Kaïs Saïed, détenus politiques, Ons Jabeur… Les 5 infos de la journée    Tunisie | Le président Saïed met en garde contre toute tentative d'atteinte à la sûreté de l'Etat    Bourse de Tunis : Le Tunindex entame la semaine en légère hausse    Tunisie – Augmentation des prix de 320 médicaments produits localement    Tunisie – Jumelage entre l'amphithéâtre d'El Jem et le Colosseo de Rome    WTA 1000 de Madrid : Ons Jabeur va en quarts    La Tunisie toujours couchée sur la liste noire du FMI    Tunisie – Saïd appelle à développer davantage les relations fructueuses avec la Hongrie    Traite des personnes et blanchiment d'argent : un réseau criminel démantelé    Hand – Coupe de Tunisie : programme des quarts de finale    Conflit à Gaza : Intensification des affrontements et bilan lourd pour l'armée israélienne    Palestine occupée : plus de 200 colons profanent la mosquée d'Al-Aqsa    Non, le Sénégal n'a pas adopté la langue arabe à la place du français    Ecosse : Le premier musulman nommé Premier ministre a tenu à peine un an, démission forcée…    HAYA : Journée sportive pour le jeunesse    Lancement du nouveau modèle Ford Ranger    Les détenus politiques entament une grève de la faim ouverte    Décès de Noureddine Ketari    Bonne nouvelle pour les pluviophiles: La pluie devrait faire son grand retour demain [Vidéo]    Un bus reliant la gare TGM à l'aéroport Tunis Carthage est mis à disposition des voyageurs    TotalEnergies : « Les idées ont besoin d'énergie pour grandir ! »    Journées Romaines de Thysdrus : retour en vidéos sur la manifestation qui a animé la ville d'El Jem    Les étudiants tunisiens manifestent pour une Palestine libre et indépendante    Monastir : des voyous s'attaquent aux citoyens et sèment la terreur    Commissions régionales – Suivi du programme des sociétés communautaires : Les sociétés communautaires proposent un nouveau modèle de développement    Le Groupe CARTE rend hommage à Afifa Boughzou    Les finances des ménages – Analyses des simulations : A combien se chiffre le salaire décent pour les Tunisiens ?    Evénement «Robotic Space 3.0» : Intégrer l'intelligence artificielle dans l'éducation    Conférence de la ligue des parlementaires : Le soutien de la Tunisie au peuple palestinien est indéfectible    COMMENTAIRE | Entre Mai 1968 et Avril 2024 : les étudiants donnent de la voix et montrent la voie !    Maidani Dhaoui : non, il n'y a pas lieu de parler de moutons à deux mille dinars !    Chambre de Commerce et d'Industrie de Tunis : Promouvoir les échanges économiques entre Tunis et Prague    Colloque : Pour un accès équitable à la Justice    Magazine de l'Union de Radiodiffusion des Etats Arabes : Conquérir un public autre qu'arabe    ECHOS DE LA FILT | Pavillon de l'Italie, invitée d'honneur : Les enfants à la découverte de Pimpa di Altan et son voyage en Italie    «META MORPHEE» de Thomas Egoumenides à Yosr Ben Ammar Gallery jusqu'au 11 mai 2024 : Poétisation et apologie de l'obsolète    La Tunisie, 2e pays à l'échelle arabe en nombre de chercheurs    Le SRS lance son académie de basket Ball : Une tradition restaurée !    Joueurs agressifs sur les terrains : Pourquoi pas un contrôle antidopage ?    Moez Ben Salem à la tête de la Société africaine de dermatologie et de vénérologie    Une caravane de santé au profit de 200 bénéficiaires à Mhamdia    Une première en France : Le gouvernement annonce une plainte contre Mélenchon    Elections de la FTF : rejet de l'appel de Wassef Jlaiel, réexamen des listes de Ben Tekaya et Tlemçani    Ons Jabeur en huitième de finale du tournoi de Madrid    Gianni Infantino félicite l'EST pour sa qualification à la coupe du monde des clubs 2025    Omar El Ouaer Trio et Alia Sellami au Goethe Institut Tunis pour célébrer la journée internationale du Jazz    Sousse - L'Institut français de Tunisie inaugure un nouvel espace dédié à la jeunesse et à la coopération    Hédi Timoumi : certains donnent des cours d'histoire sans l'avoir jamais étudiée    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«La belle et la meute est une quête de justice»
Entretien avec la réalisatrice Kaouther Ben Henia
Publié dans La Presse de Tunisie le 11 - 10 - 2017

Forte de la sélection de son film de fiction «La belle et la meute» dans la section Un certain regard au festival de Cannes 2017, Kaouther Ben Henia parcourt les festivals pour montrer son dernier-né : un réquisitoire poignant contre les abus de certains policiers qui se croient au-dessus de la loi et un combat acharné d'une jeune femme violée en quête de justice dans la Tunisie de l'après-révolution. A Namur où le film était en compétition officielle, elle nous a accordé cet entretien.
