C'était dans l'air. La résolution de la crise de la société Petrofac augurait une nouvelle série de protestations dans les régions. Les syndicalistes de Tataouine annoncent une grève générale pour mardi prochain. A la place Mohamed-Ali, on préfère régler ses comptes à Othman Battikh Mercredi soir, Youssef Chahed, chef du gouvernement d'union nationale, insistait dans son adresse télévisée sur le fait que «les sacrifices dits douloureux que le gouvernement attend des Tunisiens au cours des trois prochaines années ne se feront pas aux dépens des salariés et des couches sociales vulnérables. En partenariat avec l'Ugtt, à travers les réunions de la commission 4+4, nous sommes en train d'examiner la meilleure formule possible pour que ces sacrifices soient équitablement partagés». Et le chef du gouvernement d'annoncer le démarrage de l'exécution des projets bloqués dans les régions, outre la décision de consacrer une enveloppe de 250 MD aux initiateurs des projets privés qui bénéficieront du suivi et de l'accompagnement de l'Etat. Hier, jeudi 29 septembre, les syndicalistes de Tataouine ont répondu, à leur manière, aux annonces de Youssef Chahed en menaçant de décréter une grève générale dans le gouvernorat, le mardi 4 octobre prochain, au cas où les exigences de développement et d'emploi dans la région ne seraient pas satisfaites. Le secrétaire général de l'Union régionale du travail à Tataouine l'a clairement souligné sur les ondes d'une radio privée : «Toutes les composantes du paysage politique, syndical et civil dans la région ont convenu de décréter une grève générale mardi prochain si nos revendications restaient sans réponse de la part du gouvernement». Ainsi, les syndicalistes de Tataouine emboîtent-ils le pas à leurs collègues de Sidi Bouzid qui ont lancé, vendredi dernier, un ultimatum au gouvernement expirant le mercredi 5 octobre l'exhortant à prendre des mesures urgentes en matière de développement de la région et d'emploi immédiat des chômeurs, avec, en prime, la révocation du gouverneur de la région. Au cas où leurs demandes ne seraient pas satisfaites, ils se réservent le droit de créer une commission, comprenant l'ensemble des composantes politiques et civiles du gouvernorat, qui décidera des mouvements à organiser pour obliger le gouvernement à obtempérer à leurs revendications. Et comme la contagion est facile dans de telles situations, voici les citoyens de Jebeniana, de Sakiet Ezzit et de plusieurs localités relevant du gouvernorat de Sfax qui se sont joints, hier, à la messe générale pour exiger que ce qui a été réalisé à Kerkennah en vue de résoudre la crise de la société Petrofac soit repris dans leurs régions. Sinon, c'est la fermeture des routes et les sit-in interminables qui empêcheront les rares entreprises exerçant encore à fonctionner. L'Ugtt a visiblement d'autres priorités Mais que fait la direction centrale de l'Ugtt face à ses structures régionales qui font la loi là où elles exercent et prennent les décisions les plus fantaisistes et publient des déclarations incendiaires (comme celle de Sidi Bouzid) laissant aux membres du Bureau exécutif le plaisir de les lire sur les journaux comme tout le monde. Que peut dire Bouali M'barki, l'un des candidats à la succession de Houcine Abassi à la tête de l'Ugtt, quand on lui demande de commenter les communiqués des SG de Tataouine et de Sidi Bouzid, sauf «que les revendications à caractère social sont légitimes et que le gouvernement se doit d'écouter les protestataires appelés à agir dans le calme». Un discours dont beaucoup de Tunisiens commencent à s'en lasser et n'hésitent pas à exhorter les décideurs à la place Mohamed-Ali à assumer pleinement leurs responsabilités et à dire clairement qu'ils respectent la signature qu'ils ont apposée sur le Pacte de Carthage et à soutenir, en fait, le gouvernement Youssef Chahed. «On sait — précisent les observateurs — que les responsables de l'Ugtt sont pratiquement en campagne électorale avant terme en prévision du congrès de fin janvier 2017 et qu'ils risquent gros s'ils s'aventurent à prendre des positions qui déplairont à leurs bases. C'est la raison pour laquelle ils préfèrent mener une guerre sans merci contre Othmane Battikh ou exprimer leur étonnement de voir Youssef Chahed leur demander d'accepter le report des augmentations salariales». «Il y a un temps pour la revendication. Il y a aussi un temps pour assumer son statut de partenaire de l'accord de Carthage», ajoutent ces mêmes observateurs.