Bien qu'il n'y ait plus de sièges disponibles, les spectateurs se tenaient debout pour assister à cette soirée ramadanesque. Il est environ 23h00 vendredi dernier, la Rachidia dans la Médina de Tunis, qui organise depuis 4 ans au mois de ramadan le festival Tarnimet, affiche complet. Au programme de ce festival, qui constitue un pendant du festival de la Médina, le concert de la chanteuse Nabiha Karaouli. Un public nombreux attend impatiemment le la. Derrière la porte fermée, Hédi Mouhli, maître des lieux, accueille les retardataires. Bien qu'il n'y ait plus de sièges disponibles, les spectateurs se tenaient debout pour assister à cette soirée ramadanesque qui marque le retour aux sources de l'artiste. La proximité de la scène avec le public offre une ambiance chaleureuse et conviviale. Pas d'intermédiaire entre la chanteuse et ses fans. Accompagnée d'un «Takht» (une formation de trois personnes), elle annonce la couleur de sa prestation placée sur le thème du «Hânin» (nostalgie). Le cadre sied à ce genre de chanson issue du patrimoine tunisien. Durant plus de deux heures, elle alterne ses refrains avec ceux des chanteurs et chanteuses célèbres d'autrefois. Elle interprète en l'occurrence des airs du répertoire de la Rachidia particulièrement du malouf, «Ya Lali», «Ya Hajira» de Hana Rached, «Fil berrima» de Cheikh El Afrit, «Mahla aynik» de Naâma, « Masabek Bourgdana » de Habiba Msika, «Bakhnoug» de Saliha, «Wech», une chanson personnelle qui a eu beaucoup de succès, le fameux tube « Mabrouka » et d'autres mélodies qui ont enchanté l'auditoire. La voix de Nabiha Karaouli n'a pas été altérée par les années. Elle est restée intacte et savoureuse. Elle hérite le timbre des anciennes chanteuses de renommée venues des régions rurales telles que Saliha, Naâma, Zouhaïra Salem... Capsienne, elle respecte les intonations authentiques de la région. Une caractéristique qui lui donne un cachet particulier qu'elle préserve tout au long de sa carrière. La Médina de Tunis, grâce à son festival ramadanesque, a été rendue célèbre à ses débuts, au milieu des années 80. La reprise de «Choftek marra» de Louisa Tounsia lui ouvre les portes du succès puis remarquée par le talentueux compositeur Anouar Brahem qui lui dédie en 1987 «Anawara el achka» (Passion de fleur), paroles signées Ali Louati, elle remplit les gradins du festival de Carthage de 2010. Elle était au top du top. La fleur n'est pas encore fanée, elle essaie de se nourrir de l'énergie de son public qui continue à lui être fidèle. Aujourd'hui, Nabiha Karaouli vit de son propre capital mais aussi celui de l'héritage des autres mais jusqu'à quand ? Peut-elle encore se renouveler dans une scène artistique où les choix musicaux sont limités et les motivations des artistes sont essentiellement pécuniaires ? En attendant qu'elle renouvelle son répertoire, elle continuera à séduire son public avec «Mabrouka» un tube qui lui porte bonheur et dont les auditeurs ne se lassent pas.