Depuis son passage au festival de Cannes dans la section Un certain regard, «La belle et la meute» est sollicité par plusieurs autres festivals dans le monde. Considérez-vous qu'une sélection à Cannes est en elle-même une consécration qui ouvre de larges perspectives au film ?
Absolument. Cannes est une fenêtre incroyable pour exposer son film et cela peut changer la vie d'un film. Je l'ai déjà remarqué pour le premier, «Le Challat de Tunis», qui n'avait pas de distributeur. Personne n'en voulait parce qu'il n'était ni tout à fait un documentaire, ni non plus une fiction et lorsqu'il a été sélectionné à l'ACID, une section parallèle du festival de Cannes, un distributeur a été tout de suite intéressé d'assurer sa programmation. Pour ce qui est de «La belle et la meute», la fenêtre est plus grande ouverte dans la mesure où le film a été en sélection officielle, ce qui lui a permis d'être vendu dans plusieurs pays. Cela change évidemment la vie d'un film.
Cela change aussi la vie d'une cinéaste...
Peut-être, mais la responsabilité est plus importante. Le problème est que Cannes ne simplifie pas les choses, en tout cas pas pour mon prochain film. C'est toujours la même galère.
Votre précédent film «Zeineb n'aime pas la neige» a obtenu le Tanit d'Or des JCC 2016. Il est de coutume que le réalisateur dont le film a été primé participe comme membre du jury à la prochaine session. Si c'est le cas, cela privera «La belle et la meute» de concourir pour le Tanit d'Or.
On ne m'a pas contactée pour être dans le jury, mais on a soumis le film au comité des JCC et il est retenu pour la compétition officielle.
«La belle et la meute» est inspiré d'une histoire vraie. Avez-vous procédé à une reconstitution des faits et quelle est la part du documentaire et celle de la fiction ?
Il n'y a pas eu reconstitution des faits. Je me suis basée sur l'événement majeur qui est le viol et je me suis approprié l'histoire pour créer un univers fictionnel avec ses propres codes. Je reprends certes quelques éléments de la vraie histoire, mais j'ai pris beaucoup de liberté.
L'avez-vous filmé comme un documentaire ou une fiction ou comme les deux à la fois? On retrouve encore une fois la même ambiguïté.
Cela me fait plaisir d'entendre dire cela parce que c'est la recherche de chaque réalisateur de créer de la vraisemblance et de l'authenticité. Au final, on est en présence d'acteurs et de décors pour créer de la vie et de la vraisemblance. C'est quelque chose qui me vient du documentaire. Un film impose sa forme et la manière de le faire qui porte en elle les germes puis commence à grandir petit à petit. Il est vrai que je navigue entre les deux genres.
A l'instar de vos précédents films, vous aimez surfer sur les genres : documentaire et fiction. Comment peut-on qualifier vos films : de documentaire, de fiction ou les deux à la fois ?
C'est un grand débat. Un film c'est un film. Après, il y a des genres et des sous-genres. «Zeineb...» est vraiment un documentaire selon une certaine définition. Alors que «La belle et la meute» est une fiction, puisque les acteurs sont payés. «Le Challat de Tunis» est un peu ambigu. Il s'agit d'un faux documentaire où les personnages jouent leur propre rôle. Là, j'ai poussé le concept très loin, mais il me semble qu'entre documentaire et fiction, c'est comme deux pays, on pense que la frontière est une ligne tracée, or, si on s'approche du sol on constatera qu'il n'y a pas de trace. Dans cette zone de no man's land, il y a des choses intéressantes à explorer.
