La Corée du Sud est un partenaire solide à plusieurs niveaux, à savoir le domaine portuaire, les réseaux routiers et de chemins de fer, les énergies renouvelables et la digitalisation La Tunisie pourrait être une plateforme de production et d'exportation des produits coréens vers l'Europe et l'Afrique, selon Youssef Chahed Il est important d'actualiser le cadre régissant les échanges entre les deux pays pour approcher plusieurs secteurs et conquérir le marché africain dans le cadre d'une coopération tripartite. Le siège de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica) a accueilli, hier, les participants au Forum économique tuniso-coréen, en présence du Premier ministre sud-coréen, Nak-Yon Lee, et du chef du gouvernement, Youssef Chahed. Une rencontre dont l'objectif est de renforcer les liens de coopération datant d'un demi-siècle, et qui restent encore en deçà des attentes des deux parties. D'ailleurs, les échanges commerciaux en 2017 sont estimés à 180 millions de dollars, soit 130 millions de dollars à l'export et 50 millions de dollars à l'import. De son côté, le Premier ministre, qui a exprimé la volonté de son pays d'appuyer la Tunisie dans ses efforts afin de lancer un nouvel élan socioéconomique. « Nous avons la même vision pour la démocratie. La Tunisie a la Constitution la plus démocratique en Afrique, et ce, après le mouvement de contestation de 2011. La démocratisation dans la République de Corée s'est également faite par la révolution des bougies », a lancé Nak-Yon Lee. Il a affirmé qu'il est important d'actualiser le cadre d'échange entre les deux pays pour approcher plusieurs secteurs et aller percer le marché africain dans le cadre d'une coopération tripartite. Nouvelle dynamique Pour le chef du gouvernement, Youssef Chahed, la visite du Premier ministre sud-coréen constitue une occasion pour le lancement d'une nouvelle dynamique et le renforcement de la coopération bilatérale. Une occasion également pour suivre les recommandations de la réunion de la commission mixte qui s'est tenue à Seoul en avril dernier. Il a ainsi appelé les entreprises tunisiennes à profiter de cette rencontre afin de contribuer à la mise en place d'un plan d'action pour booster les relations économiques tuniso-coréennes. « Nous voulons établir des partenariats sur le long terme avec les entreprises asiatiques et surtout sud-coréennes et ouvrir de nouveaux horizons pour les investisseurs sud-coréens. Nous avons une nouvelle loi de l'investissement qui comprend des incitations fiscales intéressantes. Ajoutons à cela les exonérations d'impôts en lien avec le marché européen. La Tunisie pourrait être une plateforme de production et d'exportation de produits sud-coréens vers l'Europe et l'Afrique », a précisé Chahed. Il a également évoqué les réformes économiques lancées par le gouvernement en vue de renforcer l'investissement étranger, de simplifier et de réduire les obstacles administratifs, tout en insistant sur l'amélioration du classement de la Tunisie dans le rapport Doing Business. Le chef du gouvernement a ainsi souligné que la Tunisie aimerait établir une convention commerciale préférentielle avec la Corée du Sud pour la commercialisation de certains produits. Mobilisation commerciale Samir Majoul, président de l'Utica a indiqué, de son côté, que les produits tunisiens peuvent être davantage exportés vers la Corée du Sud, à l'instar des produits agricoles, essentiellement l'huile d'olive, les dattes et les agrumes et aussi les composants automobiles. Concernant les produits sud-coréens, il a souligné qu'ils bénéficient d'une bonne réputation à l'échelle mondiale et en Tunisie, puisque la Corée du Sud est connue pour son expertise dans divers domaines comme les technologies de l'information et de la communication, les industries mécaniques et électriques et l'intelligence artificielle. Majoul a ainsi appelé à une plus grande mobilisation pour améliorer les relations économiques et commerciales, faisant savoir que la moyenne du chiffre d'affaires réalisé ces dernières années entre les deux pays ne dépasse pas les 250 millions de dollars. Il a ajouté que le positionnement privilégié dont bénéficie la Tunisie, à la fois avec l'Europe, l'Afrique et le monde arabe, est une opportunité réelle pour booster ce partenariat. « La Tunisie peut