Il a enflammé les gradins au théâtre de plein air de Hammamet lors de l'ultime soirée qui clôt une programmation distinguée. Goran Bregovic, qui s'est produit samedi dernier et pour la première fois en Tunisie au Festival international de Hammamet avec son orchestre des mariages et enterrements, a mis en scène l'univers généreux et festif de la musique tzigane. On ne se relève pas indemne après avoir assisté à ce concert de clôture de deux heures et demie et au cours duquel Goran Bregovic a fait monter l'adrénaline chez les spectateurs par son mélange musical, son croisement de toutes les gaîtés, de toutes les joies et toutes les tristesses, de toutes les déchirures et mélancolies. Après avoir joué quelques morceaux des bandes originales des films cultes à l'instar de «La reine Margot», «Le Temps des gitans», «Chats noirs, chats blancs», il passe la vitesse supérieure avec des airs endiablés qui ont mis le feu aux gradins. «Natura», «So Nevo si», «Presidence», Erdelezi», «Bogario» ont démontré le caractère généreux d'une musique populaire, une musique du peuple, composée et jouée pour et par les familles, les banquets, les fêtes et événements de la vie. «Celui qui ne devient pas fou, n'est pas normal» a-t-il lancé à un public en transe. Et «Bella Ciao», la chanson tant attendue par le public, fut la fête, de toutes les fêtes. Cette belle clôture, assurée par un artiste aussi prestigieux que Goran Bregovic, fut d'une telle énergie que l'on a parfois l'impression de voler, de flotter dans les airs, d'être sur un nuage de bonheur. Et pour cause, car l'Orchestre des mariages et enterrements est loin d'être un banal orchestre tzigane parmi tant d'autres. Bregovic, parti du rock de sa jeunesse, a progressivement intégré dans ses créations toutes les dimensions possibles de la musique balkanique : chants d'église byzantins, musique militaire ottomane puis serbe, bulgare et macédonienne, folklores paysans, le tout traversé et revisité par ces passeurs de frontières que sont les Tziganes, chargés d'accompagner en musique tous les moments importants de la vie sociale dans une grande partie de l'Europe centrale et des Balkans. S'ajoutent à cela tous les apports du rock, de la country. Le résultat est proprement époustouflant. Jeu de cordes, de cuivres et voix de femmes et d'hommes qui traversent les temps et renouent avec les traditions pour rejoindre une insaisissable modernité. Une synergie qui fait fusionner les genres les plus éloignés pour un résultat aux rythmes des plus endiablés. L'ensemble fut tout simplement magique !