Le projet américain d'interdire les ordinateurs et gros appareils électroniques en cabine, sur les vols internationaux, coûterait jusqu'à 1,2 milliard de dollars aux compagnies Avec une croissance du trafic, qui pour la première fois cette année devrait atteindre les 4 milliards de passagers, des cours du pétrole qui restent relativement bas et des milliards de dollars de bénéfices attendus cette année, tout devrait aller pour le mieux pour le transport aérien. Pourtant, après les bénéfices record de 2015 et 2016, le climat du secteur semble à l'image du ciel de Cancún, au Mexique, où s'est tenue, lundi et mardi, l'assemblée générale annuelle de l'association du transport aérien international, l'Iata : en surchauffe et chargé de gros nuages menaçants. Si les perspectives financières restent bonnes, avec un bénéfice cumulé de 31,4 milliards de dollars pour un chiffre d'affaires de 743 milliards, la baisse de la facture pétrolière, qui a gonflé les profits des compagnies du monde entier au cours des deux dernières années, touche manifestement à sa fin. Et après six années de hausse ininterrompue, le bénéfice cumulé des quelque 200 compagnies membres de l'Iata devrait substantiellement reculer en 2017, selon les dernières prévisions de l'association. Si la demande reste forte, la hausse des capacités et la concurrence accrue continuent d'éroder la recette unitaire, qui reste très mince, sachant que le bénéfice moyen par passager n'est que de 7,69 dollars. Mais, surtout, l'actualité a d'abord ravivé la crainte des attaques terroristes, qui restent la principale menace actuelle pour la santé du secteur. Pour le directeur général de l'Iata, Alexandre de Juniac, ce sujet de la sûreté devait dominer les débats de cette 73e assemblée générale, après l'attentat de Londres samedi qui, après celui de Manchester, pourrait dissuader les touristes internationaux de se rendre en Europe. Mais, aussi, avec le projet américain d'interdire les ordinateurs et gros appareils électroniques en cabine, sur les vols internationaux, qui, selon l'Iata, coûterait juqu'à 1,2 milliard de dollars aux compagnies, rien que sur les liaisons entre l'Europe et les Etats-Unis. Si les autorités américaines ont repoussé l'application d'une telle mesure, toujours limitée, pour l'heure, aux vols au départ de 11 pays à majorité musulmane, le sujet reste d'actualité, prévient Alexandre de Juniac, qui s'en est personnellement entretenu avec le ministre américain pour la Sécurité intérieure, John Kelly. « Nous pensons qu'une telle mesure ne serait pas appropriée, souligne-t-il. Sur les routes où cette interdiction est appliquée, nous constatons déjà un impact sur le trafic, les voyageurs s'efforçant d'éviter ces vols. C'est pourquoi nous avons proposé d'autres mesures alternatives, comme le renforcement des moyens de détection des explosifs et l'amélioration des échanges d'informations sur les passagers entre les Etats, afin de faire face à ce risque.» Une position soutenue par Jean-Marc Janaillac, le PDG d'Air France-KLM, dont c'est la première participation à une AG de l'Iata. «Nous nous félicitons du travail de l'Iata sur cette question, a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Nous espérons que le bon sens l'emportera et que des solutions positives seront trouvées. Quand on voit ce qui s'est passé pour les compagnies du Golfe, on peut être inquiet, car nous avons bien plus de vols sur les Etats-Unis qu'eux». Cette interdiction, ajoutée aux restrictions américaines imposées en début d'année sur l'entrée aux Etats-Unis pour les ressortissants de plusieurs pays associés au terrorisme, expliquerait notamment la baisse historique du trafic sur les Etats-Unis des grandes compagnies du Golfe, en recul de 2,8 % en avril pour la première fois depuis 2008. Pour la première fois depuis cinq ans, la croissance globale du trafic des trois grandes compagnies du Golfe est même inférieure à la moyenne mondiale et la plus emblématique des compagnies du Golfe, Emirates, a vu ses bénéfices plonger de 80 % sur l'exercice 2016-2017. Des compagnies du Golfe d'ailleurs fort discrètes cette année, à l'assemblée générale de l'Iata. Ni Tim Clark, le PDG d'Emirates, ni James Hogan, le directeur général d'Etihad sur le départ, n'ont fait le déplacement, le seul représentant du trio du Golfe étant Akbar Al Baker, le patron de Qatar Airways.