être une plateforme pour les entreprises sud-coréennes, surtout lorsque ces dernières cherchent à s'orienter vers ces trois marchés. C'est un modèle de partenariat gagnant-gagnant », a-t-il rétorqué. Un avis partagé par Pyung-Oh Kwon, PDG de l'Agence coréenne de promotion du commerce et de l'investissement (Kotra), indiquant que l'accord d'association entre la Tunisie et l'Union européenne représente une opportunité pour développer davantage les relations commerciales. Il a estimé que la Tunisie dispose aussi d'une expertise et de ressources humaines qualifiées. Projets en cours Le chef du patronat tunisien a affirmé que la Corée du Sud est un partenaire solide dans les grands projets que la Tunisie est en train de mener, que ce soit dans le domaine portuaire, les réseaux routiers et des chemins de fer, les énergies renouvelables et la digitalisation, vu la grande expérience des entreprises coréennes. De son côté, le Premier ministre coréen a évoqué plusieurs domaines d'activités à exploiter davantage pour renforcer la coopération économique et commerciale entre les deux pays. En premier lieu, les TIC pour le renforcement de la transparence et l'efficacité de l'administration tunisienne, notant qu'un nouveau système de passation des marchés publics (Tuneps) a été déjà mis en place avec l'assistance de l'Agence coréenne de Coopération internationale (Koika). Aussi, et dans le domaine agricole, un projet d'exploitation des drones dans les fermes d'oliviers en Tunisie est en cours de lancement. En troisième lieu, pour les énergies renouvelables, une étude de faisabilité est en train de se préparer pour la réalisation d'une centrale solaire entre la Steg et la Koika. Enfin, et au niveau des infrastructures, la Corée du Sud, qui dispose d'une grande expérience, est prédisposée à apporter sa contribution dans le domaine. A l'issue du forum, la Tunisie et la Corée du Sud ont convenu de créer une chambre mixte de commerce qui constituera une plateforme d'échange entre les deux pays. Signature de trois mémorandums d'entente En marge du Forum économique tuniso-coréen, trois mémorandums d'entente ont été signés pour renforcer le partenariat entre la Tunisie et la Corée du Sud. Une première convention entre le Centre de promotion des exportations et l'Agence coréenne de promotion du commerce et de l'investissement (Kotra). Une deuxième entre l'Instance tunisienne de l'investissement (TTA) et Kotra. Une troisième entre la Haute instance de la commande publique (Haicop) et la Koika. Selon Hichem Elloumi, vice-président de l'Utica, ces mémorandums ont pour but de favoriser le rapprochement entre les différents organismes et de développer le système de passation de marché « Tuneps ». Il a affirmé que le forum économique vise à exploiter le potentiel de croissance qui existe entre les deux pays. « L'objectif est de développer les échanges commerciaux qui ne dépassent pas les 600 MDT, avec un déséquilibre de la balance commerciale en faveur de la Corée du Sud. De même, le niveau de l'investissement en Tunisie est de 50 MDT seulement », a-t-il affirmé. Pour Slim Feriani, ministre de l'Industrie et des PME, la diversification des partenaires économiques est importante pour la Tunisie, surtout que la Corée du Sud est un modèle de réussite économique. Il a indiqué que le secteur privé doit se mobiliser davantage pour identifier les opportunités d'affaires. Développer l'échange Lassaad Laabidi, PDG du Cepex, a affirmé qu'il y aura des actions de formation en Corée du Sud pour s'inspirer de l'expérience de ce pays. Selon Khelil Laabidi, président de la TTA, la Corée du Sud possède des fleurons en matière d'industrie automobile, électronique et électrique. Le forum est ainsi l'occasion de lancer les bases d'une coopération bilatérale pour échanger les informations afin de faciliter les déplacements des investisseurs coréens en Tunisie et des investisseurs tunisiens en Corée du Sud. En ce qui concerne la coopération tripartite, M. Laabidi a affirmé qu'il s'agit d'une démarche à haut potentiel. « Nous avons un capital inégalé de sympathie et de confiance en Afrique. De l'autre côté, la Corée du Sud a un potentiel industriel confirmé ; et l'Afrique a des besoins en matière d'industrialisation. Nous avons tous les trois un intérêt à coopérer », a-t-il précisé. M.O.