Le rappeur tunisien El général Lebled a été incarcéré trois jours pour avoir mis en ligne sur Facebook une chanson qui interpellait le président tunisien Ben Ali sur la misère sociale des jeunes Tunisiens. Voici un entretien qu'il a accordé à une agence de presse. Avant la Révolution de Jasmin, est-ce que les artistes reflétaient dans leurs œuvres, les angoisses des gens, les peurs de la société, la colère des jeunes contre le chômage? Ou est-ce que le rôle et les démarches des artistes étaient plutôt élitistes en Tunisie? Oui, il y a des créations élitistes, mais un travail élitiste pour tout le monde. La plupart des propositions artistiques en Tunisie cherchent à exprimer une dimension de la vie avec le filtre individuel, subjectif, etc. De ce point de vue, il y avait une certaine interaction entre la société et la création artistique. Rétrospectivement, y avait-il une création annonciatrice de la révolution? Oui, au niveau de la poésie. Le grand poète Awlad Ahmed avait parlé de cela. Il y a des pièces de théâtre qui en ont parlé, évidemment d'une façon allégorique. Il y a aussi des films. Ce n'était pas une promotion prophétique, mais on sent que cette tension interpelle. Les idées intellectuelles qui ont provoqué la chute de Ben Ali pourraient-elles mettre en danger d'autres régimes autoritaires du monde arabe? La réponse, on la trouve dans la réaction des régimes. Khadhafi est hostile, les autres régimes sont très silencieux, peut-être un peu trop. Ce qui s'est passé en Tunisie ouvre les horizons. La leçon est prise en compte par les gens qui sont pour le progrès, mais aussi par les gens qui veulent garder leur situation et leur statut. Que reste-t-il comme idée-clé de cette Révolution de Jasmin? Peuple, jeunes, croire. Croire dans le peuple et croire dans la jeunesse. Et évidemment la liberté.