C'est ce no man's land qui vous attire et que vous aimez explorer.
Pas tout le temps, j'y vais, je m'y éloigne.
Les événements du film se situent dans la Tunisie de l'après-révolution, vous montrez des institutions en stagnation ou en mutation : police, santé, éducation qui au lieu d'être au service du citoyen, sont sclérosées à cause de la rigidité des lois qui tardent à changer. Est-ce un constat ou une prise de position que vous faites ?
Je ne pense pas qu'il s'agit d'un problème de loi, on se cache derrière les procédures et cela peut devenir kafkaïen, mais cette situation est partout la même dans le monde. Ce n'est ni un constat ni une prise de position. Je traite une fiction qui pourrait être réelle. J'avais besoin d'éléments pour construire une histoire. Imaginons que je fasse un film sur quelqu'un qui combat un dragon, c'est le cas du personnage du film, et ce, pour obtenir justice. Pour combattre donc le dragon, il faut qu'il lui fasse peur, il ne doit pas ressembler à un ver de terre. Plus le dragon fait peur et plus il est dos au mur et il est poussé par un instinct de survie qui lui permet d'avancer. Je reviens toujours au conte, aux personnages et leur trajectoire. C'est ça qui fait l'architecture du film.
Peut-on dire que le film s'inscrit dans le cadre de la lutte contre la corruption menée actuellement par le gouvernement Chahed ?
(Rire) Si ça peut aider pour la lutte contre la corruption, je serais contente. Mais je ne sais pas si les films changent les choses.
Dans le film, la victime décide de recourir en dernier lieu au procureur de la République. Est-il la seule source judiciaire fiable ?
Cela dépend des personnes. Il y a des gens qui ressemblent de plus en plus à leur fonction. Il n'y a pas de hiérarchie dans les vertus.
Tout le poids du film est mis sur les épaules de l'actrice. Comment l'avez-vous choisie et quelles sont les recommandations que vous lui avez indiquées pour son personnage ?
Je lui ai demandé de me fournir des essais. En les visionnant, j'ai trouvé qu'elle dégageait quelque chose d'intéressant et qu'elle est une fille sérieuse, bosseuse et exigeante comme moi. Du coup, on a commencé à travailler et cela a pris beaucoup de temps de préparation, de discussion, etc. Je voulais qu'elle fournisse une certaine authenticité et une crédibilité. On a commencé par ce qui se dit dans sa tête et qui n'est pas dans les dialogues. On a travaillé sur son corps, sa robe, sa démarche, sa métamorphose ainsi que sur tous les autres détails.
Qu'est-ce qui a motivé le choix des longs plans-séquences ?
Le temps réel est magique au cinéma. C'est une plongée dans le moment. C'est comme dans la vraie vie, il n'y a pas de montage. La caméra est tout le temps collé au personnage et on vit ses vibrations, son errance et cela crée un lien très fort avec le spectateur et en plus les mêmes fragments me permettent de travailler l'ellipse, le hors-champ. Je trouve intéressant d'intégrer ce qu'on ne voit pas et de croire qu'on l'a vu. C'est un tour de magie que j'aime beaucoup et en plus, c'est pour moi un défi de travailler de cette manière-là.
Le duo que vous formez avec le producteur Habib Attia est une carte gagnante jusqu'à présent. Quel est son apport dans le processus de production du film ?
Quand je travaille avec des gens avec qui je m'entends, je les garde parce que c'est précieux. Ça marche avec Habib et on retravaille ensemble. Il est d'abord mon premier lecteur de scénario. Mon projet devient le sien aussi, il le défend et pense à trouver un financement et des solutions pour le film.
Est-ce que «La belle et la meute» est un film sur la violence ou sur la justice ?
Ni l'un ni l'autre ou plutôt les deux à la fois. C'est une quête de justice.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.