Un réseau bien ramifié de racketteurs opère depuis des mois à partir de Monastir, Mahdia et Sfax. La principale base du réseau est le patelin d'El Messatria du côté de Jebeniana. Les malfaiteurs utilisent dans leurs incursions des voitures volées. Pour communiquer avec leurs victimes, les malfaiteurs exploitent des puces volées. Les rançons réclamées varient entre 5.000 et 8.000 dinars. Détails. La recrudescence des vols de véhicules (surtout les camionnettes) ne cesse d'inquiéter et de donner du fil à retordre à nos pairs dans la région du Sahel. Les camionnettes volées sont, ou bien immédiatement acheminées vers l'Algérie ou la Libye à travers les circuits de la contrebande, ou bien démontées avant d'être écoulées sur le marché local. Au lieu de les revendre, certains de ces malfrats préfèrent les rendre à leurs propriétaires en échange d'une rançon qui varie entre 5.000 et 8.000 dinars! La plupart des victimes, soucieuses de récupérer leur principal outil de travail, n'ont pas d'autre choix que d'obéir, la mort dans l'âme. Les gangsters opèrent à partir de Mahdia et Monastir. Mais leur quartier général se trouve du côté de Jebeniana, une zone dite El Messatria. Les malfaiteurs, pour la plupart des bricoleurs qui maîtrisent parfaitement les rudiments élémentaires de la mécanique et de l'électricité auto, utilisent des voitures volées et des vélomoteurs pour commettre leurs forfaits. Les exécutants des opérations sont, dans leurs mouvements, encadrés de loin par leurs acolytes, eux aussi motorisés. La police sur la bonne piste Ceux-ci, qui sont souvent munis de récipients remplis de carburant, pour se prémunir de toute panne sèche, évitent toujours de circuler en ville, pour échapper aux contrôles des forces sécuritaires. Ils n'empruntent que les pistes agricoles et les routes peu fréquentées pour se mettre à l'abri des mauvaises surprises et des regards indiscrets... Aux dernières nouvelles, l'on apprend que les forces sécuritaires sont sur la bonne piste. Elles auraient identifié la plupart des membres de ce réseau ramifié et arrêté certains d'entre eux. Au clair du jour ! Le cas le plus frappant est celui de Ezzeddine Chbouka, la cinquantaine, qui exerce en Sicile en qualité de conducteur de semi-remorque et qui passe ses vacances estivales, à Chouaria, du côté de Boumerdès. Les faits remontent à samedi dernier. Peu avant midi, l'intéressé regagne son domicile après avoir garé sa camionnette devant les portes centrales de sa maison. A peine s'est-il abandonné à un petit somme qu'il a été réveillé en sursaut par le bruit fracassant d'un démarrage américain. En sortant, il découvre que son véhicule s'est volatilisé ! Vers 15h00, alors qu'il est dans tous ses états, son portable sonne. A l'autre bout : le voleur. Il réclame une rançon de 5.000 dinars. C'est dans la nuit du samedi à dimanche dans une forêt du côté de Jebeniana, dans des circonstances dignes des plus grands films policiers que la victime se plie au diktat et remet la somme au maître-chanteur en contrepartie de la récupération de son véhicule. Cela après que la malheureuse victime a sillonné toutes les pistes de la région à la recherche de l'endroit qui a été fixé pour le rendez-vous : «Ils étaient trois garnements, ne dépassant pas l'âge de 20 ans», nous confie M. Chbouka. Ils étaient à moitié masqués par des cache-cols. A travers la course vertigineuse, qui m'a été imposée, les chenapans cherchaient à s'assurer que je ne leur tendais pas un piège et que je n'étais pas accompagné par une équipe policière», nous précise-t-il. Une plainte tardive contre X Le hic, c'est que la victime n'a pas pris la peine de déposer plainte contre X auprès des autorités sécuritaires territorialement compétentes. Finalement, il conta ses déboires rocambolesques à l'un des vice-procureurs de la République, près le tribunal de première instance de la ville de Mahdia. Une lettre au nom du chef de la brigade des investigations et des recherches de Mahdia lui a été alors remise, avant d'être aiguillé vers la brigade en question pour enquête et investigations. Une remise spéciale C'est presque dans les mêmes circonstances que Maâtallah Farhat, 35 ans, a été racketté. Sa camionnette, valant plus de 25.000 dinars, lui a été dérobée en un clin d'œil alors qu'il faisait paisiblement sa sieste ! La victime originaire du rif de Boumerdès (à Chouarïa), s'est vu réclamer le jour même la rondelette somme de 8.000 dinars en contrepartie de la récupération de sa camionnette. Après de longues négociations par téléphone, une remise spéciale de 1000 dinars lui a été consentie. C'est près d'El Msatria (Jebeniana) que l'échange a eu lieu. «J'ai vécu les moments les plus pénibles de ma vie en me trouvant nez à nez avec de dangereux voyous en pleine nature et en pleine nuit, nous confie l'intéressé. J'étais mort de crainte de perdre ma camionnette et l'argent. Parce que j'avais affaire à des énergumaènes imprévisibles!». L'affaire est à présent entre les mains de la brigade de police judiciaire de Rejich (Mahdia). Maudite baignade ! Autre cas de vol. Il a eu lieu à la plage de Habdia, là où le propriétaire d'une camionnette 4x4, flambant neuve et coûtant environ 50.000 dinars, s'est hasardé à profiter de la fraîcheur de la mer. En quittant l'eau, il subit une douche écossaise, en ne trouvant pas les clés de son véhicule (dissimulées dans ses effets personnels déposés sous son parasol). Il courut en direction du parking pour vérifier si sa voiture était toujours à sa place. Mais, en arrivant sur le terre-plein, il s'aperçut qu'elle avait disparu. La victime répondant au nom de Med Ali Chaleghmi, 40 ans, commerçant de son état, est allé dare dare donner l'alerte au poste de police de Mahdia. Il espère que les malfrats l'appellent pour réclamer une rançon et lui permettre ainsi de récupérer son véhicule. «A chaque fois que le portable sonne, a relevé la victime, j'ai l'espoir que ce soit eux. Mais en vain. Aucun signe de vie jusqu'à aujourd'hui ». Les racketteurs ont le vent en poupe ! Kamel Ben Youssef Ali, 38 ans, agriculteur et éleveur de bétail, figure parmi les victimes qui se sont fait subtiliser leur voiture. Il a dû débourser 6.000 dinars pour pouvoir récupérer sa camionnette. Selon la victime, résidant lui aussi, du côté de Boumerdès, les voleurs ont empoisonné ses chiens avant de disparaître avec son véhicule qui lui a coûté 33.000 dinars. Ce n'est qu'après trois mois et demi que les malfaiteurs se sont manifestés en lui téléphonant pour réclamer 6.000 dinars. C'est au niveau de la route reliant Touza à Béni Hassan que l'opération d'échange a été réalisée. Cela dit, comment le réseau a-t-il pu, à chaque coup, obtenir le numéro de la victime ? Une question demeurée sans réponse jusqu'à aujourd'hui. Dommage qu'on cède vite au chantage ! SG du syndicat du District de police de Monastir, M. Béchir Ben Romdhane, «regrette beaucoup que les intéressés cèdent si facilement au chantage. Ce qui ne fait qu'encourager ces réseaux à continuer sur leur lancée et sévir davantage». Notre interlocuteur déplore encore plus que certaines victimes s'abstiennent de déclarer aux autorités sécuritaires de si graves incidents. Ce qui n'est pas pour faciliter la tâche de la police et de la Garde nationale.