BUDAPEST (Reuters) — Les autorités hongroises ont écarté hier tout risque de catastrophe biologique ou environnementale dans le Danube après la coulée de boue rouge toxique survenue dans l'ouest du pays. Le ministre de l'Intérieur, Sandor Pinter, a exclu ce risque en raison de la baisse du taux d'alcalinité constatée dans le fleuve. Il a précisé lors d'une conférence de presse que l'eau destinée à la consommation n'avait pas été affectée. «Maintenant, nous ne considérons pas la pollution qui a atteint le Danube comme une vraie pollution car la boue a un pH inférieur à 9 et pourra se dissoudre en quelques kilomètres», a-t-il dit. «Cela ne causera donc pas de dégât biologique ou environnemental.» La porte-parole du gouvernement, Anna Nagy, a souligné que l'impact de la coulée restait limité à la région directement affectée et ne s'étendait pas au reste du pays. Le porte-parole de l'agence de lutte contre les catastrophes, Tibor Dobson, a également déclaré que les derniers chiffres montraient un pH de 8-8,2 dans le Danube, ce qui est considéré comme normal. Il s'élevait à 9 quand les boues rouges ont atteint le fleuve jeudi. «Ces chiffres nous donnent de l'espoir (...) et nous n'avons pas constaté de dégât dans le Danube pour le moment», a ajouté le porte-parole. Cinq morts et plus de 150 blessés Le bilan des victimes de la coulée de boue a été revu à la hausse et s'établit à cinq morts, plus de 150 blessés et trois disparus. Des équipes de nettoyage s'efforcent de réduire la toxicité de ces boues rouges qui se sont échappées lundi d'un bassin de rétention d'une usine d'aluminium à Ajkai. Ces boues sont constituées de résidus très corrosifs issus du raffinage de la bauxite. Elles ont d'abord contaminé une rivière, la Marcal, où tous les poissons sont morts, avant de rejoindre la rivière Raba, un affluent du Danube, puis un bras secondaire du fleuve, le Mosoni-Danube, et enfin le lit principal jeudi midi. Des poissons morts ont été vus également dans la Raba et le Mosoni. Les équipes de nettoyage surveillent la qualité de l'eau du Danube alors que la nappe polluée descend en aval vers Budapest. On ne dispose pour l'instant d'aucune estimation chiffrée du coût de cette pollution. La coulée de boue a touché entre 800 et 1.000 hectares. Les autorités ont déclaré l'état d'urgence dans trois comtés mardi après la coulée de boue qui a frappé en premier lieu les villages de Kolontar et Devescer, à 160 km à l'ouest de la capitale. Inquiétude de Greenpeace Ces localités souffriront longtemps de cette catastrophe, selon le groupe de défense de l'environnement Greenpeace qui a prélevé des échantillons à Kolontar, tout près du réservoir, et estime que le risque pour l'environnement a été sous-estimé par les autorités. Greenpeace ajoute que ses conclusions sont appuyées par celles de l'Institut fédéral autrichien de l'environnement, à Vienne, et de l'institut d'analyse Balint à Budapest. Le groupe ajoute que si l'Académie hongroise des sciences a noté qu'il n'y avait pas de traces excessives de métaux lourds ou de mercure dans les zones touchées, elle ne dit rien du chrome ou des polluants à l'arsenic. «Nous ne savons pas quand l'Académie des sciences a mené ses analyses, ni comment. Nos données à nous sont très différentes», a dit aux journalistes le directeur de Greenpeace pour la Hongrie, Zsolt Szegfalvi, ajoutant que les niveaux d'arsenic, de mercure et de chrome étaient particulièrement élevés à Kolontar. «Cette contamination pose un risque à long terme à la fois à l'eau et à l'écosystème», a-t-il dit, expliquant que ces métaux lourds se diffusent dans l'environnement au fur et à mesure que baisse le taux d'alcalinité. Gabor Figeczky, directeur de la branche hongroise du Fonds mondial pour la vie sauvage (WWF), avait estimé jeudi que sur la base des estimations actuelles la pollution devrait rester limitée à la Hongrie. Le Danube, une fois qu'il quitte la Hongrie, traverse ou longe les territoires croate, serbe, bulgare, roumain, moldave et ukrainien avant de se jeter dans la mer Noire.