Pour le comité des cheikhs de Tunisie et l'Association des imams pour la modération et le refus de l'extrémisme, il n'est pas question d'introduire l'approche genre dans le projet de loi 60-2016 relatif à l'éradication de la violence contre la femme, actuellement soumis à l'ARP pour adoption Mercredi dernier, lors d'une conférence de presse, à Tunis, le comité des cheikhs de Tunisie et l'Association des imams pour la modération et le refus de l'extrémisme ont pris une position catégorique : il n'est pas question d'introduire l'approche genre dans le projet de loi 60-2016 relatif à l'éradication de la violence contre la femme, actuellement soumis à l'ARP pour adoption. Sinon, ils n'ont rien contre l'égalité des chances entre les deux sexes, étant donné, selon eux, que le principe de la parité tire sa juste signification de l'islam, religion qui reconnaît à la femme, comme à l'homme des droits et des obligations. C'est dans ce cadre que s'inscrit la conférence visant à donner un éclairage sur le concept de genre, sa genèse et ses répercussions sur la stabilité de la société tunisienne, prévient cheikh Abdel Ghani Sabri, membre de l'Association des imams. En fait, l'approche, qui remonte bel et bien aux années 70, fut adoptée par les Nations unies, sous la pression des organisations féminines qui n'ont cessé, jusqu'à nos jours, de demander à ce qu'elle soit prise en compte dans l'élaboration des politiques publiques. Oui avec le projet, mais... Et l'orateur d'ajouter que ce concept est venu de l'Occident, et l'idée a fait son chemin sous nos cieux, au point qu'elle a déjà été intégrée dans les articles 1 et 2 du nouveau projet de loi sur la lutte contre la violence faite à la femme. Et ce n'est pas tout. Ce concept, indique-t-il encore, a fait l'objet d'un décret gouvernemental du 25 mai 2016 exigeant l'égalité des chances entre les deux sexes, à même d'ériger l'approche genre en partie intégrante dans les programmes des ministères. Membre du Conseil islamique supérieur, cheikh Slimane Chaouachi est aussi du même avis : « On n'est pas contre le projet de loi en tant que tel, mais on refuse qu'un tel concept en soit la référence de base ». Surtout que la question genre a été fort influencée par la théorie du mutationnisme de Darwin, dont la philosophie idéologique considère que l'homme est la résultante de la société. De même pour la sociologue britannique Ann Oakly qui y croit fort, montrant que seule la discrimination d'ordre social compte dans la définition de l'homme et de la femme. Soit, l'un s'identifie à l'autre, sans recours aux différences génétiques ni physiologiques. « Ce qui est absurde et contre nature » aux yeux des imams. Et si la loi concernée était adoptée par l'ARP, suppose-t-il, il y aurait risque de détruire la notion de famille traditionnelle et disloquer, de la sorte, toute la société tunisienne. D'autant plus qu'il s'oppose au Saint Coran et aux préceptes fondamentaux de la religion, a-t-il encore ajouté. C'est que la manière d'y penser paraît si extravagante et étrange à nos mœurs et habitudes. « Car, homme et femme se complètent, se différencient, mais ils ne s'identifient jamais. A chacun sa personnalité, son identité génétique et ses spécificités», résume-t-il. De son côté, l'ex-président du Conseil islamique supérieur, cheikh Abdallah Loussayef, a assimilé ce concept au néocolonialisme culturel qui vise la disparition des traditions et de l'identité arabo-musulmane. C'est là, dit-il, une pensée extrémiste qui incite à la séparation et à la division des nations. Inadmissible, parce que l'univers repose essentiellement sur la dualité femme et homme pour perpétuer les générations sur Terre. « On n'accepte jamais que notre société soit divisée », lance-t-il. Sur la même lancée, l'ex-mufti de la République, Hamda Said, s'est focalisé sur l'entité familiale et la complémentarité des rôles pour l'homme et la femme. « Ils sont différents, mais égaux en droits et obligations», révèle-t-il en substance. Du reste, le comité des cheikhs et l'Association des imams pour la modération et le refus de l'extrémisme ont convenu d'agir, si l'approche en question n'est pas exclue dudit projet.