Bien avant «Karama», de Jordanie, et le Festival international du film des droits de l'homme de Tunis, un autre festival du même genre est né en 2004 en Afrique de l'Ouest. Il s'agit de Ciné Droit Libre dont la dernière édition vient d'avoir lieu à Dakar du 21 au 24 septembre. Le festival Ciné Droit Libre a été créé au Burkina Faso par une association appelée Semfilms, avec l'objectif de promouvoir et de défendre les droits humains, ainsi que la liberté de l'expression en Afrique. Il se tient chaque année dans 4 pays, à savoir le Burkina Faso, le Sénégal, le Mali et la Côte d'Ivoire. Sa formule de film-débat a connu un franc succès auprès du public. Dans sa programmation, ce festival prend tout genre de film en considération, mais toutefois il met l'accent sur le film documentaire. Ciné Droit Libre est avant tout un festival de films, mais il est également la Tribune des défenseurs des Droits de l'Homme et de la Liberté d'Expression. C'est aussi, et surtout, une plateforme de prise de parole de la jeunesse africaine. Cette année, les organisateurs ont décidé de mettre l'accent sur l'extrémisme qui sévit depuis ces dernières années sur le continent. L'enlèvement des collégiennes de Chibok(*), les attentats terroristes, qui ont frappés successivement le Mali, le Burkina Faso et la Côte d'Ivoire, et les attaques répétées du Tchad, du Cameroun et la Mauritanie, imposent une réflexion sur les questions de sécurité et de paix. Déjà, en mars 2015, en marge du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), 13 chanteurs de l'Afrique de l'Ouest se sont retrouvés à l'initiative de Didier Awadi (rappeur francophone célèbre) et Artwatch Africa, projet d'Arterial Network, pour produire une chanson qui dénoncent cette situation trop souvent passée sous silence. Le collectif baptisé « Les Ambassadeurs de la Liberté d'Expression» (ou Ambassadeurs d'Artwatch Africa) a ainsi sorti « Droit de Vivre » en juillet 2016. Un titre qui a inspiré le thème de l' édition 2016 de Ciné Droit Libre dans les différents pays. «Droit de vivre» c'est aussi dénoncer les atteintes aux Droits des artistes, dont la liberté d'expression créative et artistique qui est de plus en plus menacée. A titre d'exemple, le récent assassinat d'un chanteur burundais, Pascal Treasury Nshimirimana, par les forces de l'ordre, pour sa participation aux manifestations contre le président Pierre Nkurunziza. De plus, de nombreux artistes se retrouvent, parfois par un concours de circonstance, souvent par choix, à la tête de mouvements sociaux et se font les porte-voix de la population. En première ligne de mire, les rappeurs. Différentes projections ont été au programme du festival Ciné Droit Libre au Sénégal, suivies de débats avec plusieurs intervenants, notamment quelques-uns des Ambassadeurs d'Artwatch Africa. Le vendredi 23 septembre, Didier Awadi (Sénégal) et les participants ont pu débattre de la place du musicien dans les révolutions sociales et du rôle de l'artiste dans la construction de la paix et en tant que rempart contre la radicalisation des jeunes conduisant au terrorisme. Ce fut aussi pour les jeunes présents une occasion de partager leurs frustrations et de discuter autour de solutions viables, applicables au contexte sénégalais et africain. Source : Arterial Network, réseau de la société civile des artistes, des militants culturels, des ONG, des entreprises et des institutions actives dans les secteurs créatifs et culturels en Afrique (*) L'enlèvement des 276 collégiennes de Chibok a eu lieu en avril 2014, pendant la «rébellion djihadiste» au Nigeria.