Il s'agit d'un rendez-vous que le peintre renouvelle chaque année avec son public depuis 1987. Fidèle à sa démarche semi-figurative, il tente à chaque occasion de renouveler sa palette. Une trentaine d'œuvres huile sur toile signées Bady Chouchène sont exposées jusqu'à fin juin à la Galerie Ain à Salammbô. Il s'agit d'un rendez-vous que le peintre renouvelle chaque année avec son public depuis 1987. Fidèle à sa démarche semi-figurative, il tente à chaque occasion de renouveler sa palette, créant ainsi des harmonies de couleurs et de formes sans autre forme de recherche ou de spéculation métaphysique. Bien qu'il soit natif de Chebba, ville balnéaire du Sahel, Bady Chouchène ne s'est jamais, curieusement, intéressé à la mer. Il est tourné vers la médina, les souks, les ambiances festives de mariage ou de circoncision où il puise son énergie créatrice. Des thèmes ressassés certes mais dont il exalte encore l'architecture et les personnages qui y circulent. Ce n'est pas tant les expressions qui l'intéressent mais plutôt les espaces qu'il transforme en des touches et des couleurs en fondu enchaîné pour utiliser une expression cinématographique. Beaux-artiste de la promotion de 1975, spécialisé dans la céramique, Bady Chouchène s'est rapidement éloigné de l'académisme au profit d'une démarche qui se situe à mi-chemin antre l'expressionisme et l'impressionnisme. On retrouve l'influence du peintre allemand August Macke (1887-1914), qui avait fait un bref séjour en Tunisie. Repéré par le photographe Mohamed Ayeb, alors qu'il était encore étudiant, il lui propose de prendre en charge ses expositions dans sa nouvelle Galerie Ain. Depuis, l'amitié entre les deux hommes s'est solidement soudée et aucune ombre n'est venue l'obscurcir. Les balades nocturnes, les vendeurs à la sauvette, les préparatifs de fête, etc. restitués sur les toiles perdent le réalisme initial mais gagnent un réalisme magique. Magique par le pouvoir de la couleur que leur fournit le peintre pour créer « une symphonie musicale » selon Mohamed Ayeb. Il peint surtout les scènes urbaines de la vie quotidienne en osant marier le vert avec le bleu ou le rose avec l'ocre avec une gestualité dynamique proche d'une transe. Vers l'abstraction Sans s'enfermer dans une théorie particulière, il se laisse aller à la contemplation du réel. Pour cela, il utilise tous les outils à sa portée : pinceau, couteau, chiffon, ses doigts pour un effet de matière qui réunit l'art et la vie dans une sorte d'harmonie. Sans briser tout à fait les formes pour ne pas perdre son public, il glisse subrepticement vers l'abstraction. Mais ses noces avec l'abstraction seront-elles célébrées. Il lui faudrait pour cela entamer le divorce une fois pour toutes avec ce semblant de figuratif. L'exposition nous donne à voir une peinture enracinée dans le patrimoine matériel et immatériel de la médina, l'atmosphère et les ambiances de ces espaces de vie des pays du Sud où les contrastes entre l'ombre et la lumière offrent une puissance de création recherchée par l'artiste. Sa touche dans la recherche de la matière pour trouver des textures et des matières de transparence est vive et énergique. Coloriste avéré à l'instar de tous les peintres du sud de la Méditerranée, il utilise abondamment le bleu et l'ocre, s'intéressant aussi à la lumière et sa source sans toutefois manquer de créer une perspective qui donne de la profondeur de champ au tableau. Du foncé au clair réalisant des signes et des symboles, il a réussi à synthétiser sa peinture en essayant de ramener, progressivement, le public vers la peinture abstraite. Pour l'heure, Bady Chouchène a trouvé le juste milieu pour rapprocher la peinture du public tunisien au niveau de la thématique et du traitement. Le public profane peut accéder à la lecture des œuvres assez aisément. «Il raconte, prend plaisir dans le traitement de la touche, de la matière, il ne complique pas la vie. Il cherche à aller vers l'abstrait avec des déchets de matière», déclare Mohamed Ayeb. S'il hésite encore à sauter le pas, Bady Chouchène travaille toujours sur cette courbe. Il évoque des sujets que le public peut reconnaître, comme la médina, mais dans ses tableaux, il s'aménage un espace pour faire danser la couleur, les taches, les touches, la transparence, la lumière, l'opacité dans certains fragments. Il tente une évolution abstraite en utilisant des formes et des couleurs simplifiées avec le désir de rester en marge d'une scène artistique trop turbulente et de développer sa démarche artistique tout en douceur et en finesse.