal atout, nous les Tunisiens, c'est la créativité et l'innovation. Nous devons alors protéger nos marques, qui sont le fruit de cette créativité ». Selon Bennour, toutes les entreprises, tous secteurs confondus, sont appelées à déposer leurs marques. Mais certains secteurs sont plus exposés aux risques de contrefaçon, tels que l'industrie des composants automobiles et mécaniques, le textile, l'agroalimentaire et surtout le secteur des services. Le responsable a, en ce sens, affirmé que les bureaux de consulting tunisiens ont tout intérêt à enregistrer leurs études, étant donné que plusieurs d'entre elles ont été extorquées, par le passé. Prendre garde si on souhaite s'attaquer à un nouveau marché De son côté, Mourad Ben Hassine, Pdg du Cepex, a indiqué que la Tunisie dispose d'un arsenal législatif important qui permet de protéger les brevets d'invention et les marques commerciales. Il a fait savoir que le Cepex accompagne les entreprises dans leurs démarches d'enregistrement et octroie, aussi, à travers le fonds de promotion des exportations (Foprodex), des avantages financiers pour les inciter à déposer leurs marques. Il a, par ailleurs, précisé qu'elles peuvent recourir à des spécialistes pour accomplir en bonne et due forme les procédures nécessaires. Ben Hassine a ajouté que plusieurs entreprises tunisiennes ont été victimes de contrefaçon. Dans les marchés européens et nord-américains, les produits sont généralement protégés mais dans d'autres marchés les biens et services commercialisés peuvent être menacés, explique-t-il. Plusieurs entreprises tunisiennes ont été victimes de contrefaçon Haroun Grami, sous-directeur au département de Propriété Industrielle à l'Innorpi, a fait savoir que l'adhésion de la Tunisie, en 2013, au protocole de Madrid relatif à l'enregistrement international des marques constitue un avantage pour les entreprises exportatrices tunisiennes, puisque cela va leur permettre de faciliter les procédures d'enregistrement et surtout réduire les coûts associés. Aujourd'hui, seulement deux cents entreprises tunisiennes ont déposé leurs marques auprès de l'Innorpi. Ce chiffre est amené à augmenter, notamment face à la croissance des menaces de contrefaçon. Livrant son témoignage, Karim Belghith, directeur commercial au sein d'une entreprise industrielle spécialisée dans la fabrication des cahiers scolaires, a relaté les péripéties vécues par la société en 2011, au moment où la marque connaissait un franc succès sur le marché marocain. La marque tunisienne a été enregistrée, par un concurrent, au Maroc. La manœuvre de la société rivale a porté ses fruits : les cahiers exportés ont été saisis et ont failli être incinérés. Du jour au lendemain, la marque tunisienne a été accusée de contrefaçon. « On a été aussi victime du fait que la Tunisie n'était pas, à ce moment-là, membre de la convention de Madrid. Nous étions contraints de changer le nom de notre produit », a-t-il certifié. Il a appelé toutes les entreprises à déposer leurs marques surtout à l'international.