La conformité du système financier tunisien aux normes internationales est devenue fondamentale pour permettre une meilleure intégration des entreprises tunisiennes. Mais la couverture des risques doit être prise en compte dans un tel processus. Le développement des produits dérivés est, selon les experts, un instrument efficace pour pallier cette contrainte. Prenant conscience de cette situation, la Banque centrale de Tunisie, l'Association tunisienne professionnelle des banques et des établissements financiers (Atpef) et le Forex Club de Tunisie ont signé hier un mémorandum d'entente pour une meilleure coopération au profit du développement du marché des capitaux, de la liquidité interbancaire et de l'utilisation des produits dérivés, en marge du symposium organisé, hier, au siège de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur le thème «Développement des produits dérivés en Tunisie : préalables réglementaires et techniques». Des programmes de formation seront ainsi fixés au profit des professionnels du secteur bancaire. Notons que les produits dérivés financiers sont des instruments financiers dont la valeur fluctue en fonction de l'évolution du taux ou du prix d'un autre produit appelé sous-jacent. Marouan El Abassi, gouverneur de la BCT, a souligné que la lutte contre les risques du marché financier est devenue fondamentale, surtout que la Tunisie vit une situation critique et n'a plus de temps à perdre pour gérer ces contraintes. «Nous avons des problèmes d'origine interne. Les marchés volatiles sont une source de risque. Les prix ne sont pas stables et affectent les activités des entreprises, leur pérennité et leur rentabilité. Le prix du baril de pétrole a frôlé actuellement les 76 dollars. Cela n'a pas été prédit par les experts des institutions financières internationales. Et même aujourd'hui, on ne pourra pas prévoir ce qui arrivera jusqu'à fin 2018 ni en 2019», lance-t-il. Selon M. El Abassi, le marché des produits dérivés est encore embryonnaire en Tunisie. Mais ces produits requièrent un cadre particulier, une documentation propre et une adaptation de la législation nationale aux législations internationales. Le gouverneur de la BCT a affirmé que le débat sur les réformes juridiques doit être entamé incessamment. «Ces réformes sont nécessaires pour notre écosystème financier. Il faut les mettre en place dans les plus brefs délais. Il faut qu'elles soient conformes aux réglementations internationales. Mais il faut aussi travailler sur la simplification de la législation et la rendre plus lisible», insiste-t-il. Système sécurisant De son côté, Ahmed El Karam, président de l'Aptbef, a souligné que le développement des produits dérivés procure trois avantages au système financier. Il permet, tout d'abord, de réduire les risques pour les entreprises face à un marché qui connaît une volatilité du taux d'intérêt et du taux de change. En deuxième lieu, il offre la possibilité de développer les affaires par un effet de levier sur les secteurs d'activité et la création de nouvelles activités. En troisième lieu, M. El Karam affirme que les produits dérivés comportent en leur sein une acceptation de la spéculation dans un sens économique, permettant de dynamiser le marché, mais requiert une parfaite maîtrise de ces produits pour éviter les risques systémiques. Le président de l'Aptbef a ajouté que la Tunisie a bien adopté les accords de Bâle III, couvrant tout type de risque et est ainsi préparée à adopter cette démarche, mais il faut penser à la profondeur du marché, l'adoption d'une stratégie pour libéraliser le contrôle de change et la révision de toute réglementation qui freine un bon fonctionnement des produits dérivés. Souci de conformité Béchir Trabelsi, président de Forex Club Tunisie et directeur général de la Gestion des Réserves et des Marchés à la BCT, a indiqué que la crise financière de 2009 a fait ressortir un besoin au niveau du système financier international de mettre en place des normes et des standards financiers. Une situation qui exige de tous les pays de se conformer à ces normes au risque de se trouver en recul des évolutions internationales, surtout face aux risques de la volatilité des prix. «Malheureusement, nous n'avons pas de législations spécifiques qui gèrent ces produits. Ceci peut freiner nos efforts pour construire des relations financières saines pour la couverture des risques et de nous trouver dans un état d'isolement par rapport au marché international», précise-t-il. M. Trabelsi a ajouté que la couverture des risques est également un instrument de bonne gouvernance, qui est fondamental particulièrement pour les entreprises publiques qui doivent être accompagnées pour une plus grande intégration aux marchés internationaux.